On le sait, et Mustapha Ben Jaâfar ne cesse de le répéter à chaque fois qu'on lui tend un micro, «n'attendez pas de moi des annonces fracassantes ou sensationnelles, je ne suis pas le genre», mais on sait également que les plus grands hommes d'Etat ont su à un certain moment sortir du lot et affirmer avec force une position politique qui redistribue les cartes et permet de sauver le pays... ou le parti. Seulement voilà, même après l'assassinat de Mohamed Brahmi, Ettakatol ne semble pas revoir sa politique ni sa coalition gouvernementale avec un parti islamiste de plus en plus dans la tourmente, risquant ainsi de consolider l'isolement politique du parti qui vient tout juste de sortir la tête de l'eau à l'approche de la finalisation de la Constitution. Réuni avant-hier jusqu'à tard dans l'après-midi, le bureau politique du parti réitère son refus de dissoudre l'Assemblée nationale constituante et annonce une initiative politique censée réunir sous la bannière de l'Ugtt «toutes les forces politiques qui croient en la transition démocratique». «La dissolution de l'ANC est une ligne rouge que nous refusons de franchir. Pour tout le reste, nous sommes prêts à en discuter», a déclaré Sami Razgallah, membre du bureau politique du parti Ettakatol. Il ajoute que l'initiative présentée prévoit une coordination nationale ouverte à tous les partis sous la direction de l'Ugtt qui sera « chargée de contrôler le travail du gouvernement et aura un droit de regard sur tout ». Assurant que son parti n'a jamais été contre un gouvernement de technocrates, Sami Razgallah nous explique qu'il ne peut y avoir un substitut à l'ANC «qui puisse bénéficier d'un consensus national comme cela a été le cas lors de la toute première phase de la transition démocratique». Le parti devra attendre l'écho qu'aura sa proposition parmi la classe politique mais aussi et surtout la décision de l'Ugtt, une pièce maîtresse du schéma politique tunisien.