L'un des paradoxes du foot tunisien veut qu'un comité provisoire de la Ligue «pro» soit aux affaires au moment, à coup sûr, le plus délicat de la vie de la compétition Montée de la violence, de l'intolérance et de la casse transformant certaines enceintes en véritables traquenards (à Gabès, à Gafsa...); durcissement de la contestation de la part des clubs qui menacent désormais au quart de tour de démissionner, pour un oui ou pour un non; des affaires d'évocation et de réserve très délicates à traiter dans un contexte où les nerfs sont à fleur de peau et où les réactions épidermiques font florès... Franchement, personne ne voudrait être à la place du bureau provisoire de la Lnfp, installé depuis voilà deux mois, suite à la vague de démissions qui a décapité l'équipe de Mohamed Sellami. Le mandat intérimaire se révèle parfaitement tortueux et tourmenté, d'autant qu'il y a en amont méprise sur les pérogatives réelles de cette instance dont on mesure toujours mal le statut de pivot et la fonction de cheville ouvrière par rapport à la compétition-reine, le championnat des Ligues 1 et 2 passé depuis une quinzaine d'années au régime professionnel ou plutôt à un ersatz de professionnalisme difficile à définir et que certains n'hésitent pas à baptiser «professionnalisme à la tunisienne». Périlleux monopole Depuis la nuit des temps et la naissance de la Lnfp, ce genre de discours récurrent était martelé par plusieurs intervenants dans la vie du sport-roi pour rappeler la fédération au nécessaire partage des pouvoirs. A la FTF, la définition des axes stratégiques et des moyens de leur application (équipes nationales, formation des jeunes, recyclage et formation des cadres, encadrement d'un régime pro hautement exigeant en termes financiers, notamment). Pour ce qui est aspect compétitions, on concédait tout au plus à la «Fédé» le soin d'organiser la Coupe de Tunisie. A la Lnfp, donc, tout ce qui se rapporte au championnat et à la mise en place et accompagnement de sa lourde mécanique organisation, arbitres, sanctions disciplinaires... Un partage des rôles qui, chemin faisant, gagne en fluidité, les mécanismes se mettant progressivement en place. Un new-deal, en quelque sorte. Du neuf avec du vieux? Les élections de la Lnfp ont déjà commencé depuis la dissolution du bureau de Sellami. Elles avaient même ouvert les enchères dès le départ de l'exécutif fédéral présidé par Anouar Haddad. Car, on retrouve certains responsables recyclés, guère gavés et qui espèrent rebondir grâce à ce tremplin, à ce promontoire idéal. Qu'un tel ou un tel se porte candidat pour trouver grâce aux yeux des électeurs, alors qu'il a largement fait le tour du sujet. Que Hédi Lahouar soit repris par la nostalgie de sa chère ligue qu'il présida par le passé, à partir du moment où il perdit la course au bureau fédéral; que Radhi Slim consomme la dissolution de l'ancien staff de la Lnfp en démissionnant, tout en prévenant le jour même qu'il était partant pour la campagne électorale pour cette même ligue; que Mohamed Sellami reparte à l'assaut, ou pas, il y a en vérité un tout autre impératif, bien d'autres urgences. Ceux du renouvellement des cadres porteurs de nouvelles idées et d'un sang neuf. Pour espérer une dynamique porteuse de promesses, comme partout ailleurs, il faut au préalable répondre à cette simple question : peut-on faire du neuf avec du vieux?