«Le modèle de croissance tunisien a souvent exclu les personnes les plus dynamiques et les mieux formées», a souligné un rapport de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Intitulé «Tunisie, un programme de réformes à l'appui de la compétitivité et de la croissance inclusive», le rapport qui vient d'être publié indique que le modèle de croissance tunisien n'a pas su aider certains des groupes les plus vulnérables des régions intérieures à rattraper leur retard de niveau de vie par rapport au reste de la population. Cette situation découle, selon l'OCDE, en partie des contradictions entre des politiques sociales ambitieuses, en particulier dans l'éducation, et une incapacité à utiliser de façon productive, les travailleurs ayant un bon niveau de formation. «Le pays n'a pas non plus créé les institutions nécessaires à une répartition équitable des bénéfices de la croissance, ce qui s'explique dans une large mesure par les insuffisances constatées sur les marchés des biens et du travail, ainsi que par les faiblesses du système bancaire». Relever le PIB par habitant de 70% d'ici 2060 Toutefois, l'organisation a assuré que la Tunisie serait en mesure de réaliser des avancées considérables à même de relever le PIB par habitant de 70% d'ici 2060, à condition de mettre en place et de réussir de grandes réformes socio-économiques. Il s'agit, notamment, de s'attaquer au chômage élevé, à l'emploi informel et aux inégalités régionales, d'améliorer le fonctionnement de l'administration et de réduire l'interventionnisme excessif de l'Etat, lequel interventionnisme «a eu un effet de distorsion sur les marchés des biens et a entravé l'émergence d'un secteur privé dynamique». Dans le même contexte, l'OCDE a pointé du doigt «une réglementation des marchés des biens trop restrictive et rigide, et une mauvaise gouvernance de beaucoup d'entreprises publiques en situation de monopole». S'agissant des exportations tunisiennes, l'organisation a jugé qu'elles ont progressé plus lentement que celles des pays concurrents et ne suivent plus le rythme de croissance des échanges mondiaux depuis de nombreuses années, et ce, en raison du niveau élevé des droits de douane, qui s'explique par la négociation tardive d'accords de libre-échange avec les grands pays et groupements régionaux. En outre, les exportations tunisiennes ont peu bénéficié de la croissance des pays émergents. Elles étaient au contraire largement tributaires de l'économie européenne qui n'a pas généré une forte demande extérieure. Opter pour la réforme du cadre de la politique monétaire Volet stabilité macro-économique, l'OCDE a recommandé d'opter pour la réforme du cadre de la politique monétaire, en supprimant le plafonnement des taux d'intérêt et en donnant plus d'indépendance à la Banque centrale. Il s'agit, également, de supprimer progressivement les contrôles des prix et d'améliorer la flexibilité des taux de change pour stimuler la compétitivité et constituer des réserves qui serviront de volant de sécurité. «La Tunisie doit procéder à un audit budgétaire des administrations publiques et s'attaquer au déficit budgétaire et aux dettes éventuelles par des réformes budgétaires structurelles», a encore préconisé l'OCDE. Pour ce qui est des banques publiques, le rapport a recommandé l'élaboration d'un programme de privatisation à l'intention des investisseurs stratégiques, et ce, dans des conditions rigoureuses de transparence et, le cas échéant, l'Etat ne devrait pas conserver de minorité de blocage. L'OCDE a proposé, en parallèle, de prendre des mesures pour améliorer les infrastructures tunisiennes. Il s'agit, essentiellement, d'élaborer une stratégie nationale coordonnée pour les infrastructures et d'actualiser les priorités de développement des infrastructures. L'organisation a, toutefois, mis en garde contre le risque d'une nette décélération de la croissance, en raison du vieillissement de la population, soulignant que «le taux de dépendance économique des personnes âgées devrait passer de 20% aujourd'hui à près de 50% en 2060».