Ceci va se passer au théâtre Toursky, à Marseille, les 24 et 25 du mois en cours. Une rencontre insolite de deux figures emblématiques du quatrième art, Richard Martin et Michaël Lonsdale qui nous invitent à découvrir l'univers intime de la poésie au service de la religion ou de l'athéisme. Un duettisme où ces deux monstres sacrés, liés par une belle amitié, s'affrontent plutôt avec les mots de la poésie, cette «arme chargée de futur» (G.Celaya), plutôt qu'à travers les sabres et les effusions de sang. Ceci va se passer au théâtre Toursky, et cela nous regarde au plus près, étant donné le climat qui règne actuellement dans la Tunisie post-révolutionnaire. La notion de citoyenneté moderne libérée de la dictature, avec ses libertés individuelles est mise aujourd'hui à rude épreuve. Cette nouvelle création si justement intitulée Celui qui croyait au ciel, celui qui n'y croyait pas, un bel exemple, comme nous allons le voir, d'un dialogue pacifique et une belle occasion d'aller plus loin dans l'écoute et le voyage intérieur en compagnie de ces deux artistes qui nous faciliteront l'accès à l'imaginaire. Richard Martin est celui qui se présente comme ne croyant pas au ciel. Pour lui, comme pour Léo Ferré, son défunt compagnon de route, «la poésie est une clameur, une représentation de la vie telle que l'exige la morale libertaire». C'est-à-dire «inventive, passionnée, tendue entre espoir et désespoir, toujours renaissante». Le vocable d'anarchie en terre d'Islam, «faoudha», est plutôt synonyme de «destruction», alors que chez cet artiste, il est plutôt une attitude face au néant, nous clamant la justice inexistante, poussant des cris de branle-bas, criant haut et fort «non à la différence, non à l'indifférence, non à la mort prématurée». Il osera défier Dieu. Il se révoltera contre le pouvoir et contre toutes les moralités immorales. Il plaidera en se référant à ses poètes de prédilection qui l'inspirent et l'habitent en permanence : Rimbaud, Verlaine, Artaud, Aragon, «le poète a toujours raison, lui qui voit plus haut que l'horizon…», en passant, bien sûr, par Ferré, dont il se considère humblement, comme l'héritier spirituel. Michaël Lonsdale se présente comme celui qui croit au ciel. Il nous fera découvrir son panthéon de poète et plaidera en faveur de Dieu, qui est pour lui «une personne qui le fait vivre et le rend libre». Surtout, il nous évoquera pourquoi le ciel n'est pas un lieu vide de la présence de Dieu. De Saint-Augustin à Saint-François d'Assise, de Victor Hugo à Charles Péguy, en passant par Paul Claudel, pour ne citer que ceux-là, pour Michaël Lonsdale, «la poésie est ce lieu du possible qui rend l'impossible — Dieu — accessible aux moyens du beau et du langage». Et, «la poésie nous rappelle qu'il y a quelque chose en l'homme qui le renvoie à Dieu». Alors qui croire? Celui qui affirme que le poète est le chantre de la liberté, ou celui qui prétend que la poésie est l'expression de la présence de Dieu, dans le cœur de l'homme? Un spectacle qui constitue un moment magique où les mots expriment l'indicible pour le bonheur des spectateurs. Voilà comment, dans l'univers intime de la poésie, on peut encore s'affronter, sans heurt et sans malheur… Et notre ami Richard de nous annoncer par téléphone qu'il dédiera ces deux soirées à la Tunisie révolutionnaire et au Printemps arabe. Merci!