L'ambiance était aux émotions, jeudi soir, du côté de la salle de ciné L'Alhambra, à la projection des deux derniers films programmés dans le cadre des Journées du cinéma européen. Il s'agissait d'un documentaire tunisien et d'une fiction grecque qui n'ont pas manqué de scotcher certains spectateurs jusqu'à tard, la nuit. De l'émotion servie par le court métrage documentaire Caravane de l'Erg qui met en images l'expédition de médecins et autres volontaires de l'association des médecins de l'Erg qui se sont déplacés vers des régions du Sud tunisien pour venir en aide aux plus démunis. «Erg comme dunes de sable, comme veines, comme nerfs, comme racines... Un parallélisme qui illustre à merveille cette rencontre entre ces médecins spécialistes et ces gens qui manquent de soins et de vivres», déclare Sophie Erraïes, productrice du film. L'association, comme tant d'autres, a commencé ses actions bien avant le 14 janvier 2011, mais ce n'est qu'après qu'elle a reçu son visa. C'est la voix de Feïza Mejri qui prologue le récit de ce périple du cœur, réalisé par Hazem Berrabah. La caméra capte, pour commencer, l'arrivée de la caravane médico-humanitaire, l'installation des tentes et du matériel et, enfin, la rencontre tant attendue de ces médecins spécialistes qui, pour changer, se déplacent chez leurs patients dans le désert. L'idée à travers cette expédition, comme en témoignent certains volontaires, est de soigner les cas les plus urgents, et surtout de faire un état des lieux et de constater les conditions sanitaires et sociales et les différents besoins. Dans cette ambiance bon enfant, l'on finit vite par être confronté à la réalité crue d'une population mise à l'écart, oubliée même, de prendre conscience de certaines conditions qui font qu'un garçon de 10 ans, à cause de ses problèmes de vue, n'a jamais pu bien discerner les traits de sa maman et qui, grâce à l'aide de ces médecins, a fini par rétorquer : «Yamma nechbah fik !» (maman je te vois !), en voyant le visage maternel via ses nouvelles lunettes. «Cette caravane a été d'un grand secours pour nos concitoyens du Sud et a ouvert nos yeux sur leurs conditions de vie. On continue d'œuvrer pour qu'un jour on n'aurait plus besoin de caravanes, pour que ces gens démunis, mais ô combien dignes, aient enfin leurs droits citoyens les plus élémentaires ! », témoigne un des médecins. Rien de mieux qu'un document filmé pour réveiller les consciences politiques et citoyennes et mettre à jour les responsabilités du gouvernement. Un documentaire qui tombe à pic avec cette effervescence et ce jeu des alliances et du pouvoir qui font qu'on oublie les priorités. La soirée s'est terminée avec une très belle fiction grecque intitulée La chorale de Kharitonas, réalisée par Grigoris Karantinakis et servie par l'admirable jeu de l'acteur de renommée internationale Georges Corraface. C'est une fable amoureuse sur fond de drame-comique qui raconte le grand amour, celui de la vie ! Le récit se construit au fil du quotidien, des aspirations et des intrigues des habitants d'un petit village de province qui vivent au rythme fou du concours annuel des chorales de la région et qui refusent de se prendre au sérieux. Le film est une fraîche leçon de vie. A voir absolument.