On ne s'élève pas contre les sommes d'argent faramineuses réservées aux transferts de joueurs. Mais on déplore tous les abus qui font que le football est devenu un produit de consommation en premier lieu. Le football était un jeu, il est devenu une industrie. Il était un sport, il est devenu un produit. Au départ, il n'était qu'un simple loisir, un moyen de divertir et de rassembler les hommes. Il ne représentait point l'activité professionnelle et économique qu'il est devenu au fil des dernières décennies. S'il a toujours été un sport populaire, il draine aujourd'hui de nombreux intérêts et déborde très largement du seul cadre du terrain. En effet, il est désormais question de marketing, de communication, d'argent, d'agents, et toute une population nouvelle est venue se greffer à lui. Ainsi va le football professionnel, à l'abri dans sa bulle, mais toujours aussi exposé aux débordements de tout genre. Le temps est venu où quand on pense au transfert de joueurs, on n'hésite pas à débloquer des sommes faramineuses. Cela ne concerne pas uniquement les grandes stars, ou les joueurs d'exception, mais pratiquement tous ceux dont on aurait besoin pour renforcer l'effectif et surtout pour proclamer une certaine légitimité plus ou moins perdue. Chez nous, les présidents, qui ont le chèque facile, n'appartiennent plus aux grands clubs. On sait ce dont Slim Riahi est capable d'entreprendre pour s'octroyer les services de tel ou tel joueur, mais on n'ignore pas les raisons qui ont permis également au CAB d'accéder à la cour des grands, sur fond, bien entendu, de grands sacrifices financiers. Le bras de fer qui oppose le CA et l'EST autour des différentes opérations de recrutement est significatif. Il dépasse les normes auxquelles on était habitué. Aujourd'hui, on parle des millions de dinars que l'on croyait réservés aux marchés européens. Et on feint de s'étonner... Logiquement, les joueurs devraient en être les premiers bénéficiaires. Mais trop de personnes étrangères au football rodent autour du milieu pour leur unique profit. On ne s'élève pas, bien entendu, contre ces sommes d'argent faramineuses. Mais on déplore tous les abus qui font que le football est devenu, chez nous comme ailleurs, un produit de consommation en premier lieu. Le marché des transferts est devenu une véritable industrie, un moyen de faire circuler l'argent. Quand le fromage est aussi gros, il est normal que les «rats» soient nombreux à vouloir grignoter une part!... De quoi s'inquiéter ? Il est évident que le football «privé» (les grands clubs et leurs nouveaux dirigeants) a pris la place du football «public» (les grandes institutions). On ne donne pas cher d'un sport qui se laisserait aller au seul but de l'argent. Sur fond d'interventions et d'interpellations de tous genres, le football serait ainsi victime de pratiques qui tendent à s'uniformiser. En effet, on a de plus en plus l'impression que le système est devenu plus important que la stratégie. Les excès que l'on ne cesse de déplorer sont dus à l'extrême exposition d'une activité autour de laquelle il y a justement trop d'intervenants. Dans un souci plus que jamais affirmé, il serait aujourd'hui indispensable de mettre au clair et d'initier une réflexion autour du pouvoir réel de l'argent sur tout ce qui touche à l'évolution du football. Comment assurer la cohérence? Comment garantir l'efficacité? Comment fédérer les énergies? Autant de questions qui pourraient se situer dans une problématique plus générale: celle des tendances et des hommes, ou comment établir les contours des priorités des uns et des autres et montrer que les forces vives sont prêtes à relever les grands défis du redressement. Plus que les hommes, c'est l'ensemble d'un système fait d'enjeux et de polémiques qui est aujourd'hui inadapté à l'évolution de la relation qui devrait unir les différentes parties prenantes. Il faut trouver les solutions adaptées pour renforcer la crédibilité des uns et des autres. On aura toujours le droit d'aspirer à un football qui ne soit pas que du foot business. Alors régulons! Et mettons en œuvre correctement la spécificité sportive. Le football n'est pas et ne sera jamais une simple activité économique. Il implique des valeurs, des vertus, une culture...