Notre football souffre d'inflation et (pour certains) de faillite pour cause de piètres choix sportifs et financiers. Il est même devenu le royaume des tocards surpayés! Une récente étude internationale a révélé que la Tunisie est le pays nord-africain qui compte le plus grand nombre de milliardaires. Il faudra sans doute ajouter à ce «record» qu'on retrouve en Tunisie les joueurs de football les mieux payés du Grand Maghreb. Pourtant, ce n'est pas en Tunisie qu'on retrouve les meilleurs et les plus grands stades, les plus gros sponsors, le plus grand nombre de supporters et celui des titres. Résultat : les clubs tunisiens sont les plus endettés et, sans l'apport personnel de Hamdi Meddeb et Slim Riahi (qui ne sont pas propriétaires de leurs clubs), les trous de l'Espérance et du Club Africain seraient abyssaux, preuve que leur gestion n'est pas au-dessus de tout soupçon. Dépenser sans compter Ce constat ne concerne pas uniquement les bilans post-révolutionnaires, ultérieurement sanctionnés par le huis clos, la baisse des droits TV et les difficultés de la quasi-totalité des entreprises qui investissaient dans le sport. Il est antérieur à cela même s'il n'a pas atteint les records actuels. Un élément a, par-dessus tout, fait flamber les montants des transferts, salaires et autres primes de rendement : les agents. Les vrais et les faux, locaux et étrangers. On peut les assimiler aux intermédaires, ceux qui vous font grimper les prix des tomates ou alors des pommes de terre de 1 à 5. Pour passer des 300 millimes du producteur à 1 dinar 500 millimes pour le pauvre consommateur, soit le club dans le cas d'espèce. Pis encore, ces fameux intermédiaires bénéficient souvent d'une chaîne de complicités : dirigeants véreux (et ils sont très nombreux dans nos clubs, à commencer par quelques présidents), parents cupides et sans scrupules pour qui les gosses deviennent un véritable fonds de commerce et enfin des joueurs qui n'ont connaissance d'aucun mécanisme, d'aucune loi régissant les transferts et fixant leurs droits et devoirs. Agents et parents Attention, ce phénomène n'est pas spécifique à la Tunisie mais il est ultérieurement aggravé et incontrôlable dans un football, celui tunisien, régi par des lois floues et obsolètes à la fois, avec un professionnalisme de parade et non de fait, avec des clubs encore régis aujourd'hui par la loi des associations. Des clubs sans stades et des dirigeants sans véritables droits (les clubs ne leur appartiennent pas) et ils sont à la merci de résultats immédiats et de la contestation d'une poignée de supporters, tout comme les entraîneurs qu'ils emploient mais avec tout de même de larges prérogatives financières et sportives dont ils abusent parfois. Agents, présidents et autres dirigeants qui investissent nos clubs à la recherche d'une reconnaissance sociale, d'une notoriété mais aussi pour essayer de s'en mettre plein les poches en s'immiscant dans les transactions des joueurs et qui poussent l'indécence jusqu'à proposer des joueurs ou couper la route à d'autres. Ces comportements sanctionnent sportivement et, par conséquent, financièrement nos clubs dont les bilans flanchent et trinquent. Puis il y a les parents. A peine se rendent-ils compte que leurs gosses ont du talent et qu'ils peuvent le monnayer, qu'ils s'improvisent vis-à-vis et intermédiaires et qu'ils se font manipuler par de faux et vrais agents qui leur font miroiter et miroitent à leurs gosses des contrats millionnaires, ou, pour certains, milliardaires. Pour un seul but : apposer une signature en bas d'un contrat d'exclusivité. Ainsi «piégé», le joueur est prisonnier d'un agent qui pourra le faire mariner ou manipuler à sa guise. Et même briser sa carrière. A ce propos, les exemples sont trop nombreux et connus par tous. Aucun plan de carrière Le dernier élément de la chaîne (mais qui devrait être en principe le premier), c'est le joueur ou si vous voulez le dindon de la farce. Etre joueur professionnel, c'est un véritable métier, connaître ses droits et ses devoirs est essentiel. Avoir un plan de carrière également, ces choses-là, le joueur doit les apprendre dans son club à travers les techniciens qui l'entraînent et le dirigeant qui l'encadre. Or, à ce niveau, c'est le désert. Plus tard, et à la signature du premier contrat et de ceux qui lui succéderont, le joueur doit d'ores et déjà disposer d'un agent agréé crédible et sérieux souvent choisi par lui ou alors par ses plus proches, souvent ses parents. Souvent mus par le seul gain matériel immédiat, le choix des premiers et des seconds est souvent influencé par l'urgence, l'improvisation et la cupidité. Qui sont parfaitement mis à profit par les faux et vrais agents. Ils en oublient qu'un sportif, un footballeur, doit avoir un plan de carrière et tout agent qui n'en propose pas un valable et réaliste n'en est pas un. Entre-temps, les clubs continuent à casquer, les intermédiaires de tous bords à encaisser et les joueurs à rêver de carrières qu'ils ne font pas et d'argent qu'ils ne gagnent pas...