Par Soufiane Ben Farhat Aux dernières nouvelles, la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la Révolution, la réforme politique et la transition démocratique se sabordera le 13 octobre prochain. Soit dix jours avant les élections pour la Constituante. L'on est en droit de se demander si cette assemblée circonstancielle, qui s'est érigée en instance législative, a encore raison d'exister dès le 1er septembre. Pourquoi le 1er septembre ? Pour la simple raison que plusieurs membres de l'Instance se sont présentés en tant que candidats aux élections de la Constituante sous diverses chapelles. Et que la présentation des candidatures a commencé précisément le 1er septembre et s'est poursuivie une semaine durant. Déjà, l'Instance devra se pencher sur le projet de décret-loi relatif au Code de la presse nous dit-on. Or, pourquoi jouer encore les prolongations dans une partie aux dés pipés ? Pipés, oui absolument, dans la mesure où les protagonistes risquent de devenir juges et parties voire hors-la-loi. Parce que tout protagoniste peut se retrouver, parfois malgré lui et par la force des choses, hors-la-loi. Que penser dès lors des personnes et formations politiques qui se jettent corps et âme dans la bataille électorale. Un bref rappel des faits s'impose : La Haute Instance avait entamé ses activités en mars. Depuis, elle a été secouée par plusieurs crises et épreuves qui ont mis en cause sa crédibilité. Les bras de fer et autres échanges à boulets rouges, intramuros, s'étaient succédés. Ils avaient atteint leur paroxysme à l'occasion notamment de la discussion du décret-loi sur les partis. Plusieurs membres claquèrent bruyamment la porte. D'aucuns sont revenus. Puis sont repartis. Et s'en sont retournés. C'était devenu sinon risible, du moins pathétique. Aujourd'hui, l'Instance devrait discuter du décret-loi sur le Code de la presse. Et il se trouve que plusieurs partis officiant dans l'Instance se soucient de la liberté de la presse comme d'une guigne. Ils le signifient ouvertement, d'une manière à peine voilée : La presse constitue à leurs yeux une caisse de résonance sinon une courroie de transmission. C'est on ne peut plus manifeste dans le débat sur l'interdiction de toute publicité politique dès le 12 septembre. Certains partis politiques, ou des "instances" se déclinant comme tels, tempêtent, frappent du poing sur la table, jurent de tous les maux. Leur unique souci est de présenter des spots de réclame politique. Quitte à ne pas avoir de programme politique clair, sinon quelques lieux-communs et idées reçues en guise de succédané. C'est qu'ils ont une idée fixe qui frise l'obsession : Créer une notoriété assistée via le matraquage publicitaire. Avec, en arrière-fond, des postes à briguer. Et des dividendes multiformes à ramasser à moyen terme. En politique plus qu'ailleurs, on sème de l'argent pour récolter de l'argent. Quels que soient les motifs invoqués. La question est posée. Qu'escompte-t-on d'une Haute Instance qui joue encore les prolongations au-delà du temps mort ? Franchement, tout sauf l'efficience et l'impartialité à toute épreuve. Entendons-nous bien. Quelqu'un qui rentre dans une joute électorale joue pleinement le jeu de la guerre politique. Celle-ci aussi présuppose la simulation, le faux paraître, le positionnement caché et l'embuscade. C'est de bonne guerre, dira-t-on. Mais, dans tous les cas de figure, la neutralité n'est guère de mise pour les politiciens en campagne. La neutralité en l'occurrence, c'est ce que souhaite votre ennemi pour s'emparer de vos places-fortes. Les armées conquérantes raffolent de neutralité et de pacifisme uniquement chez l'ennemi d'en face. Or, à moins de cultiver la puérilité candide, on ne saurait imaginer la Haute Instance officiant pour plus d'un mois encore comme enceinte détachée, au-dessus des partis et des calculs et stratagèmes électoraux. Moralité de l'histoire : La Haute Instance gagnerait à se saborder aujourd'hui même. Sinon, il y a péril en la demeure démocratique. Observons et attendons-nous à de fortes surprises.