Les Tunisiens célèbrent, aujourd'hui, la fête des Martyrs, sur fond de reconnaissance à tous ceux qui sont tombés sur le champ d'honneur, sans discrimination La commémoration, aujourd'hui, du 76e anniversaire de la fête des Martyrs constituera-t-elle une nouvelle opportunité pour rappeler que cette date symbole appartient à tous les Tunisiens, sans exclusive, ou sera-t-elle célébrée, de nouveau, dans une atmosphère de division et de tiraillements ? En plus clair, trois ans après la révolution de la liberté et de la dignité, les mentalités ont-elles évolué pour que la fête des Martyrs ne soit plus l'apanage exclusif d'une catégorie particulière, les destouriens se considérant, jusqu'à une époque récente, comme les seuls héritiers de l'épopée du 9 avril 1938 ? Et les autres partis ayant foisonné après le 14 janvier 2011 et qui ont jusqu'ici préféré passer sous silence la commémoration de cette date ont-ils changé d'orientation ou ont-ils adopté un autre concept de ces événements ? Autant d'interrogations qui s'imposent d'elles-mêmes à la lecture des déclarations publiées par certains partis à cette occasion, à l'analyse des déclarations livrées par certains médias et à l'examen des programmes concoctés pour rendre hommage, aujourd'hui, à la mémoire des martyrs, de tous les martyrs, qui ont consenti le sacrifice suprême pour que les Tunisiennes et les Tunisiens recouvrent leur droit absolu à la liberté et à la dignité. La fête est commune De prime abord, une déclaration de Zied Lakhdhar, secrétaire général du Parti patriotique démocratique unifié (Ppdu), à une radio privée, montre que les patriotes démocrates sont convaincus que la célébration des événements du 9 avril 1938 constitue désormais «une fête commune que les Tunisiens se doivent de célébrer ensemble en vue d'exprimer leur fidélité aux martyrs d'avril 1938, aux martyrs des époques Bourguiba et Ben Ali et aux martyrs qui sont tombés après la révolution du 14 janvier 2011, dont en premier lieu les martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, ainsi que les soldats et les agents de sécurité qui ont payé de leur vie en luttant contre les terroristes jihadistes». D'ailleurs, le Front populaire joint l'action à la parole en annonçant, dans un communiqué publié hier, que ses militants célèbrent aujourd'hui la fête des Martyrs en deux temps. D'abord, au cimetière du Jellaz, pour réciter la Fatiha à la mémoire des martyrs du Front populaire Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. Ensuite, ils se déplaceront au mémorial des martyrs à Sejoumi pour rendre hommage aux martyrs qui y sont enterrés. Du côté de Nida Tounès, on a opté pour la décentralisation de la commémoration de la fête des Martyrs. «Contrairement à la journée du 9 avril 2013 célébrée à Ksar Hellal, nous avons décidé de décentraliser au maximum la fête. Ainsi, nous tiendrons des meetings à Radès, Testour, Sidi Hassine, entre autres, pour nous remémorer les sacrifices des martyrs de la liberté et de la dignité et en tirer les enseignements qu'il faut en cette période où nous avons plus que jamais besoin de dépasser nos tiraillements et divisions afin d'éviter à la Tunisie de sombrer dans l'inconnu», précise à La Presse une source auprès de Nida Tounès. Même les destouriens, du moins ceux se réclamant de l'Initiative nationale destourienne (quatre partis à connotation destourienne coalisés) donnent l'impression de se rendre à l'évidence et de saisir que l'heure n'est plus à la paternité exclusive de la fête des Martyrs. «Notre parti organise, aujourd'hui, un meeting au siège de la municipalité de Hammam-Chatt sous la présidence de Kamel Morjane», précise une source informée auprès de l'Initiative nationale destourienne. La même source ajoute : «Nous n'avons nullement l'intention de confisquer la fête des Martyrs en prétendant qu'elle est exclusivement destourienne. Pour nous, tous les martyrs de la Tunisie se valent et ont droit à la reconnaissance». Ennahdha sera aussi de la partie. «Nous allons célébrer la fête des Martyrs dans toutes les régions du pays. Ainsi, le président du parti, cheikh Rached Ghannouchi, préside aujourd'hui un meeting à Béja, alors que les membres du bureau exécutif et du Conseil de la choura iront à la rencontre de nos militantes et militants dans les régions de Sfax, Sousse, Kairouan, Gabès, etc.», révèle une source auprès du département de l'information à Montplaisir. «Nous sommes attachés à la commémoration de cette date symbolique et nous la célébrions même à l'époque où nous étions en prison», indique la même source.