Par Sami ABDENNADER A l'heure où ces lignes sont écrites, les résultats définitifs des élections pour l'Assemblée constituante ne sont pas connus avec certitude. Mais qu'importe, un sentiment de fierté m'envahit. Oui, la fierté d'être Tunisien après ce qui a été vécu et constaté durant ces élections : - un taux de participation avoisinant les 80%, de quoi faire pâlir de jalousie les pays où la démocratie n'est pas un vain mot, - l'humilité, la sérénité et la patience des votant(e)s, certain(e)s même âgé(e)s, - faisant la queue devant les bureaux de vote parfois pendant plus de quatre heures, - un déroulement sans encombre malgré quelques escarmouches insuffisantes pour noircir le tableau. Le peuple, excédé par tant d'années de répression, de silence forcé, d'injustice avec le règne mafieux de la loi du plus fort, a parlé et s'est exprimé à travers des urnes non truquées. Fier de constater que même des «stagiaires» libyennes ont assisté aux élections pour apprendre et ainsi, il n'est pas exagéré de dire que notre «petit» pays vient de donner une leçon de démocratie à ses voisins, au monde musulman et aux «grands» de ce monde. Maintenant, il reste aux dirigeants du Parti Ennahdha, grand vainqueur de ces élections avec plus de 30% des voix, de se montrer à la hauteur et d'être digne de la confiance placée en eux par leurs partisans. Les défis majeurs qu'ils doivent rapidement relever sont multiples : 1- assurer une coalition homogène et stable avec les autres partis, en particulier Ettakatol qui confirme sa percée et le CPR, grande surprise de ces élections. 2- clarifier leur programme social. Le respect d'une grande frange de la population restée fidèle au Code du statut personnel, œuvre majeure de Bourguiba, paraît être essentiel. Cet acquis social doit être sauvegardé et le principe d'égalité homme-femme doit être rappelé à tout moment et appliqué à tous les niveaux. La démarcation et l'autonomie des islamistes d'Ennahdha vis-à-vis des salafistes paraissent également essentielles. 3- clarifier leur programme économique. Il y va de l'avenir des Tunisiens dont le taux de chômage actuel atteint 20% de la population active et risque de s'aggraver par le taux inacceptable des « diplômés-chômeurs ». Il y va de l'avenir économique de la Tunisie, les investisseurs potentiels étrangers observant à la loupe le déroulement de l'après-révolution. Le relèvement de ces défis pourrait rendre pérenne notre fierté et laisser entrevoir des jours meilleurs pour la Tunisie.