Le recul de l'âge du mariage favorise l'accroissement du nombre des relations sexuelles hors mariage qui peuvent engendrer des maladies transmissibles. Le célibat en Tunisie est devenu en quelques années un véritable phénomène de société eu égard à la mutation des facteurs socioculturels. L'âge du mariage est en train de reculer considérablement. Pour les trentenaires, le mariage est une aspiration mais pas une priorité. L'institution du mariage est-elle en déperdition ? Quelles en sont les raisons ? Nous avons mené l'enquête. Selon les témoignages des personnes interrogées, les raisons sont multiples. Pour les filles, la longévité des études. Aujourd'hui, la femme cherche à s'affirmer dans la société et à construire une carrière professionnelle solide, ce qui nécessite des années d'études et de travail. Pour les garçons, il y a aussi le facteur des diplômes qu'il faut acquérir, ensuite la difficulté à trouver un emploi qui peut prendre plusieurs années à cause du chômage ambiant, le logement coûteux et la préparation du mariage elle-même assez onéreuse. Certains jeunes économiquement bien lotis veulent préserver leur indépendance en menant plutôt une vie libertaire à l'occidentale et retardent le mariage le plus tard possible. Impact sur la démographie Le recul de l'âge du mariage n'est pas sans conséquence sur la procréation. Cela se traduit par une baisse de la fécondité, notamment chez la femme. Le taux de fécondité est actuellement de 2,02 enfants par femme, alors que la norme nécessaire pour un renouvellement des générations est de 2,1 enfants par femme. La configuration démographique du pays peut changer dans les années à venir et évoluer vers un vieillissement de la population. Le vieillissement de la population avec l'espérance de vie qui se situe entre 75 ans pour les hommes et 73 pour les femmes devraient constituer un véritable souci pour les Caisses de sécurité sociale. Une équation difficile Sur le plan sanitaire, le recul de l'âge du mariage favorise l'accroissement du nombre des relations sexuelles hors mariage qui peuvent engendrer des maladies transmissibles. Mlle Ben Cheikh, 36 ans, entrepreneur et célibataire. «Je n'ai pas encore trouvé comme on dit chaussure à mon pied. Un homme qui mérite que je partage avec lui le même toit, me comprend et me respecte». Le mariage assure l'équilibre physique et psychologique d'une personne normalement constituée. Les causes du retard sont pour certains hommes «le manque de moyens et la peur de l'engagement, surtout avec le taux de divorce de plus en plus en hausse. D'autre part, les réseaux sociaux, via les sites de rencontre, ont offert une grande diversification de choix du conjoint», note Melle Ben Cheïkh. Maher, 35 ans, journaliste célibataire, a essayé de nouer des relations sérieuses qui se sont soldées par des échecs. «Le profil de la femme tunisienne moderne pose problème, notamment pour le milieu familial conservateur d'où je suis issu. Je suis partagé entre deux mondes : Tunis où les mentalités sont ouvertes et Sidi Bouzid où la tradition est prégnante. D'autre part, la femme tunisienne est autoritaire. Elle veut avoir toujours le dernier mot et gérer comme elle veut la vie de couple», estime-t-il. Pression familiale Asma, professeur, 30 ans, se marie l'an prochain, pense que l'âge idéal du mariage pour une femme est 25 ans. «Après avoir terminé mes études et trouvé du travail à 28 ans, je me suis fiancée avec un homme que j'aime et qui m'aime. Il est vrai que la société met la pression sur les célibataires et les marginalise». Ritej, 31 ans, professeur, s'accommode pour le moment au célibat. Selon lui, il est difficile de vivre son célibat en Tunisie. A l'instar d'Asma, il considère qu'il y a beaucoup de pression et de tension au sein de la famille. «La famille ne comprend pas que le rythme de vie a changé. Les études et le chômage sont les causes du retard du mariage sans compter les exemples de couple marié et divorcé au bout de quelques mois qui n'encouragent pas les jeunes à se marier vite. Pour ma part, j'aimerais me marier et fonder une famille mais pour l'heure, l'âme sœur se fait rare».