L'initiative est française, celle du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), faire du solstice d'hiver le jour —et la nuit— du court métrage à l'image du solstice d'été dédié à la musique. Et voilà que Jour le plus Court... est lancé dans sa première édition le 21 décembre. «L'ambition de cette fête est nationale, mais sera largement ouverte sur l'Europe et sur le monde», écrit Eric Garandeau, président du CNC, dans son éditorial. La Tunisie a été de la partie, à l'instar de la Grèce, la Turquie et l' Ethiopie avec un plus court jour rallongé par une série de projections réparties entre la salle de cinéma le Colisée au Centre-Ville de Tunis et l'espace le Mad'art à Carthage. Le programme a été concocté par les soins de l'Association des cinéastes tunisiens (ACT), l'Association tunisienne pour le cinéma d'animation (Atca) et l'Institut français de Tunisie. Le message est simple : en ce jour le plus court et cette nuit la plus longue, diffusez des courts métrages partout, sur les écrans et sur les murs, annoncent les organisateurs français. Une occasion rêvée pour promouvoir le court métrage avec une grande partie dédiée au film d'animation. Un genre encore occulté sous nos cieux, car balbutiant et manquant terriblement de structures et de moyens de productions et surtout de diffusion. Des courts métrages d'animation ont été faits chaque année, des fois avec les moyens du bord, mais que valent-ils lorsqu'ils ne sont pas vus et appréciés! L' Atca est là depuis 2010 pour promouvoir ce genre en Tunisie, car oui il existe chez nous et commence à s'affirmer de plus en plus grâce à la passion de nos jeunes réalisateurs, férus d'animation. Du côté de Mad'art, à Carthage, le jour le plus court a été entamé assez tôt, à 10h00 exactement, avec une série de projections de films d'animation pour enfants. Au programme, trois productions tunisiennes : Les deux souris blanches (1992) de Zouhaier Mahjoub, L'enfant-Roi (1997) de Mohamed Hassine Grayaa et La poule de Sabaa (2011) de Rafik Omrani. L'après-midi a été consacré à un programme adulte annonçant la nuit la plus longue de l'hiver. Coma, premier film projeté, créé par Allaeddine Boutaleb en 1997 et produit par «Exit Prod», nous dépeint, dans une ambiance macabre, suggérée par une palette et une bande son sinistres, ces tangentes entre deux états, en l'occurrence celui de la mort et de la vie. Des squelettes tentant vainement de rejoindre le monde des vivants et se retrouvent vite au point de départ. L'ambiance, les couleurs et le rythme nous rappellent le film The Wall (Pink Floyd) réalisé par Alan Parker, l'animation de Gerald Scafe en particulier. L'ambouba de Nadia Rais, réalisé en 2009, est surtout un bon exercice de style et une bonne sensibilité graphique. Il s'intéresse lui aussi au temps, à un jour où le personnage principal nommé Ambouba ne doit pas rater un rendez-vous et se retrouve pris entre les filets du temps. Le public a pu aussi découvrir des productions françaises, à l'instar de l'excellente animation de Sylvain Chomet La vieille dame et les pigeons, réalisée en 1997. Une pure merveille tant au niveau du propos qu'au niveau du traitement graphique et technique. Très peu de dialogues à l'instar des autres films projetés, hormis des mimiques et une espèce de charabia linguistique. La narration est figurative et dresse la face cachée de la Ville des lumières où un gendarme con comme un pigeon, se faisant passer pour l'oiseau, survit grâce aux bontés d'une vieille dame qui ne s'avère pas vraiment innocente. En effet, cette dernière engraisse des pigeons afin de nourrir son «chat» ou plutôt la concierge de l'immeuble déguisée en chat géant. L'agent réussit, tant bien que mal, à sauver sa peau mais en y laissant des plumes... On le retrouve à la fin du film, avec des touristes américains (présents au début du film), il est redevenu maigre et se prend pour un pigeon en picorant des miettes en battant des ailes... Ludique et drôle est Le petit dragon de Bruno Collet, un fan de Bruce Lee, sans aucun doute, car il lui rend hommage avec beaucoup d'humour à travers ce court métrage. On retrouve Bruce Lee réincarné en une poupée à son effigie et qui, en 8 minutes, nous plonge dans de bien drôles de situations. Logorama, du collectif français H5, part d'une excellente idée, celle d'exploiter les différents logos que l'on croise quotidiennement et d'en faire des éléments d'animation. On retrouve, ainsi, le bonhomme de «Michelin» en policier poursuivant le clown de Mc Donald, un dangereux fugitif dans une ville de marques construite sur le modèle américain.