Par Jamil Bellkahel* Je suis originaire de Nebeur, ou plutôt Dachrat Nibber, pour les intimes et comme il nous plaît beaucoup de l'appeler. Dachra est un lieu paisible, au flanc de la montagne « Jbel el Aali », ce petit village noble tout comme les habitants de Dachra. Dachra, qui a été négligée, oubliée et vouée aux oubliettes depuis l'Indépendance sans se plaindre, car noblesse oblige, est devenue le centre de l'attention du monde à cause de l'acte terroriste perpétré contre nos soldats à la fleur de l'âge. Que leurs âmes reposent en paix. Nous entendons des gens dire que les terroristes ont certainement reçu de l'aide de la part des personnes de la localité. Je voudrais dire à ces gens-là que Dachra, le village de la Diva Saliha, Dachra le berceau de feu l'historien Farhat Dachraoui, le Colonel Youssef Dachraoui qui a servi la police de la circulation avec dévouement toute sa vie, l'économiste Hsan Dachraoui qui a instauré la TVA, Hédi Dachraoui qui a formé des générations et des générations à l'académie de la police et dont plusieurs sont des officiers de haut rang, Amor Cherni, notre philosophe et traducteur de Politzer, et j'en passe, Dachra qui a tendu une embuscade aux soldats français lors de leur passage pour atteindre Le Kef, tuant plusieurs soldats et un officier de haut rang, Dachra qui a offert les premiers martyrs de l'occupation française ne peut être le berceau de l'intégrisme. Dachra a été toujours un village tolérant, ouvert avec des Dachraoui ouverts, et bons vivants, des Dachraoui qui travaillent dur pour pouvoir survivre et éduquer leurs enfants. Dachra qui a vécu dans la misère pendant des décennies, où nous devions aller à l'école primaire pieds nus dans la neige et le verglas, pour devenir par la suite des médecins, des ingénieurs, des directeurs, des profs universitaires et j'en passe; cette localité, qui a offert aux Nations unies le buste de la déesse de l'amour et de la beauté Achtart, pour orner sa rentrée principale, ne peut en aucun cas encourager ou même accepter le terrorisme. Dachra a toujours souffert et souffre encore. Elle n'a jamais eu même un seul projet privé ou public et c'est le seul village qui n'a jamais été visité par un président, et qui possède un des premiers barrages fournissant entre 130 et 300 millions de mètres cubes d'eau, irriguant tout le Cap Bon, alors que ses « Swani » appelées « Janna » ou paradis se sont éteintes par manque d'eau, Dachra, qui était le premier à fournir l'électricité à une bonne partie de la Tunisie grâce à son barrage alors qu'elle sombrait dans le noir, n'a jamais accepté ou soutenu le terrorisme ou l'intégrisme. Des questions à repenser Qu'a-t-on fait aux politiciens qui ont relâché des terroristes condamnés par nos tribunaux et nos juges pour actes terroristes et meurtres et qui circulent encore librement, aux leaders qui ont laissé entrer en Tunisie ceux qui prêchent la haine et la division de notre peuple en croyants, demi-croyants et mécréants ? Qu' a-t-on fait aux leaders qui ont invité des cheikhs de jihad ennikah, et défenseurs de la polygamie et l'excision des femmes et qui sont connus pour leur haine envers la Tunisie et qui ne cessent de nous insulter pour notre compréhension et interprétation de l'islam, un islam tolérant, modéré, ne s'opposant nullement au modernisme et au progrès. Ils les ont invités et reçus chaleureusement et leur ont ouvert nos salons d'honneur réservés aux personnalités très importantes. A-t-on jamais condamné les imams qui appellent à la mort de tout opposant à leur mouvement intégriste? A-t-on condamné les représentants à l'assemblée qui ont ouvertement prêché la mort de Rahoui et autres représentants ? Où sont les terroristes qui ont tué Chokri Belaïd, Brahmi et Nagga ? Que leurs âmes reposent en paix. Qu'a-t-on fait à ceux qui ont planifié et exécuté l'invasion de l'ambassade des USA et encouragé et facilité la fuite de plusieurs terroristes ? Les vraies causes du terrorisme sont bien loin de mon village Dachra. Dachra des Fraoudia, Asamria, Khadrania, Wada, de Wled Boujabour, de Ouled Khlifa, de l'Angare, du Dman, Zguag, Sfaya, el Goussa, Ettarefh, Mellègue, le site romain «Ain El Hammam » et autres ne sont et ne seront jamais un nid où le terrorisme peut prospérer. Dachra est bien enracinée dans l'histoire. Nous sommes musulmans et tunisiens jusqu'à la moelle et nous aimons trop la vie et les principes d'ouverture, de tolérance et de modernisme, pour être intégristes et encore moins des terroristes ou des défenseurs ou protecteurs du terrorisme. Les vrais responsables sont ceux qui ont incité à la violence, toléré et ouvertement prêché la violence et divisé le peuple tunisien. *(Professeur)