Malgré tout, quatre projets de loi classés urgents ont pu être votés lors de la séance plénière L'Assemblée des représentant du peuple a tenu hier une séance plénière pour voter quatre projets de loi jugés « urgents ». Il s'agit d'un accord de libre transport routier des personnes et des marchandises entre la Tunisie et la Serbie, de la ratification d'un accord de prêt entre la Tunisie et le Fonds koweïtien pour la modernisation du réseau de transport et de distribution du gaz naturel, de la ratification d'un accord de prêt entre la Tunisie et le Fonds international pour le développement de l'agriculture pour le financement d'un projet de développement des cultures dans le gouvernorat de Médenine, et enfin de la ratification d'un protocole d'accord sur l'obtention d'un prêt de l'Algérie. Toutefois, la matinée a été marquée par l'indiscipline des députés favorisée par une direction molle du président de l'Assemblée. Aucun respect de l'article 114 du règlement intérieur Dès l'examen du premier projet de loi, plusieurs députés ont chahuté la séance pour évoquer des problématiques annexes qui n'avaient aucun lien avec l'ordre du jour de la séance. Ils ont évoqué le problème du transport à Tozeur, la polémique du voile sur Tunisair et les incidents opposant les forces de l'ordre aux habitants de Tamaghza. Les députés ont profité des quelques minutes qui leur ont été accordées pour donner leur avis sur les projets de loi et exposer un certain nombre de dossiers spécifiques. Toute la matinée a été ainsi marquée par une agitation inédite dans la nouvelle Assemblée. Le député de Afek Tounès Riadh Mouakher a tenu le président de l'Assemblée Mohamed Ennaceur pour responsable de ce laisser-aller et a tenu à rappeler à l'Assemblée que l'article 114 du règlement intérieur dispose que « tout député doit, lors de ses interventions, se limiter au sujet débattu » et que « le président de séance doit retirer la parole au député lorsque celui-ci refuse, après rappel, de se conformer au règlement intérieur ». Ratification d'un accord avec la Serbie L'Assemblée a ratifié hier un accord sur le libre transport routier des personnes et des marchandises entre le gouvernement tunisien et le gouvernement serbe. L'accord vise à impulser les relations économiques et le développement des réseaux de transport entre les deux pays. Plus clairement, la loi permet désormais aux transporteurs des deux pays de mettre en place une ligne régulière dans l'autre pays, et ce après l'obtention d'un permis annuel. Les véhicules des deux pays sont, en vertu de cette loi, réciproquement exonérés d'impôts sur le transport. « Ce type d'accord devrait être étendu à d'autres pays amis, pour permettre de renforcer les échanges commerciaux », a appelé Ibtissem Jebabli (Nida Tounès). Ce n'est pas l'avis du frontiste Chafik Ayadi qui estime que l'accord est pénalisant pour la Tunisie, vu qu'il la prive d'une rentrée d'argent, en faveur des « mastodontes » du transport. Pour lui, il fallait au contraire protéger les transporteurs locaux au lieu de continuer à aller vers une ouverture des marchés « préjudiciable » pour les acteurs locaux. Il est vrai que le rapport de la commission de l'agriculture, de la sécurité alimentaire, du commerce et des services liés au projet est édifiant : en 2013, la Tunisie a importé de la Serbie des marchandises d'une valeur de 58,5 MD, alors que nous n'avons exporté vers ce pays que pour un montant de 201 584 dinars. Les membres de la commission ont noté que les exportations tunisiennes vers la Serbie n'ont pas significativement augmenté depuis une vingtaine d'années. Le ministre des Transports, Mahmoud Ben Romdhane, a néanmoins défendu le projet et note que les relations économiques entre la Tunisie et la Serbie sont « en évolution ». Des bus pour contrer la crise du transport En réponse aux doléances du député Mohamed Lakhdhar Laâjili (Ennahdha), qui s'est plaint de la qualité du transport à Tozeur, le ministre des Transports Mahmoud Ben Romdhane a admis que la situation dans le secteur des transports était très difficile. Selon lui, le secteur vit « une crise structurelle depuis plus de vingt ans et qui s'est aggravée depuis la révolution ». « Nous devons sortir de cette crise pour sauver le cœur de l'économie tunisienne », a déclaré le ministre qui explique que l'une des priorités de son ministère est d'acquérir « un nombre suffisant de bus ». « Cette semaine, je vais tenir une série de réunions dans l'objectif d'acquérir le plus grand nombre possible de bus pour toutes les régions », a annoncé Mahmoud Ben Romdhane. Pour Tozeur spécifiquement, le ministre a promis l'achat de pas moins de 40 bus et de doter, à moyen terme, la région d'une société régionale de transport. Un renforcement des capacités qui permettrait à Tozeur de desservir trois nouvelles villes : Sousse, Sfax et Kasserine. Il a indiqué également que la direction de Tunisair est en train d'étudier la possibilité d'assurer un vol quotidien pour Tozeur. Abderraouf Chebbi (UPL) menacé par la police Lors de la séance plénière, le bloc parlementaire de l'UPL (rejoint par d'autres députés) a vivement protesté contre ce qu'il appelle « les menaces proférées par le chef du district de la police de Tozeur à l'encontre du député Abderraouf Chebbi », sur fond de mouvements de protestations et d'échauffourées avec les forces de l'ordre survenus dimanche dans la délégation de Tameghza. Le chef du district aurait, selon l'élu de l'UPL, envoyé une voiture de police à son domicile pour lui transmettre un message très clair : « M. le député fais gaffe à toi, sinon tu entendras parler de nous ». Abderraouf Chebbi tient le chef du district pour responsable de ce qui pourrait lui arriver, à lui ou à sa famille. Un certain nombre de députés ont qualifié l'incident de grave, craignant le retour de « l'Etat policier » (Youssef Jouini, UPL). Ils ont appelé le président de l'Assemblée à réagir pour éviter que ce genre d'agression contre des élus du peuple ne se reproduise. Le député Abderrazak Chraïet (indépendant) a cependant appelé à considérer les choses avec « calme », vu que ce qui s'est passé à Tamaghza n'est pas aussi simple que ce que décrivent les députés de l'UPL. Une position qui énerve Abderraouf Chebbi, lequel « dénonce » le copinage entre le député Chraïet et le chef de la police de Tozeur. Le président de l'Assemblée Mohamed Ennaceur a condamné la menace dont aurait fait l'objet l'élu de l'UPL et s'est engagé à demander des explications auprès du ministre de l'Intérieur Najem Gharsallah.