L'Institut arabe des chefs d'entreprises organise, avec le concours du nouveau Centre tunisien de fiscalité d'entreprises (Ctfe), la première édition du Forum de la fiscalité le 29 mai à Sfax. «Une rencontre annuelle qui s'ajoute au package des activités de l'Iace et des événements intermédiaires d'égale importance, tenues chaque année, à l'instar des journées de l'entreprise à Sousse. Ce premier forum traitera un thème d'actualité, à savoir la réforme fiscale, une opération inscrite dans la liasse des réformes successives engagées par le gouvernement», souligne M. Ahmed Bouzguenda, président de l'Iace, lors d'une conférence de presse tenue hier au siège de l'Institut consacrée à la présentation du programme du forum et ses objectifs. Plus de 400 chefs d'entreprises, experts, représentants d'organisations internationales et de think tanks participent à ce forum qui leur donnera l'occasion de débattre et d'examiner l'état des lieux de la politique fiscale tunisienne en période de transition ainsi que les chantiers qui suscitent des interrogations. C'est l'occasion également d'approfondir la réflexion sur la fiscalité transitionnelle, les choix à adopter pour la réforme : l'amnistie ou la taxation. Les assises du forum seront axées sur d'autres questions, à savoir la faiblesse du système actuel de contrôle fiscal, la hausse du déficit budgétaire, la baisse des recettes fiscales, l'impératif de la soutenabilité du budget, l'urgence d'entamer des réformes profondes du système fiscal durant cette période de transition, des problèmes propres à la situation économique actuelle nécessitant des solutions appropriées. «Il s'agit, notamment, d'identifier les moyens propices pour mieux répondre aux besoins pressants du budget et d'engager une refonte profonde du système fiscal. Un objectif qui pose dilemme : doit-on augmenter la taxation ou procéder à une amnistie offrant aux contribuables une opportunité unique de se mettre à jour ?», précise M. Bouzguenda. Sous l'ancien régime, la politique fiscale était caractérisée par une ponction comparativement excessive à l'égard des entreprises organisées et des salariés. En même temps, les forfaitaires ainsi que les «fraudeurs privilégiés» échappaient aux obligations fiscales. D'où un déficit notoire de la justice fiscale. Le premier panel du forum «permettra de dresser un état des lieux du système fiscal actuel et d'évaluer ses performances pendant cette phase de transition. Les insuffisances structurelles, les problèmes inhérents aux modes de fonctionnement et l'incapacité d'adoption du système fiscal sont autant de questions qui seront discutées en marge du forum. L'accent sera, également, mis sur les expériences internationales des pays qui ont accompagné leurs transitions démocratiques de stratégies de transition fiscale», explique M. Ahmed Masmoudi, président de la cellule Iace de Sfax. Cette stratégie permettra d'assurer, lors de cette période de transition, les ressources nécessaires pour répondre aux besoins d'investissement et sociaux pressants et de préparer le passage à un nouveau système fiscal. Les orientations d'une fiscalité transitionnelle sont loin d'être faciles à définir. Le défi qui se pose est celui d'éponger un passé lourd caractérisé par une fraude à grande échelle qui aura causé du tort à la fois aux entreprises organisées en les pénalisant et aux catégories et régions défavorisées en les privant de ressources de financement nécessaires pour le développement. «Ainsi, l'amnistie peut être une des mesures indiquées pour permettre une certaine réconciliation nécessaire pour assurer la stabilité sociale. Cette mesure s'avère nécessaire du fait qu'elle pourrait aider à mieux dépasser un système fiscal caractérisé par l'injustice», affirme le président de l'Iace. Cependant, une telle démarche risque d'être mal perçue du fait qu'elle gratifie les fraudeurs. «En dépit des défauts qu'on pourrait lui reprocher, une amnistie peut, dans un régime démocratique, encourager les opérateurs économiques à investir dans un contexte difficile aussi bien à l'échelle mondiale que nationale». A défaut, seules les recettes fiscales peuvent assurer le financement de la mise en place des politiques publiques. La taxation, «envisageable dans un contexte de justice transitionnelle, risque d'être contre-productive : les contribuables solvables risquant de refuser de supporter, seuls, le coût élevé de la mise en place d'un régime démocratique». Le deuxième panel du forum sera focalisé sur la gestion de cette phase de transition qui appelle à mettre en place des mesures d'amnistie et d'augmentation de l'imposition. Ce panel permettra, en outre, de répondre à certaines questions notamment celle de savoir quels mécanismes devraient être mis en place pour assurer l'équité fiscale. Le troisième panel sera axé sur la préparation de la prochaine réforme fiscale, dont la démarche, les enjeux et les mécanismes devront être en adéquation avec les réformes initiées ou en cours, notamment la réforme du Code d'investissement, de la Caisse de compensation... En effet, la gestion de cette phase de transition doit être préparée, négociée et planifiée afin d'entamer la réforme sur des bases solides conformément à une convergence des visions, à une prévision des mécanismes de transition, à une concrétisation des compromis...