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Cité multimillénaire !
Le kef
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 01 - 2000

De toutes nos villes, Le Kef est, sans conteste, la ville la plus ancrée. Ses racines remontent à très très loin, à l'époque lithique et néolithique, selon certains chercheurs.
Mais ses pages glorieuses ont commencé avec l'avènement des Carthaginois.
Détruite à plusieurs reprises, la ville a su, à chaque fois, renaître de ses cendres pour défier, avec sa Kasbah fière, ses ennemis devant lesquels, elle n'a jamais cédé. C'est la ville de l'érudition, de l'art, de la culture depuis des époques lointaines. Mais son présent est loin de cadrer avec un passé aussi glorieux, pourtant tout y est pour retrouver son lustre d'antan.
Grande ville du Nord-Ouest, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière algérienne, Le Kef demeure, en dépit des recherches et des fouilles entreprises, un grand point d'interrogation, voire une énigme pour les historiens qui n'ont de cesse de travailler sur ce site historique pour tenter de percer ses secrets. La ville construite sur une colline, surplombant les plaines environnantes, demeure un vrai objet de curiosité de par la richesse de son histoire, qui vous délivre, à chaque coin de rue, l'un de ses pans, mais jamais la totalité.
La découverte, au centre même de la ville, de vestiges, de rudiments d'industries lithiques et néolithiques, a remis en question ce qui s'apparentait à des certitudes sur les origines de la ville. Tous les travaux, jusque-là entrepris, ne peuvent déterminer l'âge exact de la ville, dont la fameuse source Ras El Aïn faisait l'objet d'une grande vénération depuis des époques lointaines. La source, elle-même, constitue une référence historique pour le chercheur et le visiteur du Kef. On affirme que la cité était sous la protection d'Ashtar, déesse de l'amour et protectrice du grenier.
Ville-temple à l'époque numide, elle s'appelait Cirta qui se lit «Chirta». Jughurta en fit sa capitale et celle de la Numidie dès 112 av. J.-C. Quatre ans après, la ville tomba entre les mains des Romains pour être, enfin, annexée à l'empire romain en 46 avant notre ère. Au IVe siècle, elle changea de nom pour devenir Sicca. Elle était déjà un important évêché depuis 256 et après l'avènement du christianisme. Avec sa célèbre école de rhétorique, Le Kef était un grand antre du savoir. Saint Augustin, grand théologien de son époque, compte parmi tant d'autres érudits qui avaient marqué l'histoire de la ville. La basilique Saint Augustin, attaquée par des fanatiques après 2011 qui voulurent en faire une mosquée, témoigne de l'importance de la ville à cette époque.
Ville-temple
A l'époque byzantine, Le Kef connut un grand essor et devint ainsi une place forte sur l'axe Est-Ouest. Elle est, d'ailleurs, célèbre par sa forteresse dominant tous les environs.
La ville changea de nom à cette époque, de «Sicca Veneria» pour devenir «Sicca Beneira», la ville bénie. Et c'est ce nom que les Arabes, qui avaient envahi Le Kef, déformèrent pour devenir «Chaqbanaria», et ce, jusqu'au XVIe siècle qui vit apparaître le nom actuel de la ville.
Le Kef, qui sombra quelque peu dans l'anonymat des siècles durant, pour ne garder que sa vocation agricole comme centre d'intérêt et quelques activités artisanales qui tournaient toutes autour de l'agriculture et le travail de la laine, retrouva ses lustres avec l'avènement des Ottomans qui en firent de nouveau une place forte sur la frontière algérienne. Le premier fort fut ainsi construit en 1600. A cette époque, Le Kef était une ville garnison où se trouvait une troupe de «Oujaks», ces soldats turcs, dont est issu le futur fondateur de la dynastie husseïnite, Husseïn Ben Ali Bey de Tunis, qui s'était marié à une femme de la tribu des Charens des environs de la ville qui grouillait d'activités de toutes sortes pendant le règne de Almorades.
Détruit pendant la lutte pour le trône qui opposa Husseïn B. Ali à son neveu Ali Bacha, Le Kef fut ressuscité de ses cendres avec la réhabilitation de la Kasbah par Hamouda Bacha qui en fit de nouveau une place forte. Et, depuis, la ville connut un grand essor économique. L'activité y était intense. A l'agriculture, s'étaient ajoutées d'autres activités, telles que l'artisanat confiné jusque-là dans le travail de la laine et quelques menus travaux destinés aux garnitures des montures et bêtes de trait.
Avec une communauté juive évaluée à 600 personnes, le commerce y était florissant grâce aux échanges avec les autres villes et villages des environs. Parmi les juifs, on comptait quelques joailliers et bijoutiers avec leurs petits ateliers complètement disparus après leur départ.
Cette communauté active avait sa synagogue dans la ville où elle pratiquait son culte. D'ailleurs, au Kef, se trouve l'une des trois Ghribas de Tunisie, témoin de l'ancienneté de cette communauté qui vivait côte à côte avec la majorité musulmane sans heurt ni la moindre animosité. Une sorte de complémentarité existait entre les deux composantes de la ville jusqu'au milieu du XXe siècle.
Le Kef c'est la Kasbah
Dans cette ville-carrefour, le centre névralgique est La Kasbah qui domine la Médina. C'est la fierté des Keffois qui demeure pour eux l'histoire et l'identité. Toute l'activité, des époques lointaines aux plus récentes, était concentrée dans cet espace convivial et attachant de par ses ruelles, ses petits ateliers, ses demeures originales et l'animation que lui imprègnent des habitants amateurs d'art et de bonne chaire.
La Médina, cœur battant de la ville, abritait dans les temps passés, tant de marabouts et de confréries : la Qadrya, la Rahmania et autres Issaouia. Le grand marabout vénéré des Keffois est issu de cette dernière.
La mosquée à son nom fut construite au XVIIe siècle. Elle témoigne d'un raffinement architectural bien propre aux habitants de cette grande cité à l'histoire chargée.
Les temps ont certes changé pour Le Kef, mais tout demeure vivace dans la mémoire de sa population. La Kasbah a, bien sûr, changé sa vocation. Garnison depuis des lustres, elle est devenue le centre de l'activité culturelle de la ville où se tiennent festivals et toute forme de création artistique, dans une ville où on aime le théâtre et la chanson, en somme la belle vie.
La troupe théâtrale de la Ville du Kef était l'une des plus prolifiques du pays et la plus distinguée avec cet humour bien propre aux Keffois. Elle connut sa gloire sous la conduite de Moncef Souissi. Elle a enfanté Lamine Nahdi, Souad Mahassen et j'en oublie.
Le Kef est connu aussi pour son plat appelé Borzguène, ce couscous à l'agneau et aux fruits secs qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. Au Kef, la viande ovine, c'est la base d'une multitude de mets, tellement, dans cette contrée, on mange de viande ovine, tout comme d'ailleurs dans le Nord-Ouest.
Ville multimillénaire, Le Kef a connu tout au long de sa longue histoire des moments de gloire et des périodes sombres, ces dernières ont toujours coïncidé avec les invasions extérieures : romaine, vandale, arabe, etc. Mais cette ville, qui a certes plié par moments, n'a jamais cédé devant l'injustice et une certaine ingratitude de l'homme. Cette ville, à la Kasbah fière comme une montagne, sa plaine des plus riches du pays, son potentiel économique des plus prometteurs, n'a pas eu sa part du développement depuis l'Indépendance, en dépit de quelques unités industrielles ça et là et une amélioration de l'infrastructure environnante.
Le Kef mérite mieux que cela et il n'y a pas de raison pour qu'il demeure dans l'état où il se trouve avec toutes les villes qui constituent son gouvernorat, Kalaât Sénène, Sakiet Sidi Youssef, le Sers, Kalaâ Jarda ou Kalaâ Khasba, etc.
C'est de l'injustice qu'une contrée aussi riche demeure arriérée et presque oubliée, avec même pas un hôpital régional, digne de ce nom, pour une population dont les jeunes ont choisi l'exode vers Tunis et les villes côtières, en quête d'une meilleure vie, en l'absence de toute possibilité d'épanouissement chez eux.
Savez-vous que c'est dans ce gouvernorat que se trouve le taux des personnes âgées le plus élevé parmi la population tunisienne? Ceci explique cela ! Et pourtant la ville, comme ses environs, regorge de richesses inestimables. Mais a-t-on jamais songé à les mettre en valeur pour une meilleure exploitation et une vraie raison d'être pour les habitants de la région ? Assurément que non, parce que dans ces lieux de la haute histoire, on n'est pas d'habitude frondeur et on est trop fier pour quémander quoi que ce soit de qui que ce soit, même si c'est l'Etat.


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