Produire de bons joueurs, on sait faire, et on saura encore le faire demain. En revanche, on ne sait pas produire l'homme que va devenir le joueur... Un peu partout, des équipes cherchent aujourd'hui a déployer un jeu attractif . EST, ESS, CA, CSS, pour n'en citer que quatre parmi les plus huppées, mais aussi et surtout le CAB pour évoquer un autre candidat à l'audace réhabilitée. Mais reste constamment sous-jacente chez la plupart, la tentation de négliger la vraie respiration du football, que ce soit sur le plan tactique, individuel ou mental. Ce qui paraît encore plus certain, c'est que certains joueurs respirent le football et que leurs entraîneurs n'y sont pour rien, que d'autres ont un fort pouvoir d'attraction et que leurs entraîneurs n'ont d'autres choix que de les accompagner. Inutile d'imaginer que Maâloul, par exemple, et avec tout son savoir-faire, qui est immense, aurait appris à Msakni l'art et la manière de placer le ballon dans la lucarne. Ce sont les joueurs doués qui améliorent le football. Pour offrir un jeu spectaculaire, le changement doit passer d'abord par les joueurs, par davantage de responsabilisation et d'engagement de leur part vis-à-vis de leurs performances et de leur métier. Car le jeu de demain, c'est un jeu offensif fait de surprises, de risques et de sacrifices. Donner du plaisir au public, se dépouiller sur un terrain, c'est fortement recommandé. En termes de dépassement de soi, d'effort et le sacrifice, tout doit y être. Le berceau d'un nouveau rapport de force On ne cessera jamais de le répéter: au haut niveau, il faut l'aptitude, c'est-à-dire la qualité, le talent, mais aussi l'attitude. Dans la compétition nationale, on ne voit que très rarement tout cela, la qualité et l'intensité du spectacle en souffrent. Et après, on s'étonne que dans les épreuves africaines, il y a un fossé entre nous et les autres à partir d'un certain seuil. Mais la responsabilité des entraîneurs existe aussi. Compte tenu de l'évolution et des exigences du jeu, un nouveau style de management s'impose. La génération d'aujourd'hui n'est pas une génération à laquelle on impose des choses. Elle demande toujours pourquoi, elle conteste naturellement l'autorité, elle n'a pas la même qualité de concentration que ses devancières, ni la même forme d'intérêt au plan professionnel. Autrement dit, l'entraîneur doit être capable de mettre moins de distance, de chambrer le joueur, de le dérider en trouvant les bons mots...Il doit être à la fois dur et souple, ferme et ouvert, et s'il n'intègre pas cette notion d'accessibilité, d'écoute ou d'humanisme, ça ne fonctionne plus. En même temps, si son autorité n'est pas accompagnée de crédibilité, de conviction, mais aussi de chaleur, de bonheur à jouer et à travailler au quotidien, les joueurs ne suivent pas. Chez nous, on a trop formé des entraîneurs qui sont sérieux et qui font la gueule, c'est une erreur. On pense que c'est une faiblesse d'être sympa. Après, allez demander aux joueurs de jouer pour un entraîneur et d'aller au feu quand celui-ci fait une tête d'enterrement à longueur des matches, sur le banc ou dans les entraînements. La relation entraîneur-joueur est un sujet qui devrait avoir la préoccupation de la DTN. C'est essentiellement l'une des lacunes actuelles de notre formation. Produire de bons joueurs, on sait faire, et on saura encore faire demain. En revanche, on ne sait pas produire l'homme que va devenir le joueur...La génération d'aujourd'hui manque de qualité et d'énergie mentales, et en termes de contrôle de soi et de maîtrise des événements, nous sommes encore loin. C'est une sorte de «constat culturel» qui va du geste technique parfois déficient à la psychologie défaillante, en passant par d'autres faiblesses congénitales. Nous souscrivons à des remarques fondées sur une observation objective de la réalité. Elles s'inscrivent malheureusement dans une histoire ancienne et une réflexion éternellement renouvelée.