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L'amnistie fiscale: est-elle une mesure nécessaire
Publié dans L'expert le 23 - 02 - 2011

Acte de politique financière ou de justice sociale ?


· Toute réforme fiscale cherche à rétablir une défaillance constatée et persistante au niveau du système fiscal.
· La culture fiscale est en définitive une obligation citoyenne et indéniable dans un Etat de droit.
Au temps de la fiscalité moderne et l'influence d'une culture de marché, on appelle à une bonne fiscalité et à un nouveau civisme suite à un interventionnisme fiscal rationnel et efficace.
Dans ce cadre, l'amnistie fiscale vient à la tête des mesures conjoncturelles pour corriger les défaillances économiques et parfois même politiques. C'est un recours ultime duquel on espère récupérer des sommes éludées.
De ce fait, l'amnistie fiscale demeure une mesure dont l'objectif est d'effacer à postériori les infractions fiscales. Elle constitue une incitation pour quelques contribuables défaillants à leur devoir fiscal à se mettre volontairement en règle avec la loi fiscale sans que leur attitude puisse leur être opposée.
Tout au long de l'histoire, la Tunisie a connu plusieurs politiques fiscales marquées par des périodes mouvementées à l'échelle politique et socio-économique. Ceci, comme l'impôt est toujours ce fardeau fort contesté par les citoyens et faisant toujours l'objet des révoltes. Ainsi, durant la période beylicale, la résistance à l'impôt est à l'origine du chaos financier que connaissait la régence tunisienne à cette époque.
En outre, la Tunisie précoloniale a été marquée par la révolte d'Ali ben GHADAHOM en 1864, engendrant la suspension de la constitution tunisienne de 1861. Durant cette période, les autorités publiques cherchent à trouver la solution la plus efficace pour améliorer la situation financière et améliorer les ressources internes. Ainsi, Lamine Pacha, et suite à un décret beylical, décide une amnistie fiscale générale, le 10 Novembre 1955.
Après l'indépendance, on adhère à la décolonisation de l'économie nationale pour assurer son développement face à une crise générale dans le jeune pays indépendant. De ce fait, on assiste à de nouvelles mesures de clémence à maintes fois. C'est ainsi, qu'en 1971 une autre amnistie fiscale a été décidée.
Ensuite, une autre amnistie fiscale va se déclarer au début du changement politique de l'ère Ben Ali le 26/11/1987 faisant son entrée en vigueur et son application provoqua la contestation des juristes et économistes. Cette amnistie fiscale s'applique aux impôts directs et indirects revenant à l'Etat, à l'exception des droits et taxes revenant aux collectivités locales. De même, elle va encore être couplée par une amnistie économique mise en vigueur par un communiqué du ministre de l'Economie nationale et une amnistie des pénalités par la CNSS.
Plusieurs commentaires doctrinaux ont signalé que ces deux dernières amnisties sont de source non législative et donc en non-conformité à l'article 34 de la Constitution tunisienne, bien qu'elles aient contribué à corriger quelques calamités au système fiscal toujours imparfait et non rentable.
Par la suite, la fiscalité tunisienne va connaître une réforme stratégique à travers la promulgation du code de l'IRPP et l'IS apportant, à travers la loi de finances de 1990 une amnistie sectorielle pour aménager davantage le système fiscal. Ensuite, la loi du 4/8/1998 relative à la simplification des procédures fiscales a accordé des abandons de pénalités et une amnistie fiscale sectorielle relative aux plus-values immobilières pour alléger l'exercice du devoir fiscal dans la même perspective de réforme fiscale continue.
Il importe d'ajouter que le législateur s'est intéressé par la difficulté de recouvrement au niveau de la fiscalité locale et c'est pourquoi il a opté pour une amnistie fiscale datant du 23/07/2002, comme une solution pour améliorer le rendement fiscal des revenus et ressources communaux et alléger l'exécution de la charge fiscale.
Par la suite, les lois de finances des exercices 2002 et 2004 ont stipulé des amnisties fiscales sectorielles, et à titre d'illustration, on cite la loi de finances pour l'année 2004 décidant une amnistie fiscale partielle dans le domaine touristique.
Enfin, la plus récente des amnisties fiscales en Tunisie, celle du 15/05/2006 portant une amnistie fiscale disposant un abandon total par l'Etat de ses créances fiscales et celles revenant aux collectivités locales, et tout en étant couplée pour la première fois par un avis du conseil constitutionnel tunisien favorable au projet de cette loi amnistiante.
Grâce à l'amnistie fiscale du 2006, l'Etat a accordé un abandon des pénalités et des sanctions pécuniaires, douanières et de change ainsi qu'une suspension et déchéance de la poursuite. Et lors des vacances parlementaires, suite à un décret-loi, une prolongation des délais a été décidée dans le but d'augmenter le nombre des adhérents à cette mesure de clémence.

L'amnistie fiscale est une solution politique indéniable
Toute réforme fiscale cherche à rétablir une défaillance constatée et persistante au niveau du système fiscal. De ce fait, notre législateur intervient à la guise de plusieurs modalités et techniques pour corriger et alléger la fiscalité tunisienne.
Aussi, sous la contrainte d'une conjoncture économique instable, toutes les décisions fiscales à prendre par les autorités étatiques veillent à activer la vie économique pour récolter plus de fonds et passer l'éponge sur les fraudes fiscales du passé.
Il convient d'ajouter que l'importance des objectifs économiques est non moins indéniable pour la fiscalité contemporaine, à ceux d'ordre politique. Par conséquent, l'amnistie fiscale est l'expression d'une réforme fiscale, pour assurer une réconciliation entre l'administration fiscale et les contribuables.
En fait, la relation entre l'impôt et le politique est incontestablement solide. Le pouvoir fiscal, celui de décider de l'impôt, a toujours été étroitement associé au pouvoir politique: de ces rapports est née une légitimité réciproque.
Tout Etat ne peut jamais protéger son indépendance sans savoir comment protéger ses propres ressources et maintenir une fiscalité dynamique et fiable.
La nécessité de l'impôt est un bon indicateur à l'importance de la fiscalité pour le bon fonctionnement du pouvoir politique. De même, elle est fondée sur la légalité pour protéger sa légitimité. Il va sans dire, que le pouvoir fiscal est en essence, une des manifestations de la souveraineté étatique dans la sphère fiscale.
Dans ce cadre, l'amnistie fiscale est un choix politique avant d'être une mesure fiscale conjoncturelle. C'est un choix gouvernemental exprimant une réforme fiscale. Le législateur va intervenir juste pour le légaliser suite à un texte législatif et constitutionnel. En conséquent, la légitimité du pouvoir fiscal est avant tout une légitimité politique faisant la référence à un impôt légitime et accepté par les citoyens.
Dans le cadre d'une réforme fiscale continue, le pouvoir politique intervient à travers des choix gouvernementaux pour soutenir un ordre fiscal rénovateur et suite à plusieurs mesures et modalités d'exercice plus rigoureuses. Alors, l'amnistie fiscale est considérée comme un moyen pour lutter contre la fuite à l'impôt.
Ainsi, les autorités publiques vont agir contre la fuite à l'impôt pour ne plus perdre des sommes de recettes importantes. Ceci est vrai, l'Etat a toujours besoin de recettes fiscales pour exécuter les dépenses engagées durant un ou plusieurs exercices budgétaires.
Il arrive que le trésor public se trouve devant des caisses quasi vides qui ne permettent plus de fournir le nécessaire et gérer les fluctuations économiques. D'ailleurs, en Tunisie, l'amnistie fiscale du 15-5-2006 a été décidée suite à la hausse des prix du pétrole que le gouvernement tunisien en tant que pays non pétrolier n'a pas pu suivre le rythme fou de la croissance du prix du baril. La flambée du prix de pétrole est un phénomène qui intervient en amont du manque des recettes et en aval, dû à l'évolution des dépenses de l'Etat qu'on n'arrive plus à les bien gérer.
Le manque de ressources financières revient à plusieurs raisons, parmi lesquelles le phénomène de la résistance à l'impôt et le non respect des contribuables au devoir fiscal.
On peut bien dire que l'Etat a accepté un choix dangereux de pardonner les tricheurs du fisc pour récupérer une somme des impôts éludés et couvrir les dépenses pétrolières engendrant une crise économique lourde de conséquences.
C'est ainsi, qu'en dehors d'une situation économique critique, l'amnistie fiscale peut être un choix politique visant des phénomènes inciviques. La lutte contre la fuite devant l'impôt nécessite un travail en profondeur sur la mentalité des citoyens contribuables.
De ce constat, on va dégager à la fois, le lien entre l'amnistie fiscale et la fraude fiscale, ainsi que celui avec l'incivisme fiscal.
Implicitement, on peut dire que si le fisc accepte de pardonner quelques citoyens contribuables, ceci pour réaliser un profit fiscal retardé. Il faut récupérer ce que les récalcitrants ont refusé de donner volontairement au trésor public.
Il parait si nécessaire de réétudier le phénomène de la fuite à l'impôt pour ne plus offrir des indulgences financières à effet pervers.
Dans un Etat moderne ou en voie de développement, la fraude fiscale reste un grand problème et un vrai handicap qui pèse lourdement sur le chemin de l'épanouissement économique d'un Etat.
Il faut garder un grand civisme fiscal pour aboutir à un véritable développement économique sans aucune conséquence néfaste sur le plan social et extra fiscal.
L'impôt reste une obligation consentie par tous les citoyens et toute fraude commise mérite une sanction pénale. Il faut que l'amnistie fiscale ne soit pas un cadeau offert aux contribuables défaillants, et toujours bien attendue pour éponger les fautes accomplies à l'égard du devoir fiscal et également, les dissimulations de recettes.
Devant la complexité du système fiscal, la fuite à l'impôt est plus accentuée et l'amnistie fiscale pourrait être le modèle de réforme fiscale nécessaire.
Au contraire, face à un système fiscal «malade» et fort déséquilibré, il convient d'accorder des cadeaux fiscaux, pour lutter contre la fraude fiscale ou réduire les évasions fiscales.
La fraude fiscale est une pratique immorale et un phénomène universel. Les conséquences sont désastreuses, créant un sentiment de frustration chez les contribuables transparents.
La fraude par dissimulation de la matière imposable ou par la majoration des charges déductibles du revenu imposable ne peut jamais générer une mentalité soucieuse de l'exécution du devoir fiscal.
Comme dans tous les autres pays du monde, la fraude fiscale existe en Tunisie et il reste difficile de mesurer son ampleur et d'évaluer le manque à gagner.
Face à la conjoncture économie actuelle, il faut une conscientisation du citoyen contribuable et une amnistie fiscale renforçant l'incivisme fiscal.
Le recours à l'amnistie fiscale est toujours dicté par nécessité budgétaire, sans pour autant être réputé comme la solution rigoureuse pour décliner l'incivisme fiscal. De là, elle est considérée comme une incitation à l'incivisme fiscal.
La fraude fiscale existe chez toutes les catégories sociales sans exception. De là, le refus de l'impôt est un sentiment qui entrave la démarche économique de l'Etat. Il faut convaincre la mentalité nationale de l'importance de l'impôt à travers une culture volontaire. Que le devoir fiscal reste un devoir citoyen et utile pour toute la collectivité qu'il appelle à être exécuté dans une ambiance de paix sociale et de civisme. Que la dette fiscale est irréfutable pour le développement économique national et qu'être civique veut dire être respectueux au patrimoine public.
D'une part, il incombe à chaque citoyen de présenter une déclaration fiscale sincère comportant l'ensemble de ses revenus et en toute transparence à l'administration fiscale. D'autre part, les autorités publiques doivent abandonner l'idée que le pardon exceptionnel aux tricheurs du fisc va enrichir les caisses de l'Etat, puisque, ceci ne va que développer l'idée chez les mauvais contribuables que le fisc a toujours besoin de leurs propres richesses. Que le recours à la fraude fiscale va finir par être accepté pour le bien être des caisses de l'Etat et ainsi toujours, l'administration fiscale est un créancier qui réclame sa créance à son débiteur qui n'est autre que le redevable de l'impôt.
Il faut faire comprendre à tous les citoyens que la déclaration fiscale est une obligation citoyenne et indéniable. C'est une erreur profonde de considérer que la réconciliation entre le citoyen contribuable et l'Etat peut se réaliser suite à une amnistie fiscale, à côté de plusieurs textes opaques. Les contribuables n'ont pas conscience de l'importance de leurs actes déclaratifs dans l'évolution de la démarche économique de l'Etat.
L'exemple américain est une référence très particulière. Il y a le respect au devoir fiscal dans une ambiance de civisme fiscal laissant le recours à l'amnistie fiscale une probabilité inconcevable et dérisoire.
La culture fiscale est en définitive une obligation citoyenne et indéniable dans un Etat de droit.
Cela étant dit, la fraude fiscale demeure une des raisons principales qui mènent à légitimer l'amnistie fiscale. A côté, la faute d'appréciation ou la mauvaise prévision est une autre cause non moins importante.

Mohamed Salah AYARI: Conseiller Fiscal
Q1: L'Amnistie fiscale: est-elle une mesure fiscale nécessaire après la révolution du 14 Janvier 2011?
De prime abord, on peut confirmer que l'expression «Amnistie fiscale» a un effet magique sur les contribuables quelle que soit leur conviction et qui peuvent être divisés en deux catégories:
- les contribuables qui sont en règle et qui respectent leurs obligations fiscales.
- et les contribuables récalcitrants et qui essaient par tous les moyens d'éluder le paiement de l'impôt.
Par conséquent, et afin de répondre à la question si l'amnistie fiscale constitue ou non une mesure fiscale nécessaire après la révolution, il faut tenir compte de ces deux alternatives qui expliquent les avantages et les inconvénients de l'amnistie fiscale.

Q2: Alors quels seront les avantages à dégager d'une amnistie fiscale?
Qu'on le veuille ou non, l'amnistie fiscale peut avoir un effet positif sur l'économie du pays, surtout suite à une révolution, et ce notamment pour les raisons suivantes:
* Permettre aux entreprises qui ont travaillé dans un climat de suspicion, de retrouver confiance et de redémarrer de nouveau
* Aider les entreprises ayant des créances constatées à leur charge, majorées des pénalités de retard, à s'orienter vers de nouveaux horizons (extension, agrandissement des locaux, acquisition de nouveaux équipements…)
* Encourager les entreprises qui ne sont pas en règle sur le plan fiscal à réaliser de nouveaux investissements et de créer des postes d'emplois supplémentaires.
* Commencer une ère nouvelle pleine de confiance dans l'avenir qui permet aux entreprises existantes de développer leur capacité de production, de chercher des partenaires étrangers et d'arracher des marchés à l'extérieur.
* Adhérer volontairement à l'effort fiscal suite à leur conciliation avec l'administration fiscale et à l'amélioration des conditions de travail.

Q3: Y a-t-il des inconvénients à générer de l'amnistie fiscale?
Partant de l'adage qui dit «le malheur des uns fait le bonheur des autres», on constate que l'amnistie fiscale peut avoir des effets néfastes sur une autre catégorie d'entreprises qu'on peut résumer comme suit:
* Les entreprises qui ont respecté leurs obligations fiscales seront pénalisées par rapport à celles qui ont échappé au paiement de l'impôt.
* Aboutir à une concurrence déloyale, par le biais de la fiscalité, entre les entreprises qui ont honoré leurs engagements sur le plan fiscal et celles qui se sont dérobées de leurs devoirs vis-à-vis du trésor de l'Etat.
* Créer un sentiment de frustration chez les contribuables qui ont fait un effort supplémentaire pour être en règle sur le plan fiscal.
* Inciter les entreprises qui ont supporté le poids de l'impôt, malgré leur situation financière parfois précaire, à réviser leur position eu égard au paiement de l'impôt.
* Alourdir la charge des contribuables honnêtes par rapport aux contribuables récalcitrants pour lesquels on ouvre de nouvelles perspectives, tout en sacrifiant une partie des recettes fiscales.

Q4: Pouvez-vous nous proposer vos recommandations pour une éventuelle amnistie fiscale après la révolte du 14 janvier 2011?
Afin de réduire les écarts et d'atténuer les effets négatifs d'une amnistie fiscale, tout en créant une nouvelle dynamique surtout sur le plan économique et social, une amnistie fiscale peut être conçue tout en respectant les principes de base suivants:
- Limiter l'amnistie fiscale à l'abandon des pénalités de retard uniquement, et ce, à condition de payer les montants en principal selon un calendrier établi à cet effet.
- Prévoir une amnistie fiscale au titre des pénalités de retard et au titre d'une partie des créances constatées en principal et ce, à condition que l'entreprise s'engage à réaliser des investissements à concurrence des montants en principal abandonnés.
- Autoriser l'abandon de la totalité des créances constatées, en plus des pénalités de retard, mais uniquement pour les entreprises en difficultés économiques et ce, au vu de certaines conditions fixées d'avance.
- Etendre l'abandon d'une partie ou de la totalité des montants des droits et taxes exigibles, aux entreprises qui s'engagent à créer des postes d'emplois supplémentaires et ce, selon des critères établis d'avance.
Ainsi, la révolution de la dignité et de la liberté aura un effet très positif sur tous les opérateurs économiques, à travers une amnistie fiscale réfléchie, dont l'impact sera très bénéfique pour la Tunisie nouvelle.


Wajdi Abdelhadi: Expert-comptable
Q1: Si vous pouviez nous définir ce qu'est une amnistie fiscale?
Dans une définition juridique de l'amnistie fiscale, Dalloz (1962) dans son répertoire de droit donne une définition juridique et rigoureuse de l'amnistie: "Mesure générale faisant remise à tous les inculpés d'une même catégorie de crimes, de délits ou de contraventions, aussi bien des poursuites à exercer que des condamnations prononcées". Cette définition peut être complétée par celle du Larousse qui définit l'amnistie comme un "acte du pouvoir législatif qui a pour objet d'effacer un fait punissable et, en conséquence, soit d'empêcher ou d'arrêter les poursuites, soit d'effacer les condamnations" (Larousse en 5 volume, 1983, p.123).
Les définitions offertes par la littérature économique des amnisties fiscales devraient permettre d'obtenir une définition des amnisties fiscales plus en phase avec les problématiques qui seront traitées par la suite. Ainsi, Parle et Hirlinger (1986) parlent de programmes procurant aux contribuables une opportunité unique de se mettre à jour en payant les impôts ainsi que les intérêts passés sans faire l'objet de sanctions (Parle et Hirlinger, 1986, p. 246). Plus récemment, Andreoni (1991) définit les amnities fiscales comme des mesures gouvernementales qui "pardonnent" tout ou partie des sanctions dues par les contribuables si ceux-ci déclarent volontairement les montants qu'ils ont dissimulé (Andreoni, 1991, p.143).
Bien d'autres définitions existent dans la littérature économique des amnisties fiscales. Ces définitions suffisent toutefois à mentionner les éléments les plus importants qui caractérisent les amnisties fiscales, à savoir la réduction des sanctions prévues pour les contribuables qui se sont soustraits à leurs obligations fiscales.

Q2: Quelles sont les circonstances au cours desquelles la Tunisie a connu auparavant des amnisties fiscales?
L'examen des amnisties fiscales faites en Tunisie pourrait donner les détails d'une amnistie fiscale que peuvent décider les autorités tunisiennes.
En effet, je cite la dernière, relative à l'occasion de la célébration du 50ème anniversaire de l'indépendance (mardi 2 mai 2006): la chambre des députés a adopté une loi instituant l'amnistie fiscale. Cette amnistie couvrait les dettes fiscales dues à l'Etat et aux collectivités locales. Officiellement, elle avait pour objectif de concilier le contribuable avec le fisc.
En vertu de cette amnistie qui est entrée en vigueur à compter du 1er juillet 2006, seraient abandonnés les dettes fiscales, pénalités de contrôle et intérêts de retard, lorsque le montant principal de la dette est inférieur à 100 dinars. Près de 130 mille personnes avaient bénéficié de cette mesure.
Quant ce montant dépassait les 100 dinars, seuls les pénalités de contrôle et les intérêts de retard seraient annulés. Les poursuites judiciaires sont suspendues dès que les contribuables endettées s'engagent à rembourser leur dette dans les délais fixés dans un échéancier élaboré avant le 1er juillet 2006.
Concernant les amendes et condamnations pécuniaires, la loi annule les montants de 100 dinars et prévoit un abattement de 50% sur les montants supérieurs, avec des facilités de paiement. Les dettes fiscales seront payées en tranches trimestrielles égales, sur une période maximale de cinq ans.
La même démarche serait adoptée pour les taxes dues aux collectivités locales connues sous la dénomination taxes sur les propriétés bâties et non bâties. Cette amnistie, qui ne concernait pas les chèques sans provision et les jugements en cours d'instruction, couvrait les pénalités, les droits d'enregistrement et les jugements émis.
Tout contribuable, objet d'une instruction en justice et qui désire se réconcilier avec le fisc sur la base des dettes contractées, peut bénéficier de l'amnistie fiscale et se limiter au payement du principal de la dette.
Cette amnistie comporte des sanctions. Elle prévoit une pénalité de 1% du montant de la dette fiscale pour tout mois de retard et une annulation du bénéfice de cette amnistie après 60 jours de l'expiration de l'échéance de payement de la dernière tranche.

Q3: L'amnistie fiscale: est-elle une solution politique indispensable après la révolte du 14 janvier 2011?
Pour la première fois depuis les indépendances en Afrique du nord, voire dans le «monde arabe» tout entier, une révolution populaire – et non un coup d'Etat ou une intervention étrangère – a chassé du pouvoir le clan politique et familial qui l'avait accaparé.
À l'issue du premier conseil ministériel du gouvernement de transition, il a été décidé la validation du projet de loi d'amnistie pour les mille huit cents prisonniers politiques ainsi que la reconnaissance de l'ensemble des mouvements politiques interdits. Du point de vue fiscal, aucune amnistie n'a été ni décidée ni même discutée.
A noter que l'impôt a essentiellement pour but de fournir au Trésor les ressources
nécessaires au fonctionnement régulier des services publics: il faut que les
recettes d'impôt rentrent régulièrement et rapidement pour que les paiements
publics soient effectués.
Q4: Selon vous, une amnistie fiscale est-elle une mesure fiscale nécessaire après la révolte du 14 janvier 2011?
La réponse à cette question repose inéluctablement sur des données, réelles, chiffrées ou non.
Certes, l'amnistie fiscale serait bénéfique pour les contribuables qui sont en défaut vis-à-vis de leurs obligations fiscales. Pourquoi priver, donc, ceux qui sont à jour de leurs obligations fiscales de l'amnistie?
A mon avis, une amnistie fiscale est nécessaire après la révolte du 14 janvier 2011 si elle est décidée et allouée en fonction des contribuables suivants et selon des degrés d'amnistie différents:
1) Les contribuables exerçant dans les secteurs ou les activités liés à l'industrie, au tourisme, à l'agriculture, et autres secteurs et qui sont générateurs de forte valeur ajoutée.
2) Les contribuables ayant un degré élevé d'employabilité (nombre élevé d'employés) et qui créé des emplois à cet effet et ce en fonction du nombre d'emploi créé.
3) Les contribuables implantés dans les zones démunies du pays et ce en fonction de la disponibilité des services publics.
4) Les contribuables qui sont au réel et donner l'occasion à ceux qui migrent du forfait vers le réel de subventions leur permettant cette migration et la mise à jour de leur situation fiscale et comptable.
5) Les contribuables dont les états financiers sont soumis au commissariat aux comptes ou qui feront un audit à l'occasion en les encourageant au recours à des professionnels indépendants.
Cela, tout en préservant un traitement de faveur pour les contribuables qui sont déjà à jour vis-à-vis de leurs obligations fiscales et qui font l'effort de mettre à jour leur situation fiscale et comptable ou qui feront l'effort pour le faire.
L'amnistie fiscale n'est pas le corollaire de l'équité fiscale mais en la faisant diriger vers des secteurs, zones géographiques ou catégorie de contribuables bien définis, et en subordonnant toute action à la tenue d'une bonne comptabilité en la faisant auditer et contrôler, on pourrait contribuer à bon escient à la révolte de la Tunisie.


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