Terrassée par la Slovaquie, l'Italie a quitté le Mondial 2010 beaucoup plus tôt qu'elle ne l'espérait. Mais cet échec ne doit rien au hasard. Le tenant du titre n'avait pas les moyens de ses ambitions en Afrique du Sud. Il n'a été grand que dans sa façon d'appréhender la défaite. L'Italie a rejoint la France au cimetière des éléphants. Ce Mondial 2010 s'avère intraitable avec les héros de 2006. Pour la première fois dans l'histoire, les deux finalistes de l'édition précédente ont disparu dès le premier tour. Mais contrairement aux Français, les Italiens n'ont pas doublé ce fiasco sportif d'un psychodrame collectif. Leur honte se limitera au seul terrain. C'est assez lourd à porter comme ça. Après la défaite face à la Slovaquie, qui a scellé leur destin dans cette compétition, les désormais ex-champions du monde en titre ont fait preuve d'une solidarité et d'une dignité louables. Les Bleus pourraient en prendre de la graine. Même si, sur le fond, ça ne change pas grand-chose, la forme est moins honteuse. Le plus digne de tous fut sans doute Marcello Lippi. Lorsqu'il s'est présenté pour la traditionnelle conférence de presse, le sélectionneur italien, très classe, a pris sur lui l'entière responsabilité de cet échec retentissant. "J'aimerais faire une déclaration avant les questions des journalistes", a d'abord dit Lippi. "Je prends toutes les responsabilités pour ce qui s'est passé, si l'équipe n'a pas réussi un match aussi important, si l'équipe n'est pas capable d'exprimer ses possibilités, c'est que l'entraîneur n'a pas fait ce qu'il fallait, tactiquement, physiquement, ni psychologiquement." Lippi: " Je n'ai vu aucun signe" L'attitude de l'ancien entraîneur de la Juventus est remarquable. Mais elle travestit la réalité. A l'évidence, Lippi n'est pas le seul responsable. Loin de là. Il n'est même pas le principal facteur de l'élimination italienne. Si la Squadra en est là, ce n'est pas parce que son sélectionneur n'a pas trouvé la bonne formule. C'est d'abord et avant tout en raison de la faiblesse de son équipe. L'Italie version 2010 n'est pas une grande équipe. On la disait vieillissante. C'était vrai. Fabio Cannavaro, l'ancien Ballon d'or, a vraiment fait peine à voir pendant ces trois matches. Il a 36 ans mais, par moments, il en paraissait 10 de plus. Sa faillite fut spectaculaire, mais elle n'est pas la seule. Terriblement lente derrière, sans une once de créativité dans le secteur offensif, en manque de confiance (aucune victoire en 2010), la Squadra courrait à la catastrophe. Que lui restait-il pour s'en sortir? Le poids de l'histoire? On avait beaucoup entendu ces derniers jours que l'Italie s'en sortait toujours. Certains ont rappelé les trois nuls de 1982 au premier tour en Espagne, avant le triomphe deux semaines plus tard à Madrid. D'autres ne voyaient pas comment la Slovaquie, novice à ce niveau, pouvait barrer la route de l'éternelle Italie. Mais arrive un jour où la réalité du terrain est plus forte que le passé, si prestigieux fut-il. Si Lippi a eu un tort, c'est de ne pas voir venir la catastrophe. Alors que la médiocrité des deux premiers matches de son équipe aurait dû l'alerter, il n'a cessé d'afficher sa confiance. Pas par arrogance. Juste par conviction. Lui non plus n'imaginait pas une élimination si précoce. "Je n'ai vu aucun signe", avoue-t-il. "Je croyais à ce que nous faisions, même si nos deux premiers matches n'étaient pas exactement brillants." On n'ira pas jusqu'à dire que la Squadra est à sa place, car même cette Italie faiblarde aurait dû se sortir de ce groupe F, pas loin d'être le moins dense de tous. "Quand on termine dernier d'un groupe avec la Nouvelle-Zélande, le Paraguay et la Slovaquie, avec tout le respect que j'ai pour ces équipes, c'est sans nul doute normal d'être éliminé", confesse Gianluca Zambrotta. "C'est carrément la honte de ne pas sortir d'un groupe comme ça", confirme Andrea Pirlo, dont la blessure a incontestablement joué un rôle clé. Techniquement, il était un des rares dans ce groupe à être au niveau. Cette perte, conjuguée à celle de Gigi Buffon dès le premier match, a fini d'achever la Nazionale. Son échec était inévitable, mais le fait qu'il survienne si tôt lui donne une ampleur plus grande encore. La plus juste des conclusions revient à Gennaro Gattuso, qui n'a pas pour habitude de tourner autour du pot. "Le football italien doit faire son examen de conscience, parce que nous avons touché le fond."