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Mustapha Ben Letaief, juriste : «Le vide juridique profite aux détracteurs d'une presse indépendante»
Journée Mondiale de la Liberté de la Presse
Publié dans La Presse de Tunisie le 03 - 05 - 2013

Professeur de droit à la faculté des Sciences juridiques d'Al Manar, Mustapha Ben Letaief a commencé à travailler sur les médias au lendemain de la révolution. Il est l'un des artisans des décrets-lois réglementant le secteur de l'information et de la communication dont il a accompagné la genèse et tente d'expliquer le blocage actuel.
En quoi, à votre avis, les décrets-lois 115 et 116 consolident-ils la liberté d'expression et d'information ?
Tout simplement parce que nous sommes partis du principe que dans un système démocratique, la liberté dans le domaine de l'information et de la communication est la règle et sa limitation l'exception, étroitement circonscrite. Certes, nous vivions dans un contexte post-révolutionnaire particulier. Après des décennies de consignes et d'instructions dictées aux médias par le pouvoir politique, les voilà libres. Or des dérapages s'étaient multipliés partout, de la presse électronique à l'audiovisuel: on se rappelle encore ce fameux appel à l'assassinat de l'ex-Premier ministre Mohamed Ghannouchi lancé sur la chaîne nationale en février 2011. Les médias semblaient déboussolés, à l'affut d'un nouvel équilibre. Les repères pouvaient être insufflés par une législation conforme aux standards internationaux et qui consoliderait la liberté d'information à travers des garanties institutionnelles, telles que la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle ou la Commission indépendante de l'octroi de la carte de presse. Telle est la philosophie des deux lois : plutôt qu'un ministère de l'Information qui les contrôle et les instrumentalise, les médias peuvent bien être gérés, comme dans les pays démocratiques, par des instances collégiales et formées des parties prenantes du secteur. Ces instances ont été conçues dans la perspective de développer les médias et de les protéger des pouvoirs politique et financier mais également contre leurs propres débordements !
Le décret-loi 41 relatif à l'accès aux documents administratifs a été assorti de plusieurs exceptions. A-t-il été vidé de sa substance ?
Ce texte dont nous ne sommes pas les auteurs et qu'un organisme international a rédigé pour la Tunisie constitue incontestablement un pas en avant dans le sens de la transparence administrative. Comme toute réforme, il porte certaines limites.
Le refus de livrer un document doit être motivé, sauf si les dossiers en question sont sous un ordre judiciaire.
C'est quand même là une grande limitation pour les journalistes d'investigation travaillant sur des dossiers chauds et qui arrivent à se procurer par exemple des procès-verbaux des tribunaux grâce à leurs propres sources ...
Selon le décret-loi 115, les journalistes ont le droit de protéger leurs sources : ils ne sont pas poursuivis en diffusant de telles informations. Mais on ne peut tout de même pas ouvrir l'accès à tous les dossiers. Beaucoup de juges, y compris les moins conservateurs, étaient contre la diffusion de l'interview d'Abou Iadh sur les ondes de radio Mosaïque. Qui nous garantit que cet homme recherché par la police n'en profite pas pour diffuser des messages codés à ses adeptes d'Ansar Charia?
Si vous aviez à revenir sur les décrets-lois 115 et 116, y changeriez-vous quelque chose ?
Il faut préciser que ces textes ont été élaborés pour gérer la période transitoire. Entre-temps, leur application a pris beaucoup de retard à cause de la mauvaise volonté des pouvoirs politiques, ces textes leur retirant beaucoup de leur mainmise sur les médias. Si on avait eu plus de temps, nous aurions incontestablement gardé l'esprit fortement libéral du 115 et du 116. Mais nous aurions peut-être étoffé le 116 par d'autres articles sur la publicité, les sondages, les chaînes de télévision émettant de l'étranger et destinées à un public tunisien et leur rôle pendant les périodes électorales.
Et les sanctions privatives de liberté du 115 ? Elles sont trois et portent sur l'appel à la haine raciale, l'incitation au crime d'homicide et à la publication de contenus pédophiles.
Elles restent conformes aux standards internationaux. Le débat qui a suivi leur publication a évoqué une interrogation : leur place est-elle ici dans le code de la presse ou plutôt fallait-il les évacuer dans un code pénal ?
Le gouvernement refuse d'activer ces deux décrets-lois. A qui profite le vide juridique ?
A tous ceux qui n'ont pas intérêt au développement en Tunisie d'une presse libre, professionnelle, pluraliste et équilibrée. Traditionnellement, la liberté des médias est menacée par les puissances de l'argent et du pouvoir politique. Les groupes financiers cherchant à influer sur les médias par la pression de la publicité et les politiques s'efforçant à garder une presse indulgente et compréhensive. Il faudrait ajouter à ceux-là certains groupes de presse eux-mêmes spécialisés dans le sensationnel. Toutes ces parties n'ont pas intérêt à voir émerger des organes de régulation soucieux d'appliquer la déontologie journalistique. Si la Haica était en fonction, les chaînes de télé ayant diffusé en direct des appels au djihad auraient été rappelées à l'ordre.
Les « négociations » autour de la Haica se poursuivent depuis plus de six mois. La Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle sera-t-elle vraiment indépendante du politique ?
Certes, certains indices ne sont point rassurants. Après la grève des journalistes d'octobre dernier, on a vu s'exprimer une volonté politique de la part du président Marzouki d'activer la Haica. Puis le président, affaibli, inscrit dans une logique institutionnelle où ses pouvoirs sont extrêmement limités et estimant qu'il ne pouvait pas décider de la composition de cette autorité sans revenir à ses alliés, des tiraillements d'ordre politique et une volonté de mainmise sur cette structure ont vu le jour. Paradoxal, on rejette la candidature d'anciens membres de l'Inric, qui ont pourtant travaillé sur le projet de la Haica, de personnalités indépendantes, de militants des droits de l'Homme et de la liberté d'expression connus pour leur engagement sous l'ancien régime, ou alors des compétences au-dessus de tout soupçon. Il y a d'autre part comme un malentendu : la Haica n'est pas un syndicat, on n'y va pas pour défendre ses intérêts corporatistes mais plutôt pour travailler sur la qualité d'un contenu.
Pensez-vous que la liberté d'expression a commencé à s'essouffler deux ans après la révolution ?
Elle reste fragile. A partir de là, des menaces de retour en arrière subsistent dans le cadre d'une transition délicate. Ceux qui détiennent le pouvoir actuellement reproduisent par leur culture et certains de leurs réflexes les gestes des hommes de l'ancien régime, notamment à travers les dernières nominations unilatérales à la tête des médias publics, une tendance au clientélisme et la faiblesse de leur logique participative. D'autre part, les propagandistes de Ben Ali n'ont pas disparu de la scène. Le projet de la Constitution peut, par ailleurs, justifier cette inquiétude : le référentiel religieux y est extrêmement présent, la protection du sacré également, on y reconnaît un certain nombre de libertés mais elles sont limitées par de nombreuses restrictions. Le tableau est mitigé.
La commission constitutionnelle chargée de l'information, un projet de l'ANC, sera-t-elle le nouveau mécanisme de contrôle des médias par les pouvoirs en place ?
Elle pourrait le devenir. D'abord parce qu'elle couvre tous les secteurs, de l'audiovisuel à la presse électronique, en passant par la presse écrite. Ce qui va à l'encontre des standards internationaux où la presse écrite et électronique est soumise à l'autorégulation, à travers les chartes internes des journaux et les conseils de presse.
D'autre part, cette instance sera désignée par le Parlement, risquant par là de devenir un mécanisme dirigé par la majorité au pouvoir, ce qui remet en cause le principe de son indépendance et affaiblit la place des professionnels.
Les ligues de protection de la révolution ont attaqué et menacé ces derniers mois plusieurs journalistes. Sont-elles un danger pour la liberté d'expression ?
Toutes les milices et forces parallèles qui s'arrogent des pouvoirs relevant du ressort de l'Etat incarnent une menace non seulement pour les libertés mais également pour l'Etat lui-même et ses propres institutions !


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