Dans la foulée des actes de violence perpétrés par les jihadistes se proclamant comme les «Ansar Echaria» et dans le sillage de la mobilisation des acteurs du paysage politique national ainsi que des différentes composantes de la société civile en vue de faire front uni contre la violence et l'extrémisme, se multiplient les appels à la mise en place de chartes nationales pour la lutte contre la violence. Ainsi et pour devancer les concepteurs de la conférence nationale de lutte contre la violence dont les travaux se dérouleront le 18 juin prochain et à la préparation de laquelle s'attelle déjà une coordination générale présidée par le constitutionnaliste Ghazi Ghraïri, les ulémas se disant «les zeitouniens authentiques» sont passés à l'action. Ils viennent, en effet, d'annoncer «l'élaboration d'une charte nationale globale et unifiée comportant les constantes communes rassemblant tous les Tunisiens». Comportant neuf grands axes, la charte en question a été présentée par cheikh Férid El Béji, président de l'association «Maison d'Al Hadith zeitounienne», à l'occasion d'une rencontre-débat organisée, à la mi-mai, par la fondation Al Majd pour les études stratégiques sur le thème «La pensée zeitounienne et la lutte contre l'extrémisme». Une charte ouverte à la signature de tout le monde Synthèse d'une réflexion qui a groupé l'Observatoire arabe des religions et des libertés, la Ligue tunisienne des droits de l'Homme, l'Union des confréries soufies, l'Association «Maison d'Al Hadith zeitounienne» ainsi que plusieurs personnalités de la société civile, «la charte nationale pour l'union et la paix civile» (appellation officielle) comporte les neuf axes suivants : – L'union nationale et la paix civile sont considérées comme l'objectif suprême, l'intérêt supérieur et la priorité urgente tel que l'impose la phase transitoire par laquelle passe le pays. – Les signataires de la charte acceptent l'adhésion de tous les citoyens quelles que soient leurs orientations politiques, doctrinales ou idéologiques. – Le recours à la violence est prohibé quelle que soit l'ampleur que peuvent atteindre les conflits ou les dissensions. Le recours à la force doit rester l'apanage exclusif de l'Etat. Le dialogue et le recours à la justice sont les deux moyens exclusifs pour la résolution des différends entre les Tunisiens. Les signataires de la charte appellent à accélérer l'instauration de la justice transitionnelle et considèrent que la poursuite juridique de n'importe quelle partie accusée d'avoir porté atteinte à l'intégrité du peuple tunisien est la responsabilité exclusive de la justice. Les signataires s'engagent à considérer la préservation de l'intégrité du peuple et de ses acquis comme étant la préservation de leur propre intégrité et de leurs acquis et biens. L'incitation verbale à déclarer les gens mécréants et l'incitation à la violence sont considérées comme un crime et une haute trahison par la loi. Les élites ou leaders religieux se doivent se placer à équidistance de toutes les parties. Les signataires de la charte s'engagent à respecter les symboles religieux sacrés du peuple tunisien. La charte est proposée à la signature des présidents de la République et du gouvernement et des membres de l'Assemblée nationale constituante. Les chefs d'état-major des trois armées, les chefs du syndicat des forces de sécurité, les présidents des partis politiques, les présidents des associations et organisations nationales, les chefs des minorités juive et chrétienne, les chefs des syndicats des médias, les personnalités nationales et intellectuelles actives dans la société sont également invités à signer la charte. Pour le moment, le texte de la charte n'a pas été encore adressé au chef de l'Etat et au chef du gouvernement pour signature. Mazen Chérif, expert stratégique spécialisé dans les affaires sécuritaires et dans les courants islamiques et auteur de l'idée fondatrice de la charte, précise : «La charte sera envoyée dans les prochains jours aux palais de Carthage et de La Kasbah dans l'espoir que le Dr Moncef Marzouki et Ali Laârayedh y apposeront leur signature».