Par Abdelhamid Gmati Les observateurs, tunisiens et étrangers, se sont focalisés sur ce qu'on a appelé « une crise interne sans précédent». Une crise déclenchée par l'extradition de l'ex-Premier ministre libyen. Cet acte, dénoncé par les uns, défendu par le gouvernement et les partis au pouvoir, n'est pas contesté dans le fond : nul ne défend Baghdadi Mahmoudi accusé d'actes criminels dans son pays, et nul ne remet en question le droit des Libyens de lui demander des comptes; mais c'est la manière qui a suscité l'indignation. Certes, on a épilogué sur la légalité d'une telle décision, sur son opportunité, sur les garanties prévues par le droit international, sur la capacité de la justice libyenne de garantir un procès équitable etc. L'extradition, décidée et exécutée par le gouvernement, s'est faite en catimini, à l'insu de tous, y compris du président de la République qui s'est insurgé contre « une atteinte aux compétences du président ». De fait, selon la «petite Constitution», la Présidence de la République ne dispose d'aucun pouvoir significatif, à part celui de recevoir les accréditations des diplomates étrangers. M. Marzouki aurait dû y faire attention avant de se faire octroyer ce poste. L'affaire devait donc être tranchée par la Constituante mais là aussi les divergences et les intérêts partisans ont ajouté à la confusion. On va même présenter une motion de censure du gouvernement. L'intérêt de la Tunisie passe au second plan et on n'a pas tenu compte du préjudice porté au pays : sur le plan interne, le bras de fer entre le gouvernement et la Présidence de la République relève du folklore et porte atteinte à leur crédibilité ; sur le plan international, la Tunisie passe pour ne pas respecter les lois internationales et certains organes de presse qualifient notre président de « Tartour ». C'est dire que notre prestige en prend un coup. De plus, on s'est interrogé sur les motifs du gouvernement et on l'a accusé d'avoir marchandé cette extradition. Démenti du gouvernement, mais, le même jour de l'extradition, un ministre libyen a annoncé que la Libye fera un don à la Tunisie de 1,2 million de barils de pétrole. Il y aurait en plus un prêt avec des conditions favorables. D'autre part, on apprend qu'il y a quelques jours une réunion a eu lieu entre un responsable d'Ennahdha et un émissaire libyen en présence de l'avocat de Baghdadi Mahmoudi. Un accord aurait été conclu. En catimini. Et alors que tous les regards sont tournés vers cette affaire, le gouvernement prend une décision, présentée en toute discrétion, consistant à permettre, à partir du 1er juillet, aux ressortissants des pays du Maghreb : - D'entrer en Tunisie sans visa ni passeport (juste une carte d'identité) - D'effectuer des séjours de longue durée ou de résider d'une manière permanente en Tunisie sans aucun document, - D'accéder au marché de l'emploi sans autorisation préalable, - De participer aux élections municipales. Tout cela sans aucune réciprocité. La Tunisie sera donc ouverte à toutes sortes de délinquants, terroristes, etc. Notre armée nationale et les forces de l'ordre qui veillent à la sécurité du pays et à la préservation de nos frontières de toutes sortes de trafics vont certainement apprécier une telle décision. Après la levée des visas pour les ressortissants du Qatar et d'autres pays du Golfe, la Tunisie devient une «terre ouverte». Entre-temps, et toujours en catimini, on projette d'exclure des milliers de Tunisiens (ex-Rcdistes) de la vie politique, on empêche arbitrairement des hommes d'affaires de voyager, on s'en prend, toujours arbitrairement, à des magistrats, on maintient en prison des hommes politiques et d'ex-responsables depuis des mois, sans procès ni décisions de justice, on remet en liberté des salafistes et autres délinquants pourtant pris en flagrant délit, on porte des accusations à tort et à travers, etc. La dernière est celle du ministre Mohamed Abbou, qui porte plainte contre un vice-gouverneur de la Banque centrale, alors qu'il n'était même pas en poste...Il a fini par reconnaître son erreur, mais le mal était fait. Alors qu'on nous parle de démocratie, d'attachement aux libertés, et qu'on prétend pratiquer la transparence, un tas de choses se passent en douce, en catimini.