La présidente de l'organisation «Liberté et équité», Imène Triki, a déclaré que «les disparitions forcées constituent un crime contre l'humanité et une négation de l'existence de l'individu, qui le prive de sa liberté et le place en dehors de la protection légale». Lors d'une conférence de presse tenue hier matin, à Tunis, elle a évoqué l'affaire du «vieil homme de Charles-Nicolle» en tant qu'«exemple type de disparition forcée». Les investigations menées par l'organisation à ce propos, a-t-elle précisé, ont permis de déduire que l'identité de cet homme et les circonstances de son arrestation et de son incarcération, ainsi que les conditions de son hébergement à l'hôpital et son décès «demeurent encore vagues et soulèvent toujours nombre d'interrogations». La famille de Ahmed Lazreg, disparu depuis 1986, affirme qu'il s'agit du même inconnu appelé «le vieil homme de Charles-Nicolle», a poursuivi Imène Triki. Elle a, par ailleurs, évoqué «les restrictions et les campagnes de dénigrement» qui visent son organisation, accusant des «parties agissant dans l'ombre» d'être derrière ces accusations «afin d'empêcher l'organisation de parvenir à la vérité et de mettre à nu les affaires de disparitions qu'elle suit ainsi que les cas de torture qui, a-t-elle affirmé, «se sont poursuivis, même après la révolution». Elle a également parlé de la stagnation de l'instruction sur plusieurs affaires, à l'instar de l'attaque de l'ambassade américaine à Tunis, des évènements de Siliana et de l'assassinat de Chokri Belaïd, précisant que «des arrestations et des relaxations se font en masse, et au cours desquelles la torture et les atteintes aux droits élémentaires sont monnaie courante». Imène Triki a, par ailleurs, appelé à la mise en œuvre des conventions internationales en matière de disparitions forcées et à l'ouverture des dossiers y afférents, notant à cet égard que l'organisation «Liberté et équité» œuvre, en collaboration avec des organisations mondiales, à l'internationalisation de l'affaire des disparitions forcées, et à la constitution d'une commission d'enquête internationale, en vue de mener les investigations à ce sujet, notamment en ce qui concerne l'affaire de Ahmed Lazreg, outre un ensemble d'autres dossiers dont celui de l'assassinat de Chokri Belaïd. Pour sa part, Emna Kallali, directrice du bureau de «Human Rights Watch» à Tunis, est intervenue durant cette conférence de presse pour rappeler que la Tunisie avait ratifié la convention internationale sur les disparitions forcées, en juin 2011. Cette convention, a-t-elle précisé, garantit une excellente protection contre ce type de crime «qui résume en soi de nombreux autres», et offre la possibilité d'ouvrir une enquête même à propos des Tunisiens disparus à l'étranger. Une «disparition forcée» consiste, selon Imène Triki, à «arrêter un individu, à l'incarcérer ou à le kidnapper et à le priver de sa liberté par le biais de fonctionnaires relevant des divers services du gouvernement, ou par l'entremise de groupes organisés et d'individus opérant au nom du gouvernement ou avec sa bénédiction directe ou indirecte».