Ça plane pour l'Espérance, lancée à cent à l'heure vers la conquête de sa première couronne en LCA Au petit jeu des comparaisons, toujours tentant en matière de football, l'Espérance Sportive de Tunis de l'époque moderne a donc dépassé son illustre ancêtre de 1994, lequel comptait dans ses rangs un carré d'as royal composé de Tarek Thabet, Chokri El Ouaer, Hamrouni et Malitoli. A celui-ci, on pourrait désormais opposer un quintette royal avec Hichri, Traoui, M'sakni, Darragi et Bouazzi. Enfant spontané et adulte réfléchi L'EST de 1994, grand vainqueur de la Ligue des champions dans son ancienne version face au club égyptien d'Ezzamalek, a introduit au cœur du siècle dernier un football différent, à la fois implacable et brillant, résolument tourné vers l'attaque— à une époque où il est vrai, le football n'était qu'offensif —, interprété par des joueurs exceptionnels qui, tous, se sont hissés au-dessus du lot. A leur propos, on a employé le terme de «magie», et le mot n'était ni galvaudé ni anachronique. L'Espérance Sportive de Tunis de ce siècle lui a emboîté le pas sous l'impulsion de son président Hamdi Meddeb, déterminé à marcher sur les traces de son prédécesseur. Grâce à lui, une équipe respire, s'épanouit, croque la vie à pleines dents. Elle s'appuie sur des évidences qui sont la qualité technique, l'inspiration, la fluidité du jeu et le goût d'attaquer (20 buts marqués). Elle s'amuse (face au MCA), elle s'enivre (devant Al Ahly). Elle est à la fois enfant spontané et adulte réfléchi. Les arrivées de Coulibaly et de N'djeng ne constituent pas une réelle surprise tant la coulisse bruissait, depuis quelques mois déjà, des échos de l'engagement de ces deux joueurs par le club de Bab Souika. Représentent-ils un acte qui résulterait d'un vrai projet sportif ou un nouvel acte de folie qui illustre une étroite imbrication entre le monde du football et celui de la finance ? La question est posée concernant une équipe qui souffrirait défensivement en dépit de la présence de la paire Hichri-Banana. La courbe décroissante de ces deux transferts saute aux yeux et symbolise, à elle seule, le nouveau cours du football continental et mondial, qui doit nécessairement recadrer ses finances. Les arrivées de Maâloul, Coulibaly, N'djeng et Khaled Mouelhi garantissent évidemment à l'Espérance la conquête continentale, après avoir remporté le doublé national, la 2e Ligue des champions de son histoire que ce club a laissé échapper l'année dernière face au FC Mazembe. La science permanente de l'offensive et du spectacle L'EST — version Maâloul — offre une palette d'expression élargie à une équipe guidée par le souci permanent de l'offensive et du spectacle. Elle fonde l'intégralité de ses qualités individuelles dans un jeu qui s'enrichit constamment des expériences nouvelles. Ainsi peut-on affirmer que M'sakni s'est bonifié au contact de Darragi qui s'est lui-même amélioré grâce à la présence du trio Korbi-Bouazzi-Traoui, qui s'est épanoui au sein de cette «Espérance cosmopolite». Cette équipe «sang et or» — on l'a vu lors de ses matches en Ligue des champions — a une inspiration profonde, des accélérations intuitives, des enchaînements et des réactions parfaitement dosées. L'EST a une peau de requin et le sens du courant qui porte. Certains oiseaux de mauvais augure estiment que N'djeng est la star de trop qui ne saura s'adapter au tempo ambiant et déséquilibrera l'ensemble en dépit de ses quatre buts face au MCA (3 buts) et Al Ahly (1 but). Mais le pire n'est jamais certain, surtout pour cette Espérance qui rejoint le mieux l'idée généreuse que l'on se fait de la culture et de la tradition du football instigateur d'une renaissance générale vers le jeu d'attaque. La demi-finale face à Al Hilal sera une occasion pour les «Sang et Or» de consolider leur statut de prochain vainqueur de la Ligue des champions.