«Nous risquons de basculer dans une période qui n'est point favorable à l'épanouissement, non seulement de la femme, mais de la famille et du développement économique». «Les femmes chefs d'entreprise sont plus prudentes et prennent moins de risque en matière de gestion financière». Itinéraire de formation : Leyla Mabrouk Khaïat s'apprêtait, au moment où elle a été appelée à diriger l'entreprise créée par son mari (Plastiss), à entamer une recherche sur la perception de l'Islam au XVIIIe siècle. C'est dire que rien ne la prédestinait au monde des affaires. A-t-elle rencontré des difficultés? «Avec la volonté, la persévérance et la patience, on arrive à bout de toutes les difficultés», nous dira-t-elle.D'ailleurs, pense -t-elle, ces vertus seraient propres à toutes les femmes chefs d'entreprise. «J'ai consacré une bonne partie de ma vie à la promotion de l'entrepreneuriat féminin en Tunisie, d'abord, et dans le monde arabe ensuite. Pour l'instant, nous avons quelques préoccupations par rapport à la situation de la femme en général et pas seulement celle de la femme chef d'entreprise; notamment, celle de maintenir ses acquis et le Code du statut personnel qui doit être maintenu, sinon enrichi. Pour revenir sur mon parcours par rapport à l'entrepreneuriat féminin, au sein de la Chambre nationale des femmes chefs d'entreprise, nous essayons de soutenir les artisanes dans les différentes régions qui connaissent certaines difficultés dans le domaine du développement. C'est ainsi que la Cnfce a participé au dernier Salon de l'artisanat. De mon côté, et vu que l'aire de la Tunisie post-révolution encourage l'implication de la société civile qui est amenée à être présente pour contribuer au développement économique et à la participation active de la femme dans l'économie, je préside une ONG, que j'ai fondée en 2005, et qui fut pendant des années mise en veilleuse. Il s'agit de « Afrimalife » dont l'objectif est de promouvoir l'entrepreneuriat féminin et les synergies entrepreneuriales interarabes et avec le continent africain pour essayer de développer l'échange d'expériences et éventuellement le B to B, car c'est ce qui nous manque.Nous nous rendons, en effet, compte aujourd'hui, en Tunisie qu'on a une grande déficience en matière d'exportation. Nos femmes autant les artisanes, les industrielles que celles qui se consacrent à l'e-commerce ont beaucoup de talents et ont la possibilité d'exporter si les réseaux s'investissaient dans ce créneau. Nous nous apprêtons, aujourd'hui, à organiser une manifestation qui nous permettra tout d'abord de mesurer le potentiel économique des femmes du Grand Maghreb dans le développement économique de leurs pays. Les données que nous avons à ce propos ne sont pas efficientes et nous voulons creuser dans ce sens pour développer davantage et mettre en avant le travail de la femme, d'autant plus qu'aujourd'hui, nous ressentons un peu partout, et nos collègues égyptiennes expriment leurs grandes inquiétudes à ce sujet , que nous risquons de basculer dans une période qui n'est point favorable à l'épanouissement, non seulement de la femme, mais de la famille et du développement économique. Cette entreprise, je la dirige depuis 26 ans. Les problèmes rencontrés, au début, quand j'ai été appelée à diriger cette entreprise, le personnel féminin avait contesté ma présence et deux d'entre elles avaient présenté leur démission, un autre employé disait, à tort, qu'une entreprise dirigée par une femme était vouée à la faillite. En ce qui me concerne, j'ai travaillé d'arrache-pied pour prouver le contraire, d'ailleurs le groupe s'est développé. A mon avis, la spécificité de la gestion d'une entreprise par une femme réside en deux points : il s'agit, d'abord, de la sensibilité féminine qui fait qu'elle manifeste plus d'intérêt à la situation de l'ouvrier et de l'employé. Le second point concerne la prise de risque. Je pense, à cet égard, que les femmes sont plus prudentes et prennent moins de risque en matière de gestion financière».