Les constituants légitimistes poursuivent leur rébellion, Imed Daïmi fait monter les enchères Décidément, le Dialogue national qui a démarré laborieusement, voire douloureusement, peine à trouver ses marques non seulement parmi les parties qui y prennent part mais aussi parmi ceux qui ont décidé de le boycotter (les partis ayant refusé de signer la feuille de route du Quartet) et ceux qui sont opposés à l'idée même du Dialogue national (les constituants légalistes qui font désormais la loi au sein de l'ANC et se préparent à révoquer Mustapha Ben Jaâfar de la présidence de la Constituante). Après la déclaration signée le 8 octobre par 113 constituants légitimistes, la décision prise, jeudi dernier, de déclarer la séance plénière à l'ANC ouverte indéfiniment en vue d'empêcher le président de la Constituante «de suspendre de nouveau ses activités», ce fut, hier, au CPR de prendre le relais pour enfoncer davantage le clou et révéler les causes qu'il dit «réelles» qui l'ont poussé à refuser de signer la feuille de route du Quartet. Imed Daïmi, secrétaire général du CPR, n'est pas allé par quatre chemins pour dire texto : «Le Dialogue national s'est transformé en dialogue entre l'Ugtt et Ennahdha. Nous considérons que la demande qui nous a été faite de signer la feuille de route avant le démarrage constitue un acte de confiscation de ce dialogue, une forme de chantage politique et une manœuvre que nous refusons absolument». Maintenant que le Dialogue a démarré en l'absence des représentants du CPR qui ont opté pour la politique de la chaise vide, l'on se demande comment Imed Daïmi va procéder pour répondre à l'ultimatum lancé par le Quartet. Le secrétaire général du CPR est clair et tranchant : «Nous n'avons pas quitté le Dialogue pour qu'on nous fixe un ultimatum afin d'y revenir. Personne parmi les organisations parrainant le Dialogue ne nous a contactés bien que nous avions demandé à l'Ugtt de réviser ses positions. Quant à l'ANC, nous y demeurons attachés et nous envisageons de constituer une alliance au sein de la Constituante afin de nous opposer à toute tentative de marginalisation de cette institution». Ennahdha finira par se rendre à l'évidence Pour Mounir Kachoukh, membre du Parti populaire pour la liberté et le progrès, «l'histoire a toujours montré que Ghannouchi et son parti ont fait foirer tous les dialogues précédents. Il est vrai qu'il a signé, samedi dernier, la feuille de route du Quartet, mais il n'en était pas convaincu bien qu'il ait griffonné le document à deux reprises». Pour ce qui se passe actuellement au sein de l'ANC où les constituants légalistes cherchent à tout bloquer, Kachoukh relève : «Je suis convaincu que tout est orchestré et calculé par Ennahdha à l'avance. Les 113 signataires de la pétition ne font qu'obéir aux ordres d'Ennahdha bien que certains parmi ces constituants appartiennent à d'autres partis, mais sont en réalité des appendices du parti nahdhaoui». Que va faire le Front du salut national pour s'opposer aux manœuvres dilatoires d'Ennahdha et des partis qui en sont les satellites ? «D'abord, nous sommes attachés à l'application stricte de la feuille de route du Quartet. Les manœuvres orchestrées au sein de l'ANC n'ont aucune importance et ne peuvent, en aucune manière, bloquer le Dialogue national ou le détourner de ses objectifs ou le vider de son sens. Les mouvements populaires que nous allons organiser prochainement vont acculer Ennahdha à prendre conscience de l'intérêt national et à se rendre à l'évidence. Quant à Imed Daïmi, il n'a jamais cru au dialogue national et ses déclarations ainsi que les communiqués de son parti ne sont pas à prendre au sérieux. Tout simplement parce qu'il ne fait que répéter ce qu'on lui inculque», conclut le responsable du Pplp. Une réaction attendue Le Front du salut national et l'Union pour la Tunisie ne vont pas rester les bras croisés «face à ces manœuvres qui risquent de tout faire sauter», comme le souligne Abderrazak Hammami, secrétaire général du Parti du travail patriotique démocratique. «Nous allons tenir, dans les prochains jours, une réunion conjointe entre le Front et l'Union pour la Tunisie en vue de procéder à l'évaluation de ce qui a été réalisé jusqu'ici au niveau du Dialogue national», précise-t-il. Hammami tient à rappeler que «le Dialogue national ne peut réussir qu'à la seule condition que toutes les parties prenantes font montre de clarté et d'une volonté sincère de parvenir aux résultats fixés, à l ‘avance, par les participants à ce Dialogue. Au cas où une quelconque partie aborderait ce dialogue avec la volonté cachée de le saborder, ni les réunions préparatoires ni les discussions à caractère procédural ne peuvent accoucher d'un résultat concret». «Les réactions rebelles des constituants nahdhaouis et de ceux qui partagent leur point de vue ne visent, en réalité, qu'à gagner du temps. Et ceux qui développent ces discours ou adoptent ce comportement de refus se trompent lourdement s'ils pensent qu'ils servent ainsi les intérêts de leurs propres partis. Malheureusement, quand les cartes se brouillent et que l'on assiste à un discours et à un discours contraire à un rythme quasi quotidien, toutes les astuces ou tromperies ne sont plus à écarter», confie Hammami. Les constituants dissidents préoccupés Grogne également du côté des constituants dissidents qui considèrent que les réunions informelles du Dialogue national ont trop duré. Lors d'une conférence de presse tenue, hier, Issam Chebbi (constituant dissident et porte-parole d'Al-Joumhouri) a notamment appelé les parrains du Dialogue «à fixer une date précise pour le démarrage officiel du Dialogue et à parachever le débat sur les questions procédurales».