Il faut retenir le nom de ce nouveau classique-moderne : Najib Chakchem, 32 ans, Tozeurois, qui vit et travaille à Sidi Bou Saïd. Son itinéraire d'artiste? Il a fait son apprentissage lui-même, ébloui par la beauté des visages féminins, ceux de Botticelli et des grands maîtres du Quatro Cento, et des créateurs de mode actuels qui ne cessent de révolutionner les canons de la Beauté. Deux expositions à peine, avant celle-ci à la galerie El Borj qui le lui rend bien, mettant en valeur ses huiles sur toile de moyen et grand formats où règnent des portraits hyperréalistes de jeunes filles de toutes les couleurs, des figures emblématiques de tous les continents de la planète, au regard identique et frontal et qui ne vous quittent pas des yeux ! Du modèle au top model L'expression des visages est artificiellement composée, c'est-à-dire propre à certains éléments d'artifices voulus et arrangés (le maquillage des yeux, le rouge à lèvres, le fond de teint aux joues et aux paupières), selon l'identité recherchée. Car les femmes de Najib Chakchem possèdent chacune une nationalité spécifique : tunisienne, française, italienne, espagnole, suisse, russe, chinoise et japonaise. Elles sont parfois métissées comme la Brésilienne ou l'Argentine. La tête est droite, douce, rêveuse, ou étonnée, digne et sans gravité. Le regard est absent /présent comme dans un état de grâce ou plutôt de langueur absolue. Mais c'est le modèle — comme on parle de top model — qui affranchit cette identité ou cette mixité heureuse. En effet, au classicisme du visage d'un réalisme étonnant, ce persona, cette apparence d'un nouveau look, viennent s'ajouter la chevelure (comme une coiffe) et le vêtement qui habille le corps représenté au niveau du buste ou parfois plus bas lorsqu'il s'agit de portraits plus intimes (la mère à l'enfant ou le rêve). Et là, dans cette seconde géographie de la toile et de nouvelles plages de couleurs, c'est toute la modernité qui bat son plein : les coups de brosse aux chevelures vertes, noires ou blondes rehaussées de taches rouge-garance ainsi que d'autres à-plats de couleurs; un design de vêtements futuristes, synthétiques et phosphorescents. C'est là toute l'ingéniosité de Najib Chakchem qui maquille si bien le problème de la représentation de la femme, entre le réalisme des visages stylisés et modélisés et cette liberté de tons par ailleurs. Un travail manuel qui s'inspire du vécu de notre époque et qui le cristallise pour aboutir à des images pleines de merveilles et dont on a du mal à établir la frontière entre le réel et le virtuel. Il faut retenir, comme nous le disions, le nom de ce classique-moderne, à l'avenir prometteur.