La commission des compromis multiplie les réunions. Les consensus escomptés tardent encore à prendre forme Au moment où tous les feux sont braqués sur les séances plénières de l'Assemblée nationale constituante discutant le projet relatif à la loi électorale, article par article, l'on oublie ce qui se trame au sein de la commission des compromis, où l'on assiste à une véritable bataille rangée à propos des articles considérés comme les articles de la discorde. Censée trouver les consensus qu'il faut sur les articles qui ont divisé les constituants, aussi bien au sein de la commission de législation générale qui a concocté le projet de loi que lors des plénières qui se poursuivent depuis près d'un mois, la commission des compromis offre l'image d'une véritable arène où les tiraillements, les calculs partisans et les désaccords prennent souvent le dessus et bloquent toute tentative de dissiper les tensions et les divisions. Et les points de discorde relatifs à la parité effective sur les listes électorales, au parrainage des candidats à l'élection présidentielle et aux législatives, à l'interdiction de la publicité politique en période préélectorale... de demeurer en suspens, du fait que les membres de la commission en question ont beau multiplier les réunions, à un rythme quasi quotidien, ils ne parviennent pas à des solutions. Rien de concret Et les désaccords persistent au point que les membres du Bloc démocratique ont décidé de se retirer des réunions de la commission. Mongi Rahoui, constituant du Parti patriotique démocratique unifié (Ppdu), confie à La Presse : «Nous avons pris la décision de boycotter les travaux de la commission des compromis. Nous estimons que cette commission n'aboutira à rien de concret. Plus encore, pour nous, le projet sur la loi électorale, dans sa totalité, va reproduire le paysage politique né à la faveur des élections du 23 octobre 2011». Pour ce qui est du principe de la parité hommes-femmes sur les listes électorales sur la base de 50/50 (têtes de liste), constituant à l'heure actuelle l'un des principaux points de discorde, le constituant du Ppdu est on ne peut plus clair : «Nous sommes pour la parité horizontale consistant en ce que les listes électorales soient composées à raison de 50% de femmes et 50% d'hommes, et que les têtes de liste soient désignées aussi à parts égales». Et si, pour beaucoup, les jeux se limitent à l'ANC et à ses commissions, d'autres pensent que la société a son mot à dire sur ce qui déterminera l'avenir du paysage politique national, à travers la future loi électorale dont les différentes dispositions auront un impact certain sur la recomposition de l'échiquier politique national, à la faveur des élections que tout le monde attend avec impatience. Aussi, Noura Borsali, militante de la société civile et ancienne membre de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, s'étonne-t-elle de la tournure des événements au sein de l'ANC, dont les membres semblent tourner le dos à la parité décidée lors des élections du 23 octobre 2011. «C'était une rude bataille au sein de la Haute instance. La parité a été pratiquement arrachée au gouvernement Essebsi de l'époque, qui proposait un quota de l'ordre de 25% pour les femmes. Au vu de la constitutionnalisation de l'égalité hommes-femmes, on s'attendait à ce que la parité évolue vers le taux de 50% de tête de liste», précise-t-elle. Tout en soulignant qu'elle soutient, par principe, «la parité qui constitue une forme de discrimination positive réparant la discrimination basée sur le genre», elle cite les cas de certains pays africains qui ont accompli des pas considérables en la matière. «Au Rwanda, le Parlement est présidé par une femme et plus de 50% des députés appartiennent à la gent féminine. Au Maroc, la parité est inscrite dans la Constitution, alors qu'en Algérie, le président Bouteflika a imposé que les femmes bénéficient d'un quota de 30% sur les sièges du Parlement algérien», ajoute-t-elle. D'autre part, les associations féminines qui suivent les débats au sein de l'ANC ne sont pas restées les bras croisés, dans la mesure où une délégation féminine représentant plusieurs organisations de femmes a rencontré, au cours de la semaine écoulée, les constituants pour leur soumettre leurs revendications et propositions. Il reste toujours à savoir si les constituants finiront par écouter les doléances des femmes ou si le Dialogue national sera dans l'obligation de trancher l'affaire de la parité.