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«La priorité est d'appliquer la Constitution et non pas de la réviser» Entretien avec Mohamed Ennaceur, président de l'Assemblée des Représentants du Peuple
Pressenti il y a un an à la tête d'un gouvernement de technocrates, Mohamed Ennaceur est élu président de l'Assemblée des représentants du peuple, avec, bien sûr, l'appui de son parti, Nida Tounès, mais également grâce aux voix de l'opposition. Un homme de consensus dont la mission est de bien gérer la diversité politique qui caractérise le Parlement et de lui permettre d'être un atout constructif. Connu pour être un homme discret et peu bavard, Mohamed Ennaceur a accordé au journal La Presse un entretien dans lequel il explique sa mission et donne des éclairages sur un certain nombre de questions. Vous avez été élu à une très grande majorité de l'Assemblée des représentants du peuple, notamment grâce aux voix du parti Ennahdha. Pensez-vous que c'est votre personnalité qui a créé l'adhésion ou s'agit-il simplement d'un arrangement partisan ? Je ne sais pas si c'est ma personnalité qui a créé l'adhésion. Mais je dois avouer être fier de cette forte majorité dont j'ai bénéficié à l'occasion de la présentation de ma candidature. J'ai été honoré de la confiance de tous ceux qui m'ont soutenu et je leur suis reconnaissant quelles ques soient leurs apprtenances politiques et partisanes. Vous avez proposé aux élus de s'inspirer du règlement intérieur de la Chambre des députés sous Ben Ali, est-ce que vous considérez que c'est là votre première erreur en tant que président de l'ARP ? Je n'ai pas proposé aux députés de s'inspirer du règlement intérieur de la Chambre des députés. Ce qui s'est passé, c'est que je suis allé rendre visite à la commission du règlement intérieur pour les féliciter d'avoir accéléré l'adoption d'un règlement intérieur provisoire. A cette occasion, je leur ai signalé que pour la préparation du règlement intérieur permanent, deux précédentes expériences, celle de l'Assemblée nationale constituante (ANC) et celle la Chambre des députés, sont à leur disposition. Je ne leur ai pas demandé de s'inspirer particulièrement de cette dernière, ils ont la liberté de choisir et d'adopter ce qu'ils considèrent le plus convenable. J'ai donc rappelé l'existence de ces deux expériences comme j'ai rappelé aussi que les cadres de l'administration sont à leur disposition en cas de besoin. Cela été mal interprété par les députés et, ensuite, repris et relayé par les médias. Ce n'est donc pas une bavure de ma part. Vous êtes un homme de consensus, c'est en partie pour cela que vous avez été élu, mais est-ce que vous pouvez être intransigeant quand il faut ? Est-ce que cela fait partie de votre personnalité ? Tout à fait, je suis intransigeant lorsqu'il s'agit de défendre des valeurs, des principes et la légalité. Vous êtes assisté par Abdelfattah Mourou (Ennahdha) et Faouzia Ben Fedha (UPL), quel type de rapports entretenez-vous avec eux ? Avez-vous des divergences de points de vue parfois ? Nos relations sont excellentes, nous nous concertons très régulièrement sur les affaires qui concernent le Parlement. Nous collaborons avec un esprit d'entente. Nous partageons les responsabilités de façon simple. Lors de la discussion de la loi de finances par exemple, les séances étaient très longues, j'ai présidé la séance pendant une partie des débats, ensuite, M. Abdelfattah Mourou a pris la relève. Par ailleurs, nous nous voyons de temps en temps pour discuter et traiter des questions communes. Lors de votre discours d'investiture, vous avez parlé de modernisation du travail parlementaire et promis des changements, est-ce que vous pouvez nous en dire plus ? Ces changements ont d'ores et déjà commencé. Nous avons modernisé les outils de travail, en accordant notamment plus d'importance et de place aux nouvelles technologies de l'information. Nous publions l'ensemble des documents sur le site web de l'assemblée. Nous avons également prévu de préparer les décisions qui sont prises lors des séances plénières, afin d'éviter que les débats ne s'éternisent. La conférence régulière des présidents de groupes parlementaires sera là pour trouver des consensus à travers un dialogue continu. J'ai également lancé l'idée de l'organisation de séminaires thématiques, pour, d'une part, approfondir la réflexion sur les thèmes débattus à l'Assemblée et, d'autre part, permettre aux députés d'être en contact avec des intervenants extérieurs qui ont un avis sur les sujets traités. L'efficacité est notre quête permanente. Quelle évaluation faites-vous des premiers jours de l'Assemblée des représentants du peuple, notamment à la lumière du rapprochement entre Nida Tounès et Ennahdha ? Ce qui est à remarquer, c'est que la Tunisie a réalisé des progrès fulgurants et son expérience inédite est citée de par le monde comme une expérience réussie. Nous avons, en effet, réussi grâce à un dialogue continu, à travers la recherche du consensus. Cela a été le cas pendant les trois dernières années et surtout lors de l'année écoulée. Cela nous a permis de sortir de la crise politique que nous avons vécue. Aujourd'hui, la recherche du consensus est encore en vigueur et un acquis qui distingue la Tunisie. Ce qui est un motif de satisfaction. En effet, bien que les partis politiques aient des programmes différents et des doctrines différentes, ils sont animés d'une volonté de dialogue et de coopération pour aller de l'avant et dépasser les différends. C'est l'acquis principal de la révolution. Et je pense que cet acquis va durer pendant les cinq années à venir. La commission du règlement intérieur a pris la décision de sanctionner les députés absentéistes, est-ce que vous êtes favorable à cette mesure ? C'est une disposition particulière du règlement intérieur qui stipule que les absences non justifiées seront sanctionnées par des retenues sur les indemnités des parlementaires. Là, nous sommes encore au stade de projet du règlement intérieur. Personnellement, je n'ai pas de commentaire sur cette question. C'est l'Assemblée qui décidera et jugera de la pertinence ou pas de cette mesure. C'est vrai que certains députés habitent loin, parfois à l'étranger, je comprends que cela ne puisse pas être facile pour eux. Quels sont les projets prioritaires à l'Assemblée des représentants du peuple ? La loi antiterroriste par exemple ? Nous sommes en contact permanent avec le gouvernement pour voir justement quelles sont les priorités. Il existe une multitude de projets qui n'ont pas été examinés par l'Assemblée nationale constituante. Et c'est en collaboration avec le gouvernement que nous établirons un ordre de priorité. Nous avons entendu parler d'un document présenté par deux élus qui proposent la révision de la Constitution de 2014, qu'en est-il au juste ? Cette question a pris plus d'importance qu'elle ne le mérite. A l'intérieur de la commission, il y a plusieurs propositions et contre-propositions, mais la question n'est pas fondamentale. La Constitution vient tout juste d'être adoptée et la priorité est donc de l'appliquer et non pas de la réviser. Je ne sais pas quel motif a justifié cette proposition. Dans tous les cas, ce n'est qu'un avant-projet. Certains s'en ont emparé pour créer la polémique. Sur l'affaire de la personne qui a usurpé l'identité du député Mabrouk Harizi, où en est l'enquête ? L'affaire est entre les mains de la justice.