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Les veilles, éducative et pédagogique, support d'une réflexion prospective pour une éducation durable
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 03 - 04 - 2012


Par Souad KAMOUN-CHOUK*
D'après l'appel à contribution adressé via le site edunet.tn, aux spécialistes et chercheurs concernés par la question de l'éducation, la conférence nationale organisée par le ministère de l'Education nationale, les 29, 30 et 31 mars 2012, s'est fixée comme objectif de répondre aux «ambitions légitimes d'un peuple désireux de fonder une école à la mesure de ses attentes. Une école publique qui soit un vecteur de mutation démocratique, un lieu d'acquisition-appropriation des connaissances, des compétences et des valeurs ainsi qu'un espace de socialisation où s'exerce une citoyenneté confrontée au défi d'un progrès social global et équitable». La réflexion engagée devrait, selon cet appel à contribution, déboucher sur «une feuille de route susceptible d'ouvrir la voie à une réforme profonde, en harmonie avec les réformes entreprises dans les autres domaines et surtout en accord avec les objectifs de la Révolution». Pour y parvenir, une démarche en trois temps a été préconisée :
1. Un état des lieux.
2. Une évaluation des différentes réformes éducatives en Tunisie.
3. Un examen des expériences les plus réussies dans le monde.
La feuille de route, objet de cette conférence, devrait définir la stratégie à adopter selon qu'il s'agira de «réhabilitation» ou de «refondation» du système éducatif. La lecture de cet appel à contribution m'a interpellée d'abord en tant que citoyenne ensuite en tant que chercheure en management stratégique, et enfin en tant qu'enseignante universitaire depuis plus de 25 ans. Ma contribution à ce débat se situera par conséquent à ces trois niveaux, et se fixe comme objectif l'utilité sociale de la réflexion.
En tant que citoyenne, ma conception de l'éducation répond à une définition large de ce concept décrit par Reboul, O. (1989) comme «l'ensemble des processus et des procédés qui permettent à tout enfant humain d'accéder progressivement à la culture, l'accès à la culture étant ce qui distingue l'homme de l'animal ». Face à cette définition, nous sommes en droit de nous interroger s'il ne faut pas pour chaque culture l'éducation qui permet de s'y épanouir et pour chaque Constitution, l'éducation permettant de former le citoyen adapté à la cité. Aristote précise, à ce propos et à juste tire d'ailleurs, qu'on ne conçoit pas un système éducatif ex-nihilo mais à partir d'une réalité contextuelle régie par une Constitution correspondant à une forme de gouvernance adaptée. A chaque société, à chaque forme de gouvernement correspond, selon Aristote, un système d'éducation particulier. Il y a un système d'éducation qui correspond à la démocratie, un autre qui convient à l'oligarchie (Politique, Livre V, 9, 1310 a 18.). La théorie de l'éducation d'Aristote, nous dit que ce n'est que par l'éducation que l'homme s'accomplit entièrement, et qu'il apprend le métier d'homme, (Politique, VIII, 17, 1337 a 2). La réussite de la transition démocratique en Tunisie serait alors entre les mains des responsables de l'éducation. Le projet de reforme, lancé par le ministère de l'Education nationale tunisien ne doit, par conséquent, pas avoir la durée de vie du gouvernement qui en est l'instigateur ni s'inscrire dans une réforme à effets immédiats. Ce que j'attends en tant que citoyenne tunisienne, c'est un réel débat national qui laisse libre cours à la créativité et au rêve éveillé, qui puisse permettre d'imaginer la Tunisie dans le monde dans un siècle ainsi que le modèle éducatif capable de préparer un citoyen en harmonie avec ce contexte futur. La réflexion doit sortir de l'étau des intérêts de clocher, générateurs d'aveuglement et de myopie. Elle doit avoir une orientation prospective, qui s'inscrit dans le long terme car la construction d'un citoyen ne peut supporter un horizon court. Les spécialistes des métiers de l'éducation ont besoin de s'ouvrir davantage sur des disciplines autres que la didactique ou la psychologie et la sociologie de l'éducation, comme l'économie de l'éducation, ou encore le management des systèmes d'information auquel se rattacherait la veille sous sa facette éducative comme démarche de prévention, une forme nouvelle de travail collégial qui repose sur le croisement des logiques institutionnelles et professionnelles et sous sa facette pédagogique supportant les intervenants de l'éducation en matière de ressources didactiques disponibles et de pratiques pédagogiques innovantes.
En tant que chercheure en management stratégique, je proposerai d'orienter la réflexion vers la prospective qui se propose de répondre spécifiquement au besoin de planification à long terme. La démarche qui transparaît de l'appel à contribution du ministère de l'Education, nous semble correspondre plutôt à l'esprit de la planification traditionnelle qui est essentiellement projective. Elle a tendance à s'appuyer sur l'état des lieux, pour aboutir a posteriori à la détermination des buts, dont l'horizon temporel est habituellement rapproché. La prospective, elle, se base sur une réflexion sur les fins et les objectifs lointains d'un système : quel citoyen tunisien à l'horizon 2050 par exemple. A partir de ce projet futur, seront graduellement déclinées les stratégies à adopter sur la base des scénarios et futuribles co-construits dans le cadre d'une réflexion collective et multidisciplinaire. Le passage à la réflexion prospective implique nécessairement la mise en place d'un dispositif d'évaluation continue favorisant l'institutionnalisation de nouvelles configurations de négociation «plus horizontales» et donnant lieu à une forme de gouvernance territoriale à l'écoute des préoccupations de tous les citoyens vivant sur le territoire national. Cette veille éducative devrait permettre de changer la perception de l'évaluation comme un jugement de valeur. Cette perception a longtemps généré un flou qui entoure souvent des objectifs surdimensionnés voire trop généreux pour permettre une évaluation de leur degré d'atteinte et des écarts prévus/ réalisés. L' «Ecole de demain», l'«école pour tous » en constituent quelques exemples connus aussi bien en Tunisie qu'en France dont nous continuons malheureusement à transposer les modèles et ce, malgré les limites qui leur sont attribuées. La prospective, l'évaluation continue et la veille éducative constituent des outils efficaces pour aider les décideurs à découvrir autre chose que la réforme et à innover hors des sentiers battus en explorant des alternatives plus actuelles.
En tant qu'enseignante, je m'attacherais ici à traiter de la dimension pédagogique de l'apprentissage dans le contexte de la société du savoir structurée autour des technologies de l'information et de la communication. L'enseignement présentiel ne peut continuer à ignorer l'effet des TIC sur la classe, et la pédagogie d'enseignement. Le citoyen que nous voulons construire à l'horizon 2030 ou 2050 exige des politiques d'éducation, plus qu'une réforme. A cet effet, un nouveau besoin doit être satisfait celui d'une veille pédagogique qui se propose de :
• Informer les intervenants de l'éducation sur les ressources didactiques disponibles et les pratiques pédagogiques innovantes en matière de TIC;
• Appuyer les acteurs de l'enseignement dans leur démarche d'appropriation pédagogique des TIC par le développement d'habiletés telles que la recherche efficace de ressources disciplinaires, voire la création de scénarios pédagogiques intégrant les TIC;
• Traquer, traiter, partager et capitaliser l'information pour une meilleure gestion des connaissances.
La mise à la disposition des acteurs du système éducatif et des parties prenantes des informations issues de la veille (éducative et pédagogique) constituerait (sous des conditions de pérennisation) un excellent palliatif aux discontinuités des statistiques et ruptures fréquentes dans le processus de recherche en éducation qui ont longtemps handicapé le processus d'évaluation comme avatar de la planification. C'est aussi le garant pour une éducation durable qui intègre le numérique dans un processus d'apprentissage tout au long de la vie donnant au futur citoyen des capacités et aptitudes lui permettant de suivre le rythme des ruptures de plus en plus fréquentes et d'avoir accès à l'employabilité.
Conclusion
La feuille de route d'un système éducatif tunisien futur doit nourrir la réflexion en cours dans le cadre du projet de Constitution. Pour cela elle devrait aller au-delà des rafistolages réformistes qui ont du mal à questionner l'existant en provoquant la désaffection pour un savoir devenu avant tout utilitaire pour les uns (les diplômes) et marginalisant pour beaucoup d'autres (décrochage scolaire), et en venant à bout de l'impuissance institutionnelle qui se manifeste, notamment, face au développement du secteur lucratif des cours particuliers et aux signaux d'alerte détectables dans les environnements d'apprentissage, dont la violence qui a tendance à devenir le moyen d'expression favori des élèves. Synonyme d'incohérence, d'impuissance et de contradiction, la réforme risque de décevoir la jeunesse qui continue à lancer des signaux forts exprimant son désespoir et revendiquant une innovation cohérente avec l'esprit de la révolution, une innovation créatrice d'un avenir prometteur et destructrice d'un passé pleins de promesses non tenues. Ces jeunes ont longtemps souffert (et continuent à souffrir) de l'incohérence qui se manifeste à travers une représentation ambivalente de l'école, tantôt perçue comme un lieu idéal pour améliorer sa situation sociale et celle de toute la famille et tantôt comme un espace en décalage par rapport à l'environnement économique où l'on continue à user de méthodes traditionnelles qui ont atteint leurs limites. Les contradictions structurelles apparaissent dès le primaire, où nous assistons à l'émergence d'écoles pour les riches et d'autres pour les pauvres. La sélection atteint son paroxysme au collège qui est sensé assurer «à tous» un tronc commun de connaissances. C'est à ce niveau que la déperdition scolaire commence à s'aggraver et que les jeunes découvrent que «l'égalité des chances» n'est en réalité qu'un leurre. Cet espace d'apprentissage, qui intervient à une étape délicate de la vie d'un citoyen en devenir, se transforme ainsi, en dispositif reproducteur de la hiérarchie sociale et de l'inégalité entre les milieux citadins et ruraux, pauvres et nantis, prolétaires et bourgeois etc. balayant cette image de l'école comme «ascenseur social» tant mise en avant par les deux régimes précédents.
Certes ces problématiques sont prioritaires, mais il faut garder en tête qu'elles ne nous sont pas spécifiques non plus dès lors que nous appartenons à la société du savoir et à la culture informationnelle. L'accomplissement de l'homo numerus tunisien, nécessite un projet d'éducation durable, répondant aux exigences et spécificités de la culture informationnelle et garantissant l'égalité des chances et le droit à l'apprentissage tout au long de la vie du citoyen territorialisé sur le sol tunisien et régi par une Constitution en symbiose avec ce projet.
NB/ Les idées contenues dans cet article sont extraites d'un document de 16 pages soumis à M. le ministre de l'Education en réponse à l'appel à contribution lancé sur le site edunet.tn et en guise de participation au débat national autour du futur système éducatif tunisien.
*(Universitaire)


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