« De Palma, Cronenberg, Verhoeren ou Polanski ont, désormais, un point commun : leur producteur Saïd Ben Saïd ». Tel est le surtitre de l'entretien de six pages intitulé « Side by Side » que consacre la bible des cinéastes, «Les Cahiers du cinéma » au producteur tunisien Saïd Ben Saïd. En Tunisie, on connaît peu Saïd Ben Saïd. Homme discret, travailleur acharné, il y revient pourtant régulièrement pour des vacances en famille. Et ses films, toujours de grande qualité, souvent élitistes, sont rarement sur nos écrans. Aussi, avons-nous souhaité, à l'occasion de cet hommage qui lui est rendu dans cette revue mythique du cinéma, évoquer son parcours. Saïd Ben Saïd, c'est d'abord une impressionnante filmographie : «Loin», d'André Téchiné, «Tais-toi», de Francis Weber, «Les Dalton » de Philippe Haïm, «Le héros de la famille», de Thierry Klifa, « Le grand alibi » de Pascal Bonitzer, «Chicas», de Yasmina Reza, « Crime d'amour» d'Alain Corneau, «Carnage » de Roman Polanski, «Cherchez Hortense», de Pascal Bonitzer, «Passion», de Brian de Palma, pour n'en citer que quelques-uns. Avec des constantes, des metteurs en scène qui reviennent souvent comme Téchiné, Bonitzer. C'est également un parcours atypique puisque ce jeune homme studieux commença de brillantes études d'ingénieur, dirigea des chantiers de travaux publics, et, par on ne sait quel chemin de traverse, se retrouva à M6 où UGC est venu le débaucher. Durant une quinzaine d'années, chez UGC, il put, assez librement, exercer son métier de producteur, affûter ses choix, définir ses priorités, avant de se lancer sans filet, et de créer SBS, sa propre maison de production. De lui, les auteurs de l'article, Stéphane Delorme et Jean-Philippe Tessé, déclarent dans l'entretien qui lui est consacré : « Il est celui qui fait preuve, aujourd'hui, de l'ambition la plus singulière dans le paysage de la production française. A parcourir la filmographie de sa jeune société, SBS Production, on sent poindre un geste très fort : aller chercher un par un, s'il le faut, les grands cinéastes qui ne trouvent plus leur place dans le système. Cela fait de SBS une nouvelle place forte, et de son fondateur un des rares producteurs dont on se demande avec impatience : et maintenant, que va-t-il faire ? La réponse à la question est simple : ce qu'il aime, c'est-à-dire du cinéma d'auteur. Parce que, pour lui, être producteur, c'est d'abord être spectateur, et on ne peut faire ce métier que si l'on aime vraiment le cinéma. Et si chez UGC, il travaillait selon une logique d'alternance, produisant Téchiné après un Dalton, il souhaite à présent aller chercher de grands cinéastes qui ont des problèmes de financement. « Bien sûr, il faut être à l'écoute du marché, mais je considère que mon métier consiste à produire des films que les gens ne veulent pas voir ». Deux films pour cette seule année 2013 pour Saïd Ben Saïd : «Un château en Italie», avec Valeria Bruni- Tedeschi, et «La jalousie» avec Philippe Garrel. Et trois projets américains pour ce producteur tunisien qui regarde de plus en plus de l'autre côté de l'Atlantique avec des géants comme Cronenberg et Peter Weir qui refusait récemment huit millions de dollars pour faire Ben Hur.