L'ambassadeur de l'Union européenne en Tunisie, M. Adrianus Koetsenruijter, s'est rendu hier au domicile de la famille du martyr Mohamed Bouazizi, où il a été accueilli par la mère et les six frères et soeurs du jeune homme qui s'est immolé le 17 décembre dernier devenant un emblème des révolutions à l'échelle du monde arabe. Vêtue sobrement, la tête recouverte d'une écharpe, Manoubia Bouazizi, émue par l'hommage posthume rendu à son fils à qui a été attribué, à lui ainsi qu'à d'autres figures de la résistance, le Prix Sakharov du printemps arabe, a relevé que le souvenir du jeune homme restera à jamais gravé dans le cœur et la mémoire des membres de sa famille. «Il ne nous a pas quittés. Nous sentons sa présence. Il nous parle. Ces derniers jours, nous avons tous rêvé de lui. Il ne quitte pas nos esprits», a affirmé la mère du martyr. M. Koetsenruijter a remis à la mère de Bouazizi l'invitation du président du Parlement européen, qui décernera le 14 décembre prochain à Strasbourg le Prix Sakharov pour la liberté de l'esprit, à Asma Mahfouz, activiste égyptienne, Ahmed Al-Zubair Ahmed Al-Sanusi, opposant libyen, Razan Zeitouneh et Ali Farzat, ainsi qu'à Mohamed Bouazizi, qui, par leur lutte pour la démocratie et la dignité, ont profondément «bouleversé le monde arabe... La révolution du jasmin en Tunisie a déclenché un mouvement sans précédent dans la plupart des pays arabes qui se sont libérés de leurs chaînes, présageant d'un avenir rayonnant pour toute la région. Mohamed Bouazizi n'est pas seulement un héros pour la Tunisie, c'est un héros pour tous les pays arabes», a indiqué l'ambassadeur de l'Union européenne. Evoquant le martyr, Manoubia Bouazizi a affirmé, une pointe d'amertume et de tristesse dans la voix, que ce dernier «était aimé et respecté des habitants de Sidi Bouzid. Que c'était un jeune homme qui avait beaucoup de qualités et qui travaillait pour nourrir sa famille». Prenant à son tour la parole, l'une des sœurs du défunt a déploré les rumeurs qui ont circulé sur eux selon lesquelles la famille aurait perçue beaucoup d'argent du gouvernement ainsi que d'institutions et d'organisations étrangères. «Nous avons dû quitter notre ville natale car nous étions harcelés par certains habitants de la zone qui pensaient que nous étions riches. Certains voulaient se servir de nous pour pouvoir obtenir certains avantages. C'est pour cela que nous sommes venus à Tunis. Il faut que tout le monde sache que nous n'avons reçu que les vingt mille dinars qui ont été octroyés à titre de dédommagement à toutes les familles de martyrs. Hormis cela, nous n'avons reçu rien d'autre». Le Prix Sakharov sera décerné le 14 décembre prochain à Strasbourg.