Par Rym ghachem attia* En consultation de psychiatrie, il est très fréquent de rencontrer des personnes déprimées bien que l'on sache que 9 déprimés sur 10 ne consultaient pas (étude de Hachmi Zouhair en 1990), mais par contre avaient des comportements hostiles avec leurs entourages, leurs collègues et les plus graves devenaient violents avec leurs compagnes ou enfants, sans compter les troubles cognitifs que cette dépression pouvait occasionner. Mais je voudrais souligner le fait qu'une femme voilée déprimée est très difficile à prendre en charge et le pronostic est souvent sombre car la dépression est en général majeure et elle dure depuis longtemps. En effet, avant de consulter, cette dame a essayé de s'en sortir toute seule, enfin, uniquement en se tournant vers Dieu et une dépression qui se chronicise est en général difficile à traiter. Mais revenons au sujet qui me tient à cœur : les femmes voilées ( 9 fois sur 10) que je vois en dépression ont dans leurs parcours un deuil important ( père décédé ou un mari et parfois même un enfant ou un frère) et de là commence à mon sens la tragédie car ne pouvant ressusciter cet être perdu et rongées parfois par la culpabilité de n'avoir pas été assez présentes, elles ne voient qu' une seule issue, celle de s'en " remettre" à Dieu et en cessant de gérer leur vie et de se battre . Je tiens à mettre les choses au point, toutes les femmes voilées ne sont pas déprimées et vice-versa, les déprimées ne se voilent pas toutes. Non, dans aucune religion Dieu nous ordonne d'être passif, bien au contraire, il a toujours prôné le combat, pas dans le sens guerrier, mais dans un sens noble, celui de gérer sa vie comme on l'entend et selon sa conscience. Alors mesdames, je comprends votre foi mais je ne peux admettre que l'on puisse, nous les femmes, pour esquiver ou éliminer la pulsion sexuelle malsaine de certains hommes, nous cacher ou voiler notre visage. Quant aux autres accoutrements tels que la burqa ou que sais-je encore, quelle peut être leur signification sinon une agression vers les personnes rencontrées qui ne la portent pas ? Je te vois mais toi tu n'as pas le droit de me voir. Ma religion est l'islam. J'aime cette religion mais j'aime aussi le christianisme ou le judaïsme et elle n'est pas un accoutrement ou encore un déguisement, ma conscience (le grand autre Dieu) me guide et c'est uniquement à elle que je rendrai des comptes et non à telle ou telle personne qui prétend interpréter à sa manière les religions et veut nous imposer des règles qui ne peuvent coexister dans notre siècle. Loin de moi de penser que la religion ou la croyance est une forme de faiblesse et que les non-croyants sont des personnalités fortes. Pas du tout, la croyance est une grâce et à chacun sa croyance, mais il y a croire et se faire croire et toute la différence est là. La culpabilité, que tout un chacun peut éprouver, est parfois à l'origine d'une forme d'intégrisme religieux, à mon sens, malsain. Je perçois dans notre société une nouvelle mode où des femmes se réunissent pour lire le Coran et faire des "dourats" et là c'est à qui mieux mieux; l'une dira non, il faut lire comme cela, ne m'interrompez pas, l'autre mettra en exergue sa connaissance du "hadith" et dira ce qu'il faut faire et ce qu'il ne faut pas faire, chacune s'instaurant comme le "supposé savoir" en oubliant que notre religion prône une relation entre soi et Dieu sans intermédiaire et à chacun son interprétation. Cessons ces autopunitions et autoflagellations et soyons honnêtes. Alors plus de masques et soyons tous unis pour voir chacun sa vérité et essayer de faire avancer notre pays sur une voie juste, libre et égalitaire.