Par Samir Hamza La création de l'Institut national des sciences appliquées et de technologie (Insat), établissement public à caractère scientifique et technologique doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, répond à la volonté de la Tunisie de se doter d'un instrument essentiel à son développement économique et social. L'Insat, avec son organisation et son installation actuelles, a commencé ses cours en septembre 1996, sous les auspices de son premier directeur ; mais il faut remonter à 1992 pour en retrouver l'origine réelle et pour se rendre compte de tous les efforts qu'il a fallu faire pour arriver à former de toutes pièces un établissement universitaire d'une grande importance. L'accession à la tête de la direction, pour la période 2000-2006, d'un éminent scientifique qui avait instauré un climat de confiance et de respect mutuel entre l'ensemble des intervenants, reste gravée dans la mémoire de bon nombre d'enseignants. L'Insat a connu un succès sans précédent, ce n'est que justice de le reconnaître grâce aux qualités de cœur et d'esprit qui distinguaient le directeur, en cette période, qui avait apporté, dans l'accomplissement de sa tâche délicate et pénible, un dévouement digne de tous les éloges. Le démarrage des cours a été un grand succès dans l'histoire de cet établissement. Les efforts déployés par l'ensemble des enseignants et leur engagement moral et professionnel font de cet établissement une structure d'enseignement et de recherche reconnue pour sa formation adéquate et son bon niveau scientifique (approuvé par l'ensemble des professeurs invités à des conférences à l'Insat et des industriels ayant participé aux Journées ingénieur entreprise). L'Insat a été une véritable université par son organisation et ses programmes et par les sentiments qui animent tout son personnel. Malheureusement, elle connaît, depuis, une infiltration malsaine d'un ensemble d'intervenants qui ne cessent de perturber le climat et, par conséquent, d'infecter le niveau scientifique des enseignements dispensés aux futurs ingénieurs. Les problèmes ne cessent de s'amplifier, aussi bien au niveau relationnel qu'à celui du respect de la déontologie du travail. Même si la recherche ne constituait pas l'objet principal de cet établissement dans son projet initial, les structures de recherche sont au cœur de cet établissement et ce choix est devenu incontournable. Elles constituent un facteur transcendant pour le développement de l'innovation et des nouvelles technologies, ainsi que pour l'ouverture sur son environnement socioéconomique. Les efforts déployés par bon nombre d'enseignants honnêtes et vénérables qui ont travaillé gracieusement pour la préparation des appels d'offres, des dépouillements, de l'acquisition et l'installation du matériel, la mise en place des travaux pratiques, l'organisation des congrès... s'usent progressivement. Et comme beaucoup dans le corps enseignant mettent en avant leur démotivation comme principale conséquence d'un pouvoir de direction qui lui permet de changer seul les conditions de travail, il convient de s'interroger, en premier lieu, sur l'efficacité de cette administration. Les rapports humains sont devenus une dimension critique de la vie au sein de cet établissement universitaire. Les difficultés relationnelles entre les différents départements et la direction paralysent le climat de confiance entre ses différentes structures. La dégradation des conditions de travail dans ce «temple du savoir» inquiète les enseignants préoccupés par l'écroulement constant des acquis de l'Insat. Celle-ci concerne aussi les étudiants qui ne sont pas satisfaits de leurs relations avec la direction de cet établissement. L'on est en droit de se demander pourquoi cette dernière a adopté aujourd'hui une telle attitude à l'égard de ses étudiants. Il y a certes un contentieux qui revient au « Mouvement Insat», durant le mois de janvier 2013, invoquant des dysfonctionnements au sein de l'administration qui les aurait lésés tant sur le plan pédagogique que dans leurs activités extrascolaires. Les conditions de travail à l'Insat se sont inexorablement dégradées depuis 2011. La détérioration alarmante du patrimoine immobilier et le nombre insuffisant de locaux destinés à la recherche scientifique témoignent de la négligence de la direction du patrimoine de l'établissement. Un grand nombre d'enseignants estiment que la formation continue est un chantier qui a été et qui reste à ouvrir au niveau de l'Insat pour accroître encore plus le rayonnement de l'établissement et jouer le rôle de révélateur de nouveaux besoins des acteurs économiques. Il est à noter que cet axe n'a pas reçu jusqu'à maintenant toute l'attention requise. Des efforts devraient être consentis pour consolider la gouvernance et (re)travailler sur le plan d'études, afin que l'Insat rejoue pleinement son rôle de formateur de futurs ingénieurs répondant aux besoins actuels du marché de l'emploi. Souhaitons ardemment que l'Insat redevienne un lieu de liberté absolue de la conscience de chacun, et que la confrontation des points de vue joue un rôle moteur dans son évolution. Le dysfonctionnement des structures de l'Insat est principalement dû au non-respect du décret fixant les attributions, la composition et les modalités de désignation et de fonctionnement de ses organes. Le manque d'activités scientifiques au sein de l'établissement et les difficultés croissantes de l'intégration très différente des doctorants selon les formations doctorales et selon les unités et les laboratoires de recherche posent un problème incontestable. La prévention et la gestion des conflits de la masse des doctorants, en particulier en ce qui concerne la mobilité des étudiants, demeurent un souci constant au sein de l'établissement. Il est temps de résoudre les tensions internes liées au choix des spécificités de la formation doctorale. Réunis autour d'un même objectif, de nombreux enseignants ont alerté leur hiérarchie pour dénoncer la décadence de leur institution. Ils ont insisté sur la nécessité de sauver cet établissement, réellement en difficulté. Si toutes les composantes de l'établissement ont tenu à manifester leur morosité, c'est parce que l'Insat est en péril. Il en ressort l'urgence de respecter les lois régissant cet établissement.