Comme la France en 2002, l'Italie, championne du monde en titre, aura été incapable de défendre sa couronne quatre ans plus tard lors de la Coupe du monde disputée en Afrique du Sud. Usés et plus au niveau, les héros de 2006 ont vécu un véritable naufrage, dont le symbole aura été le Ballon d'or, Fabio Cannavaro, méconnaissable. Mais à la différence de certains, Marcello Lippi aura su reconnaître ses responsabilités avec classe Tout un pays aura voulu croire au miracle jusqu'au bout. Aux côtés de Marcello Lippi, le héros de 2006, c'est toute une nation qui, malgré les évidences et les faiblesses de plus en plus criantes de sa « Squadra Azzurra », avait refusé d'imaginer le pire et se prenait à rêver d'un remake de 1982 lorsque Paolo Rossi et les siens s'étaient frayé un chemin en huitièmes de finale avec trois matches nuls avant de décrocher la lune... Même la presse italienne avait attendu de lâcher les chiens et l'on pouvait lire encore au matin du match décisif face à la Slovaquie à la une d'un grand quotidien sportif: "Tous frères d'Italie!" Une sorte de méthode Coué qui a volé en éclats avec la défaite (2-3) concédée à Marek Hamsik, le feu follet du Napoli, et son équipe... Un revers final, synonyme d'élimination historique pour une équipe d'Italie qui n'avait plus connu une sortie aussi prématurée en Coupe du monde depuis 1974 et qui surtout rejoint le Brésil (1966) et la France (2002) au rang des champions du monde éliminés dès le premier tour à l'occasion de la défense de leur titre. Deux faillites italienne et française qui font du coup entrer d'ores et déjà ce tournoi sud-africain dans l'histoire comme le premier privé des deux finalistes sortants dès le premier tour ! Une humiliation pour la formation d'un Marcello Lippi qui aura été incapable de remporter le moindre match en Afrique du Sud (2 nuls et 1 défaite), tenue en échec sur le même score (1-1) par le Paraguay et la Nouvelle-Zélande avant de sombrer définitivement face à la Slovaquie. Un adversaire contre lequel l'Italie aura joué sur sa valeur un seul quart d'heure en trois matches de Coupe du monde, le dernier de cette rencontre, qui l'aura vue inscrire deux buts et entretenir un vague espoir en même temps que l'amertume de ses supporters, surtout frustrés par le lob tout en finesse d'un Quagliarella de toute évidence en grande forme, mais sous-utilisé par Lippi... L'échec de Lippi Mais le mal était déjà fait et après une déroute de cette ampleur, l'heure n'était certainement pas aux regrets ou aux fausses excuses. Si les tauliers de l'équipe, les vieilles gloires de 2006, les Cannavaro, Gattuso et autre Zambrotta, incapables de démentir les critiques qui dès leur décollage pour l'Afrique du Sud leur prédisaient le Mondial de trop, ont brillé par leur silence, leur mentor, Marcello Lippi, lui, aura affronté les premiers temps d'une curée qui ne fait que débuter la tête haute, avec la classe du grand technicien qu'il est. "J'assume l'entière responsabilité de cet échec", a confié le sélectionneur italien, élevé au rang de héros national en 2006. "Nous avions un match important à jouer et l'équipe s'est présentée avec de la terreur dans les jambes, la tête et le cœur. Il apparaît clairement que je ne l'ai pas bien préparée. C'est moi qui ai construit cette équipe. Elle m'a convaincu et j'ai voulu répéter l'expérience de la Coupe du monde de 2006. Mais cette fois, je n'ai pas réussi à donner la bonne motivation à mes joueurs." Une autocritique sans concession durant quinze minutes, empreintes d'une grande dignité qui l'honore et dont on aurait aimé que Raymond Domenech fasse preuve... Lippi seul responsable, le chapeau est sans doute un peu grand. Même s'il est en effet le seul et unique responsable de la reconduction des champions du monde 2006, et de cette obstination à garder sa confiance à une charnière centrale Cannavaro-Chiellini, qu'une saison déjà calamiteuse sous le maillot de la Juve aurait dû condamner. Le syndrome des Bleus de 2002 a frappé de plein fouet les Bleus d'Italie de 2010, auxquels on peut accorder certaines circonstances atténuantes à travers les blessures de leur gardien Gianluigi Buffon et de leur stratège Andrea Pirlo. La défection de ce dernier n'aura pourtant fait que mettre en lumière l'absence d'alternatives, celles qui, pourtant, devaient exister, mais que Lippi aura ignorées en laissant à "la casa" les Cassano, Totti, Rossi, Balotelli ou encore Giovinco. Au lieu de quoi, Lippi, 62 ans, aura cherché en vain jusqu'au bout la bonne formule dans un onze jamais établi... Lui qui avoue aujourd'hui ne plus avoir "du tout l'intention de revenir tout de suite à l'entraînement après cela" laisse derrière lui, et à l'image de l'équipe de France, un champ de ruines, le parfum de scandale en moins. Et le chantier offert à Cesare Prandelli, son successeur désigné avant le Mondial, s'annonce tout bonnement gigantesque. Car à travers le naufrage de la Squadra Azzurra, qu'illustre à la une de La Repubblica le titre: «Honte et larmes, une Nazionale à reconstruire», c'est l'état du football italien qui fait peine à voir et avec le niveau d'un Calcio qu'écrase l'Inter Milan. Une Internazionale qui n'a jamais aussi bien porté son nom, elle qui a accompli son triplé historique (Serie A, Ligue des champions, Coupe d'Italie) sans le moindre international italien dans son onze de départ quand dans le même temps, les autres ténors du championnat brillaient surtout par leurs contre-performances. En 2006, l'Italie plaçait trois de ses représentants en quarts de finale...