Le bateau prend l'eau de partout. On parle d'avancées dans le dialogue des partis sous la houlette de la présidence de la République. Mais de mauvaises nouvelles surgissent. Ainsi, le Tribunal administratif a-t-il gelé les activités de la Commission de tri des candidatures pour l'Instance supérieure indépendante des élections (Isie). On efface tout et on revient à la case départ. Tout est à refaire. Encore des mois pour prétendre mettre en place l'Isie. D'où l'inévitable retard pour les échéances électorales futures. Le cercle vicieux n'en finit pas de tourner en rond. Et les espoirs s'estompent. Déjà que la situation n'est guère si reluisante. Elle est même alarmante. Au jebel Chaâmbi, la confrontation armée avec le groupuscule terroriste se poursuit. Ailleurs, les mouvances salafistes entament un bras de fer qui s'annonce tragique avec les forces de l'ordre. Economiquement, les clignotants sont au rouge. Le dinar glisse vertigineusement, la bourse est en panne, le Département d'Etat américain classe le pays dans la catégorie à haut risque. Les investissements stagnent, le tourisme en prend un sacré coup. La classe politique endosse une grande responsabilité dans ce topo. Les agendas partisans et étroits l'emportent sur l'intérêt public. Il en résulte une situation paradoxale de transition bloquée. Et l'effet boule de neige pervers de s'accentuer. Tant qu'on est dans le provisoire, la normalisation tarde à venir. Surtout en matière d'investissements, de création d'emplois, d'exportations, d'équilibres budgétaires et monétaires. Il faut reconnaître que le système de la Troïka unie a cessé de fonctionner depuis juin dernier. On est là par acquit de conscience. Sinon, chacun pour soi et Dieu pour tous. Il en résulte une navrante fragmentation de fait de l'autorité et de la marge de manœuvre politique. Le bras de fer entre le président de la République et l'ancien chef du gouvernement aura été coûteux. Evoluant en rangs dispersés, le pouvoir s'est empêtré dans les cafouillages et les postures contreproductives. Côté modalités et échéances de la mise au point de la nouvelle Constitution et des élections notamment, M. Mustapha Ben Jaâfar endosse une grande responsabilité. D'ailleurs, la décision du Tribunal administratif annule des initiatives du président de l'Assemblée constituante plutôt que des règlements. Certaines de ses décisions ont été prises à la va-vite, ou à l'emporte-pièce. Aujourd'hui, les institutions en pâtissent. Et le processus de la transition démocratique s'en retrouve entamé. Ce qu'il faudrait désormais, c'est courir deux fois plus vite pour rester à la même place. Et sauver impérativement les meubles. Autrement, comme l'a dit Kaïs Saïed, les élections pourront encore traîner de longs mois, voire des années. Et la situation, déjà alarmante, pourrait empirer. Les récentes évolutions relatives aux groupuscules terroristes imposent un maintien à la hauteur de la spécificité du moment historique. L'union sacrée devrait être de mise. Partout et sans ambages. Et les états-majors politiques gagneraient à savoir que, si le bateau venait à couler, tous les protagonistes trinqueraient, sans exclusive. On parle depuis quelques mois de feuille de route, d'échéancier, de dates. On n'en voit rien. Les évolutions s'enfoncent chaque fois davantage dans une courbe risquée et dangereuse. L'économique et le social s'en retrouvent profondément grevés. La misère est la plus grande alliée de la dictature. Le répètera-t-on jamais assez ?