Par notre envoyé spécial à Berlin Ridha MAAMRI Chaque semaine, lors des trois conférences de presse fédérales, certains membres du gouvernement fédéral sont invités à répondre directement à toutes les questions des journalistes présents parmi les quelque 900 membres de la BPK Une conférence pas comme les autres. A la Bundespresskonferenz, ce sont les journalistes qui invitent les ministres, ou leurs porte-parole, à se prononcer sur des thèmes fixés au fil de l'actualité par les représentants des médias. A 13h30 pile, heure de Berlin, chaque lundi, mercredi et vendredi, les portes de la grande salle se referment pour donner le coup d'envoi d'une heure de confrontation souvent électrique. Les caméras enregistrent tout le débat entre les journalistes à l'affût de toute information et leurs invités qui pèsent bien leurs mots. Quoi qu'il en soit, tout commence à l'heure et se termine une heure après. Au-delà de la légendaire rigueur allemande, le respect de l'horaire est plutôt pour des raisons techniques, puisque cette séance de questions-réponses est diffusée en direct par les chaînes adhérentes et suivie en temps réel par les journalistes étrangers, accrédités auprès de la BPK. En tant qu'invité, le groupe de journalistes tunisiens avait le droit d'assister sans poser de questions. Mais, avant de commencer, au moment où les journalistes se préparent, M Nicolai Fichtner, le porte-parole du bureau de la BPK et l'animateur des conférences, « Mitgliedsfragen », nous a présenté le fonctionnement de ce concept, unique en son genre, dont il n'a pas caché sa fierté. En effet, c'est une occasion en or pour les 900 journalistes accrédités pour balancer toutes leurs questions à des membres du gouvernement et leurs équipes, réunis sous le même toit, derrière un large podium. Lors de sa présentation, M. Fichtner n'a cessé d'insister: «Toutes les questions sont bonnes. Tout journaliste a le droit de poser n'importe quelle question et d'avoir une réponse claire ». En effet, les membres du gouvernement sont obligés d'assister à la conférence, ou d'envoyer un porte-parole à leur place, ainsi que de répondre à toutes les questions. De la chancelière aux ministres en passant par les membres du gouvernement, tout le monde répond présent à l'appel des journalistes. Mieux encore, « ils ne peuvent pas quitter la salle avant la fin de la séance », souligne le responsable, avec un petit sourire révélateur. A vrai dire, une heure durant, les journalistes fixent les règles du jeu. Le comble, ils ne sont pas obligés d'entendre de longs discours de langue de bois avant de poser des questions limitées à l'ordre du jour. Car, il n'y a ni ordre du jour ni allocations des invités. Droit au but, les invités répondent directement aux questions. L'une parmi les journalistes présents nous confie qu'elle est prête à répéter sa question plusieurs fois, de plusieurs façons, et que ses collègues feront de même pour obtenir une réponse. Ce concept allemand n'est pas nouveau. Il date de 1949, soit quatre ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, décidément pas l'un des meilleurs chapitres de l'histoire allemande. A cette époque, le représentant de la BPK a rappelé que la question qui se posait est : « Comment peut-on obtenir rapidement des informations aussi complètes que fiables? ». En réponse, la Bundespressekonferenz a été fondée. La volonté du premier chancelier, Konrad Adenauer, et le contexte d'un pays en reconstruction qui exigeait le regain de confiance de la population ont été déterminants pour que ce concept spécial voie le jour. Et depuis, le flambeau est passé aux journalistes qui ont tenu bon pour garder les trois rendez-vous de la semaine. L'objectif est toujours le même : organiser des conférences de presse avec les principaux représentants du monde politique, de l'économie et de la culture. Les journalistes étrangers qui travaillent en Allemagne et les Allemands qui ont travaillé à l'étranger s'accordent : il n'y a rien de comparable à la BPK ailleurs. C'est «unique au monde». Ainsi, on se demande tout bonnement si ce système fonctionne à merveille en Allemagne, pourquoi il n'a pas été adopté ailleurs ?