A chaque fois que Dame nature se déchaîné, elle met les hommes à rude épreuve. Ainsi, après la neige et la vague de froid, vient le tour des inondations qui n'ont cessé de créer panique et de mettre en alerte tous les intervenants concernés. En fait, les pluies diluviennes qui se sont abattues, ces derniers jours, sur le Nord-Ouest n'ont épargné ni bétail ni habitations rurales. Cependant, la situation demeure, jusqu'à hier maîtrisable. A Medjez El Bab, rien d'alarmant n'a été signalé. Mais, il y a eu, quand même, un certain calme prudent. Dans la délégation de la place, toute une commission de lutte contre les catastrophes et d'organisation des interventions de secours est sur ses gardes, mobilisant, sur la même ligne droite, armée nationale, autorités locales, Protection civile, spécialistes agricoles et responsables du ministère de l'Equipement. Le colonel Mourad Mtiri, relevant de la Protection civile, nous a révélé que le niveau des eaux de l'oued Medjerda continue d'augmenter, atteignant, hier vers 10h du matin, 9, 34 mètres de hauteur. «Un niveau qui n'est pas qualifié de catastrophique, mais rien ne garantit cette quasi-stabilité dans les heures à venir», déclare-t-il. Dans tous les cas de figure, reprend-il, toute l'équipe, avec les moyens du bord dont elle dispose, veille au grain, tout en restant vigilant afin de prévenir le danger. Point de croisement des oueds de Siliana et des flots provenant du barrage de Sidi Salem au niveau de la Medjerda, la région de Medjez El Bab a reçu des quantités d'eau énormes, ces derniers jours, ce qui a provoqué des dégâts inestimables au niveau aussi bien du cheptel que des superficies agricoles. Mais, il faut dire, selon lui, que par rapport aux inondations survenues en 2003, l'état des lieux n'est pas aussi critique. Face à la hausse du niveau des eaux, des experts relevant du ministère de l'Agriculture sont, d'ailleurs, sur le terrain, en pleine activité pour doser le trop plein. «C'est grâce aux efforts de coordination qu'on peut gérer la situation», affirme M.Mtiri. Juste à côté, l'oued Mejerda coule à flots sous un pont divisant la ville en deux, avec un débit jugé légèrement élevé. Ses crues des derniers jours ont perturbé la circulation et plongé des quartiers et agglomérations dans l'isolement. La ville semble sous le choc, craignant un nouveau débordement. Et bien que les appels à l'évacuation se répètent, résonnant fort dans les quartiers ruraux de Ben Hassine, Mtiou, Douahchia et de Waljet Mouatiss, certains habitants ont refusé de quitter leurs foyers, au grand bonheur de leur bétail. Encerclée par des rivières et des flux d'eau de partout, l'agglomération de Waljet Mouatiss, située sur une zone inondable, est livrée à son triste sort. Ridha, qui a vu son domicile submergé, ne s'est pas réfugié ailleurs. Il n'a pas voulu laisser ses animaux pour compte. D'autres ont trouvé refuge aux côtés des tombes, au cimetière de Sidi Ahmed Ben Salem, situé aux alentours. Ils réclament aux pouvoirs concernés le remplacement de leurs logements endommagés. Leurs exploitations agricoles— des dizaines d'hectares—ont été complètement dévastées. Leur bétail rescapé est encore menacé. N'empêche, beaucoup d'autres ont été hébergés dans des collèges et des écoles primaires, transformés, pour l'occasion, en des centres d'accueil. A celui de «Mongi Slim», à El Argoub, au centre-ville, une soixantaine de personnes s'y sont abritées, dans des conditions d'accueil qualifiées de corectes. Couvertures, restauration et d'autres commodités nécessaires sont suffisamment disponibles. Jalel Zeddini, accompagné de sa famille, a fui, depuis trois jours, son quartier de «Ben Hassine», devenu inhabitable. Quant à Rachida, sexagénaire issue du même quartier, elle nous a déclaré qu'on leur a promis d'être relogés, en mars 2011, dans une cité au centre-ville de Medjez El Bab, mais l'avènement de la révolution a déjà bouleversé la donne, laissant d'autres personnes squatter leurs nouveaux logements. Lamjed Jabri, adjudant à la Protection civile, est désigné responsable de ce centre d'accueil. «Il abrite 27 familles venues des quartiers sinistrés, en l'occurrence Douachia, Douar Bessioud, Waljet Mouattis et Ben Hassine. On leur a réservé 13 salles de classes, un réfectoire, deux blocs sanitaires et un magasin de produits alimentaires nécessaires», énumère-t-il. Il est déjà 13h, le ciel bleu est sur le point de devenir grisâtre. Et quelques nuages se profilent à l'horizon. Nous prenons la route vers El Battane, du gouvernorat de la Manouba. Là-bas, la coordination était aussi le maître mot. Une autre commission de suivi de la situation est en conclave au sein de la délégation. «Le niveau des eaux s'élève à 6,7 mètres. Il est en constante progression», signale M. Khaled Dhouadi, délégué de la région. Selon lui, si le volume des eaux augmente encore plus, la cité d'El Babbassat, où logent 26 familles, risque d'être isolée. La même cité, qui avait été inondée en novembre dernier, a-t-il ajouté Et de faire remarquer que les prévisions tablent, jusqu'à l'après-midi d'hier, sur une hausse remarquable du niveau des eaux. Par ailleurs, des habitants de la région se sont massés sur le pont menant à Tebourba, sous lequel coule l'oued de Mejerda. Comme s'ils étaient en train de guetter le risque attendu. A Mateur, la situation semble être rétablie. Les quartiers d'Essadaka, Erraja, AFH, qui ont connu d'importants dégâts depuis mercredi dernier, ont poussé un ouf de soulagement. Sauf que le lycée de «la route de Tabarka» a vu sa cour totalement inondée, de façon que l'accès aux salles de cours est devenu impossible. Directeur et enseignants ont lancé un appel d'urgence, mais en vain. «Aucune intervention n'a été enregistrée, jusqu'à l'engagement, hier, d'une équipe de l'ONAS qui a pris la responsabilité de pomper les eaux stagnantes», signale M. Zouhaier Mezzi, directeur du lycée. Les cours ont été suspendus et les élèves n'ont cessé de s'interroger sur le devenir des examens. Ces derniers, qui devraient, commencer, à partir d'aujourd'hui, seraient-ils reportés à une date ultérieure?