Commémoration du quatrième anniversaire de la Révolution par l'Orchestre symphonique tunisien, dirigé par Mohamed Makni et la Mezzo Soprano Emira Dakhlia au Théâtre de la Ville de Tunis. Mercredi dernier, l'Orchestre symphonique tunisien était au rendez-vous pour célébrer à sa manière le quatrième anniversaire de la Révolution tunisienne. Une soirée de haute facture menée avec brio par les membres de l'Orchestre sous la direction du maestro Mohamed Makni, compositeur et violoniste à l'Orchestre du Capitole de Toulouse, venu spécialement pour l'événement. Devant une salle archicomble, la soirée débutait par une extraordinaire exécution de l'hymne national, marqué par une puissance architecturale et d'un arrangement orchestral qui suscitait l'enthousiasme du public. Lors du concert, le directeur de l'Orchestre symphonique tunisien annonçait la participation de deux jeunes hautboïstes tunisiens, Hamadi Ferjani et Iyed Jaziri. «Depuis plus de 20 ans, c'est la première fois que deux jeunes Tunisiens jouant de l'hautbois rejoignent l'effectif de l'OST. Avant, on faisait toujours appel à des instrumentistes étrangers. Aujourd'hui nous avons nos propres musiciens», affirme-t-il avec fierté. Ensuite et après une magnifique relecture du 1er mouvement de la Symphonie n°40 de W.A.Mozart, place au «Bel canto» avec pour la première fois, sur la scène tunisienne, la Mezzo Soprano Emira Dakhlia, enfant du pays, évoluant sous les cieux de Russie où elle a entamé sa carrière au théâtre étatique musical de Saint-Pétersburg et a également participé à plusieurs festivals en Russie, Slovaquie et en République Tchèque et a chanté avec des orchestres dirigés par Pavel Bbelnikov, Anatoly Rybalko, Jan MorizOnken et Stanislav Gorkovenko. Impériale par la sérénité de son chant ample et fluide, et sa voix belle et suave, Emira Dakhlia a su mettre en valeur ses qualités vocales et l'étendue du répertoire classique. Notamment dans l'interprétation des magnifiques airs d'opéra : Air de «Cherubino non so piu'», extrait des Noces de Figaro, et l'air de «Dorabellasmanieimplacabili», extrait de Cosi fan tutte de Mozart et Il bacio de L.Arditi, brillamment soutenue au piano par Bassem Makni. Suivent, également, de belles interprétations de «Mon cœur s'ouvre à toi» de l'opéra Samson et Dalila de C. Saint-Saëns et «Nacqui all affann... Non piu' mesta» de l'opéra La Cenerentola de G.Rossini. La cantatrice, en pleine possession de son art et de sa voix, sait faire parler, sans facilité ni vulgarité, ce genre de répertoire aux oreilles contemporaines, il n'était que de voir l'attitude et l'attention de nombreux jeunes auditeurs pour le comprendre. Elle n'a franchement pas volé les applaudissements nourris qu'elle a recueillis. Durant la soirée, nous avons apprécié des compositions de Mohamed Makni telles que des extraits de Suite Arabe, des mélodies aux couleurs orientales des Mille et Une Nuits. Une lecture musicale où la complicité sonore entre le chef et les instrumentistes est immédiatement perceptible, par le soin apporté aux couleurs, l'équilibre des forces et la qualité même de la substance orchestrale. Poète maniant l'allusion quand il le faut, athlète lorsque cela s'impose, drôle et inventif à souhait, Mohamed Makni conduit le discours avec une passion continue, sans oublier de laisser parler la musique en détaillant chaque commentaire, ce qui nous vaut des morceaux d'une richesse infinie. On a eu, également, le plaisir d'apprécier le fruit de son dernier travail préparé pour l'occasion; il s'agit d'une recomposition du Boléro de Ravel — une musique de ballet pour orchestre composée en 1928 par le Français Maurice Ravel (1875-1937) — nous l'avons découverte dans une version orientale qui surpasse l'intention de vulgarisation, avec une sonorité qui emplit l'espace restreint où chaque timbre se détache au sein d'une exécution unitaire, conjuguant flamme et rigueur. Une soirée sublime, digne de la célébration de la Révolution, où l'Orchestre symphonique tunisien a assuré et confirmé, méritant amplement la standing-ovation qu'il a recueillie.