Le lendemain de la journée d'information, organisée à Korba par le ministère de l'Agriculture et des Ressources hydrauliques et le Fonds mondial de la nature (WWF), à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale des zones humides, experts, participants et journalistes ont été conviés à une visite guidée dans certaines zones humides de la région. Une randonnée instructive, qui nous permet de voir ces zones sous un autre objectif. Reportage. Sur la digue du barrage artificiel Mlâabi (Photo : Koutheir KHANCHOUCH) Il est 9h30 en ce mercredi 3 février 2010. Nous quittons l'hôtel à la hâte, assoiffés que nous sommes de verdure et d'air pur. Non loin de notre point de départ, la lagune protégée de Korba nous ouvre les bras. A priori, rien ne laisse deviner un site protégé, hormis une bâtisse rudimentaire, plantée là pour une fonction esthétique beaucoup plus que protectrice. Sur ce green étendu, des ruines probablement romaines parsèment l'étendue de verdure. «Ce qui est certain, c'est que ce site a été habité et exploité depuis des milliers d'années», fait remarquer M. Faouzi Maâmouri, représentant du WWF. La lagune s'étend sur un espace comptant 9 km de long et entre 500 et 800 mètres de large; un espace qui semble illimité, interminable, assez grand pour constituer une escale idéale pour les cygnes et autre oiseaux migrateurs, venant de Turquie et de Sicile. «Il y a à peine deux semaines, la lagune abritait quelque 1.090 flamants roses qui ont préféré déserter le lieu à cause des pluies. Ces oiseaux trouvent dans la lagune de Korba leur plat préféré, à savoir le «dartémia», un petit mollusque qui leur procure la couleur rose», explique M. Maâmouri. L'un des responsables note qu'un recensement a été réalisé le 16 janvier 2010 à la suite duquel on a pu enregistrer le passage de 3.800 migrateurs représentant 22 espèces différentes. La richesse écologique de la lagune de Korba ne fait pas de doute. Le regard s'y perd à force de contempler ces plantes qui trouvent dans le sol et la saline un climat favorable à leur multiplication. Outre le jonc, il y a même des fenouillets. «Ce qui est fort dommage, c'est que la plupart des riverains ignorent carrément les vertus de la lagune. C'est pourquoi, et en coordination avec l'Apal et la DGF, nous projetons d'élaborer un programme d'éducation environnementale et de sensibilisation, et de faire en sorte que ce site devienne un véritable laboratoire vivant. Il est question de mettre en place un autre programme tout aussi important, en collaboration avec la maison des jeunes de Korba», indique M. Maâmouri. Nos pas nous guident vers une étendue verte, et nous nous arrêtons sur les fragments épars d'un tableau de mosaïque antique. Non pas très loin de cette pièce à valeur patrimoniale, se dresse un amas d'ordures diverses. Une cabane d'environ trois mètres de hauteur a été fabriquée pour permettre aux visiteurs d'avoir une vue plus exhaustive de la lagune. Sauf que la toiture de la cabane a été brûlée, sans doute par un feu allumé là où il n'aurait jamais dû l'être. Etonné, indigné par de telles pratiques, le groupe, à l'unisson, remet en question la qualification même de «site protégé». Mais M. Maâmouri proteste : «Le concept de site protégé n'implique pas la clôture hermétique du lieu. L'idée étant de sensibiliser la population quant à l'intérêt de ne pas abuser de ce lieu aux vertus écologiques, patrimoniales et environnementales innombrables». Un avis que ne partage pas M. Jalel Laâbidi, responsable représentant la direction générale des forêts (DGF). Pour lui, la notion de clôture doit intégrer le principe de la protection des sites écologiques. «Il est vraiment temps de proscrire cette notion; et même de pénaliser tout manquement», suggère-t-il. Après la lagune de Korba, que le groupe a pu admirer à partir des deux extrémités et dont on a pu observer le niveau montant de l'eau, une autre zone humide attendait l'expédition : le barrage artificiel dit «Mlaâbi». Ce site est placé parmi les éventuels sites Ramsar. Il offre une capacité atteignant 5 millions 500 mètres cubes. Il s'agit d'un barrage collinaire qui assure le pompage des eaux douces et ravitaille la ville de Menzel Temime. Il occupe la première place et est secondé par le barrage du lac Sidi Abdelmonaem. «Comme vous voyez, on a procédé au reboisement de la partie située de l'autre côté de la digue. Le reboisement constitue un facteur indispensable à la vie animale dans ces lieux. Il sert, également, à fixer le sol, notamment celui de la digue ; protège le barrage contre l'érosion et assure sa longévité», explique M. Habib Abid, autre représentant de la DGF. L'eau du lac de Mlaâbi brille à merveille sous les rayons d'un soleil généreux. Des canards à tête blanche -les plus petits canards- s'amusent à flotter sur l'eau douce. «Ces canards plongeurs trouvent dans le lac de Mlaâbi un lieu idéal pour hiberner. En cette période, on peut compter jusqu'à 3.000 canards dans le site qui abrite également des foulques et des milouen, une autre espèce de canards se nourrissant de bulbes des plantes aquatiques», note M. Maâmouri. Pour ce qui est de la flore, le barrage de Mlaâbi est riche en végétaux divers, tels que le fragmit, le jonc et le tamariks. Après la visite au barrage artificiel, nous prenons la route de l'une des réserves protégées de faune. Il s'agit de celle de la forêt de Dar Chichou. L'objectif étant de préserver les espèces animales menacées et leur procurer sécurité et protection. Couvrant 1.785 ha, elle constitue un abri pour le buffle de l'Ichkel ainsi que le daim tacheté.