L'événement artistique de ce mois de mai est l'exposition rétrospective intitulée «Hier et aujourd'hui» de Sami Ben Ameur qu'accueille la Maison des Arts du Belvédère du 9 au 25 mai. Par la même occasion, l'artiste peintre consacre un catalogue dans lequel il présente un condensé de ses 30 ans de carrière. L'année 2015 demeurera marquée d'une pierre blanche pour Sami Ben Ameur, cet enfant de Chiyem — galerie aujourd'hui disparue et qui a pris en charge sa première exposition personnelle — qui a coupé le cordon ombilical avec la célèbre Ecole de Tunis. Fort d'un diplôme de l'Institut Supérieur des Beaux-Arts de Tunis, puis d'un doctorat de l'Université de Paris 1, il investit la scène artistique tunisienne dominée par de grands vétérans de la peinture, bouscule le monde des arts de l'époque pour apporter un souffle de fraîcheur avec une nouvelle proposition qui consiste en une synthèse de différents courants artistiques marqués notamment par l'abstraction. Déconstruction-construction Il s'en va chercher du côté de la photographie dont le pouvoir visuel est prégnant. Il ne se contente pas de reproduire la réalité telle qu'elle se présente à son regard mais d'agir sur les photogrammes en les transformant en œuvres picturales à part entière. Cela va être du pastel sur photogramme. Il abandonne les routes balisées et emprunte les chemins de traverse, à la conquête de voies nouvelles qu'il rencontre dans les signes et symboles qu'offre la culture arabo-musulmane. C'est l'époque de la déconstruction-construction au cours de laquelle il interroge la matière, les chromatismes et leur luminosité, le support et sa capacité d'expression. Un grand chantier artistique pour lequel il consacre toute son énergie et sa connaissance des arts. Malgré les réticences des uns et des autres, au fil des expositions, Sami Ben Ameur approfondit sa démarche et affine son style. Un style qu'il a voulu cosmique où le macro et le micro se rejoignent. Des voies doubles qui se font écho, formant une belle musicalité. L'artiste reproduit le même monde à travers des atmosphères différentes. Les signes, qui étaient dans les œuvres du début dissimulés, agissent dans les œuvres récentes en tant que formes complémentaires de la structure du tableau. Nouvelles approches Dans l'exposition de l'année 1990 «Tranche de lumière, tranche de couleur» réalisée à partir de collage, la couleur est présente et éclatée. Celle de 2009 au Violon Bleu «Terre originelle» se base sur l'écriture sumérienne et les fossiles. Un travail d'archéologue outillé de plâtre, de ciment, de blanc de zinc, de colles, enfin toutes sortes de matériaux pour un rendu où apparaissent des couleurs terre composées avec de l'acrylique et de l'huile qui offrent une intensité surprenante au regard. Expérimenter de nouvelles approches plastiques et des propositions non conventionnelles où le mouvement, qui est caché à l'intérieur de la forme dans certains tableaux, devient une structure autonome à part entière, totalement surdimensionnée. Ce nouveau label est la marque d'une évolution avérée dans les choix artistiques de Sami Ben Ameur qui allie la rigueur académique et les fantaisies de l'artiste. C'est un large panel de son œuvre qui nous est proposé dans cette rétrospective organisée par le ministère de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine et la Maison des Arts. Le public pourra découvrir les représentations abstraites d'un parcours au passé riche qui se prolonge dans un présent et un futur prometteurs. L'ouvrage réunissant les principales œuvres de cette figure de proue de l'art contemporain tunisien vient compléter une exposition-événement à ne pas rater.