La question des salles de cinéma revient inlassablement comme une litanie. Il faut se rendre à l'évidence, elles sont de plus en plus rares et elles se comptent sur les doigts d'une main. Il n'y a plus grand-chose à faire pour les sauvegarder, encore moins pour en construire d'autres. D'ailleurs, on ne parle plus de salles mais de lieux de projection, car le parc des salles commerciales est si restreint qu'il fait rire quand on en parle. C'est bien que l'Association tunisienne d'action pour le cinéma (ATCA) organise une table ronde autour du thème «les salles de cinéma : état des lieux et perspectives» même si on se demande à quoi servirait d'établir encore un état des lieux ? Il est là, on le voit; il est catastrophique et les perspectives sont tout au moins obscures. Avec la crise économique, qui oserait investir dans un projet culturel ? Encore moins lorsqu'il s'agit d'une salle de cinéma. Les salles existantes vivotent comme elles peuvent. Les autres ne sont plus qu'un vague souvenir pour certains nostalgiques du grand écran. Le paysage audiovisuel est désolant. Un ravalement est indispensable, car si les salles manquent c'est toutes les autres chaînes du maillon qui sont touchées. En premier lieu la distribution dont le secteur agonise. A quoi serviraient les distributeurs de films s'il n'y a pas de salles? C'en est fini pour eux. Ils doivent se convertir dans autre chose, si ce n'est déjà fait. Quant à la production de films tunisiens qui résiste tant bien que mal, quel sera son avenir sans le secteur de l'exploitation ? La situation est compliquée et la condition du monde du 7è Art n'est pas près de s'améliorer, notamment lorsque certains milieux de la société s'avèrent hostiles à ce secteur. Les cinéastes doivent pratiquer un exercice acrobatique pour produire et organiser des projections pour leurs films. Sinon à quoi servirait d'en faire s'ils ne sont pas vus. Il faut reconnaître que c'est un véritable casse-tête. Il est certain qu'ils seront projetés dans le cadre d'un festival ou lors d'une semaine à thème dans les maisons de culture ou dans des espaces moins appropriés, mais dans le cadre d'une sortie commerciale, il ne faut pas rêver... Elle est de plus en plus difficile à obtenir. Les quelques salles de cinéma restantes, comme celles d'El Manar, de la Marsa et peut-être quelques-unes de Tunis, qui respectent un tant soit peu les critères de salles de cinéma, peuvent-elles encore survivre et se préserver de la déchéance, alors que les spectateurs sont rares et que les films, quelle que soit leur envergure, ne les attirent plus. Les temps sont durs. Très durs, même!