«Il n'y a presque pas de public à 9h00 du matin. Et c'est normal», nous confie le présentateur de la semaine du film iranien qui se déroule depuis lundi dernier et qui se poursuivra jusqu'à dimanche. Pourtant, ouvrir sa journée par un film iranien s'avère un pur plaisir... Dès le réveil, on replonge de nouveau dans les rêves, ceux des images et du 7e art. La salle sombre du cinéma Ibn-Rachiq paraît comme un lieu détaché du monde bouillonnant qui l'entoure. Le voyage matinal, de ce mercredi-là (25 avril), a commencé avec Hayet, un concentré d'émotion, de tendresse et de beauté... La caméra de Gholem Rida Ramdhani a suivi une course de quelques heures, qui paraît interminable. Une adolescente d'un village du nord de l'Iran doit passer un test de compétence qui lui permettrait une scolarisation plus poussée. Le jour de l'examen, son père tombe gravement malade. Affolée, la mère lui confie sa sœur encore bébé et son petit frère... Un challenge s'installe ! Dans cette journée décisive, chaque seconde compte. Hayet, le visage crispé, se démène maladroitement avec la vache pour donner du lait au bébé. Elle court ensuite dans les ruelles du village à la recherche de quelqu'un qui pourrait surveiller la petite sœur... Personne n'est disponible... En quelques images, on raconte tout le village. Les mentalités sont mises à nu, à travers des bribes de mots et des regards distraits. Le conservatisme s'oppose à la modernité, sans conflit ni violence... Le silence est percé par les pleurs et les cris de la fillette. Au fil des minutes, la tension monte... A la course à pied s'ajoute un bouillonnement d'esprit incontrôlable. Hayet use de ses connaissances pour trouver une issue aux entraves... Elle réfléchit en fredonnant des théories physiques... Ce personnage rassemble en lui autant de frustration que d'espoir. Il est tout à la fois, reflétant le passé et l'avenir. Il incarne les tensions, le savoir, le malheur et la joie d'une jeunesse en soif de vivre. Hayet se brise les doigts en essayant de tirer la vache et de la faire manger. Elle crie de douleur quand le bébé se trouve cloîtré, seul dans une chambre fermée au cadenas dont la clé est tombée au fond d'un puits... Elle est prise en otage par une voisine qui vient pour lui acheter du lait et pour lui rappeler, en l'insultant, que la place de la femme n'est pas à l'école... La jeune fille ne baisse, pour autant, pas les bras. Grâce à une volonté de fer, elle relève tous ces défis et trouve, seule, le moyen de démêler ces pétrins et d'aller au bout de son rêve. Le film s'arrête sur une phrase: «Oui, j'ai réussi». Elle a gagné un concours de survie.