Le second roman de Sonia Chemkhi vient d'être réédité.Histoire d'un exil cruel L'homme du crépuscule est l'histoire d'Iteb. C'est son récit de la quête d'un amour sans cesse perdu, sans cesse désiré, à l'image de son adolescence et de son insouciance malmenées par l'exil.Histoire, écrite du point de vue d'un homme, qui nous dévoile l'intériorité d'un jeune Arabe tourmenté, habité par l'amour d'une femme qu'il ne comprend pas. Parce que son amante s'est affranchie du modèle ancestral. Parce qu'il a été abandonné par un père lâche. Parce que les gens du Nord renièrent l'étranger qu'il était. Chanteur de cabaret au Layali Beyrout dans la Grande Capitale du Nord, Iteb se souvient, s'oublie, s'invente et renaît car il a «des étoiles dans le gosier»... Voici pour le résumé dont on retiendra entre autres que c'est un roman écrit du point de vue d'un homme. Autrement dit , le «je» est le représentant du sexe mâle. «J'essaie de dire ce que les hommes n'osent pas dire ou considèrent comme un tabou» dit l'auteure à ce propos. En effet, Sonia Chemkhi nous livre une méditation sans tabous sur l'amour chez les Arabes, sur le déracinement et sur le pouvoir de créer et d'exister. «L'homme du crépuscule» fait pendant au premier roman de Sonia Chemkhi «Leïla ou la femme de l'aube» où Leila correspondait avec des lettres bourrées de solitude et de sensualité avec un certain «Iteb», un hyper absent de la vie bouillonnante de la jeune fille. Dans «L'homme du crépuscule», c'est justement cet abscent «Iteb» qui s'exprime et nous entraîne dans les méandres de cette absence gercée, balafrée et presque métastasée par la solitude, la pauvreté et le racisme. Et au commencement était la peau de «Iteb», une peau noire de celles qu'il conviendrait de... cacher. «J'étais un corps étranger qui se cachait , qui habitait les sous-sols et les souterrains. Ma terre d'origine a taillé mes tempes, sculpté ma bouche charnue et mon front saillant. J'ai son sang et son humeur. Je faisais peur et je le savais. Je me faisais discret, je m'absentais. Je cédais et composais. Je renonçais et négociais». C'est ainsi que «Iteb» porte sa couleur mais pas seulement... Son exil aussi . Car entre l'Europe et la Tunisie , nulle part il ne se sent chez lui . Sa seule patrie c'est l'amour de Leïla .C'est ainsi aussi que s'exprime Sonia Chemkhi : la phrase est courte , le verbe est saisissant et le rythme est tranquillement haletant . De la littérature de bonne souche.