L'économie informelle, un potentiel financier énorme pouvant appuyer le budget de l'Etat La marge de manœuvre pour les dépenses de l'Etat devient de plus en plus limitée face à un faible volume du budget 2014, ont souligné, hier, des experts. Réunis à l'occasion d'une table ronde, organisée par le parti «Afek Tounes» sur «la finance publique et les procédés nécessaires pour sortir de la crise», ces experts ont souligné l'impératif d'introduire des réformes au niveau de la Caisse générale de compensation (CGC) et d'orienter la subvention vers les personnes «qui en ont réellement besoin». Ils ont indiqué, dans le même contexte, qu'il est nécessaire d'opter pour l'intégration progressive de l'économie parallèle dans les circuits formels, admettant que l'économie informelle présente un potentiel financier énorme qui pourrait appuyer le budget de l'Etat. Or, d'après le président du parti «Afek Tounes», Yassine Ibrahim, «l'administration tunisienne n'encourage pas l'intégration de l'économie parallèle dans le secteur formel». «Rien que pour l'obtention d'une autorisation pour l'exploitation d'une boulangerie, on doit passer par 116 procédés administratifs», a-t-il dit pour attirer l'attention sur la complexité des procédures au sein de l'administration. «C'est cette complexité des procédures administratives et aussi la lenteur du rythme de traitement des dossiers, qui poussent certains promoteurs à sortir du formel et à opter pour l'informel», a appuyé le directeur général d'ABC Banking Corporation. Revenant sur le dossier de la subvention, Walid Belhaj, président du Centre tunisien de l'intelligence et de veille économique à l'Institut Arabe des chefs d'entreprises (Iace), a critiqué la politique de subvention adoptée en Tunisie, la qualifiant «d'immorale», car elle «subventionne et favorise le gaspillage». A son avis, une grande partie de la subvention a été orientée vers les personnes qui n'en ont pas besoin. L'ancien ministre de Finances, Jalloul Ayed, a fait savoir que le gouvernement provisoire actuel ne peut pas trancher, d'une façon définitive, dans le dossier de la subvention. «Ce dossier nécessite une audace politique, attitude qui ne peut exister qu'avec un gouvernement élu pour un mandat précis et disposant d'un plan d'action clair», a-t-il expliqué. Rationaliser la subvention Jalloul Ayed a pointé du doigt le gaspillage des produits de base subventionnés, accusant les cafés et les restaurants qui consomment de grandes quantités de pain, de sucre, de thé et de café. Il a, par ailleurs, appelé à prendre des meures draconiennes dans ce domaine. Jamel Belhaj, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, a fait valoir qu'il n'est pas possible d'intervenir au niveau des salaires dans la conjoncture économique et financière actuelle. Pour lui, la seule solution réside dans la rationalisation de la subvention. Il a fait observer que les mesures attendues pour la compression des dépenses dans tous les ministères n'auront pas un grand impact sur la maîtrise des dépenses de l'Etat. Pour preuve, la valeur des bons d'essence, par exemple, atteint 100 MD contre 6,8 milliards de dinars réservés à la subvention dans le cadre du budget 2014. S'agissant des finances publiques, Jalloul Ayed a précisé que le budget de l'Etat est modeste (29 milliards de dinars) et que le gouvernement trouve des difficultés dans son exécution. Il y a nécessité, selon lui, d'impulser l'investissement privé, car il est le seul à pouvoir absorber le chômage en Tunisie. De son côté, Jamel Belhaj a attiré l'attention sur le budget qui a été mis sous pression à cause de l'accroissement des dépenses et de la facture gonflée des subventions, passant de 1.500 MD en 2010 à plus de 7.000 MD prévus en 2014. En ce qui concerne la dette, l'expert a mis en garde contre le risque d'atteindre l'apogée du remboursement des crédits extérieurs de la Tunisie. Le pays risque de passer de 4,6 milliards de dinars prévus pour cette année à près de 6 milliards de dinars en 2017, a-t-il dit, soulignant l'impact que pourrait avoir ce volume sur les équilibres financiers de la Tunisie. L'expert a aussi exprimé son appréhension quant à la composition de la dette, dont un taux de 60% est en devises, et ce qui en découlera comme risques de change en dollars et en euro.