Dans un communiqué, l'Organisation tunisienne pour l'orientation du consommateur (OTOC) a alerté sur la situation critique du secteur de la santé en Tunisie. Elle estime que cette situation pèse lourdement sur les citoyens, y compris sur les assurés sociaux, ce qui constitue une violation flagrante du droit constitutionnel à la santé, tel que stipulé à l'article 38 de la Constitution tunisienne. L'organisation explique que les assurés sociaux sont les plus pénalisés par les délais de remboursement de soins excessivement longs et par l'augmentation de leur coût. Des milliers de familles doivent parfois attendre jusqu'à cinq mois pour recevoir les sommes qui leur sont dues. Cette attente, selon l'OTOC, aggrave la pression financière et contraint certaines personnes à reporter leurs traitements ou à s'endetter, ce qui érode davantage leur pouvoir d'achat. L'objectif de cette mise en lumière est de protéger le droit constitutionnel à un accès équitable et rapide aux soins, tout en garantissant la continuité de la protection sociale. Des coûts de santé trop élevés pour les Tunisiens Le communiqué de l'OTOC souligne que les consommateurs assument directement entre 38 et 40 % des dépenses de santé, alors que l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande de ne pas dépasser 25 %. L'organisation rappelle que le salaire minimum garanti (SMIG) est de 566,512 dinars par mois, ce qui rend le plafond de couverture santé inéquitable face à l'augmentation des coûts de traitement. Ce déséquilibre majeur, selon l'OTOC, nécessite une réforme urgente pour rééquilibrer la contribution des assurés sociaux et le coût des soins. L'OTOC insiste sur le fait que, malgré la contribution financière préalable des assurés à la Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM), en vertu de la loi n° 71 de 2004, les délais de traitement des dossiers de remboursement dépassent souvent cinq mois. Ce retard administratif et technique injustifié porte atteinte au principe d'égalité d'accès aux services de santé. L'organisation précise que plus de trois millions de demandes de remboursement sont déposées chaque année, dont la majorité concerne des patients atteints de maladies graves ou chroniques (plus d'un million d'adhérents), ce qui aggrave leur situation de santé. Réformes et contrôles demandés L'organisation appelle à une révision de la liste des maladies graves et chroniques, qui ne correspond plus à l'évolution des conditions de santé et des pathologies. Elle déplore également que le plafond de couverture santé ne suive pas l'augmentation des prix des médicaments et des services médicaux, obligeant les assurés à supporter des charges supplémentaires après seulement quelques mois. Le communiqué relève également que, malgré une loi de 2004 qui privilégie le remboursement sur la base des médicaments génériques, la prescription commerciale reste dominante. Cette pratique force les consommateurs à acheter des médicaments coûteux non remboursés intégralement, ce qui sert les intérêts des laboratoires internationaux. L'OTOC pointe du doigt le fait que de nombreuses cliniques et cabinets privés ne publient pas leurs tarifs, en violation du Code de la protection du consommateur, exposant ainsi les patients à des factures inattendues. Le 32ème rapport de la Cour des Comptes a également révélé des dépassements, avec des marges bénéficiaires allant jusqu'à 300 % sur certains produits médicaux et des augmentations de prix illégales sur certains médicaments. Face à ces problèmes, l'OTOC demande un délai maximal de 15 jours pour le traitement et le remboursement des dossiers. Elle réclame aussi une révision urgente et régulière du plafond annuel de la couverture, en le liant au SMIG et aux indicateurs d'inflation médicale. L'organisation appelle également à rendre obligatoire la prescription scientifique (générique) et la publication des prix des services dans toutes les cliniques privées, en accord avec les tarifs de remboursement de la CNAM. L'OTOC insiste sur la nécessité de réinvestir les ressources de la CNAM dans les établissements de santé publics pour garantir la justice sociale et le droit constitutionnel à la santé. L'organisation conclut que la soumission du secteur de la santé à la seule logique de marché est une violation grave de la Constitution et des lois en vigueur, et qu'une réforme législative et structurelle est nécessaire pour redonner au système de santé public la place qu'il mérite.