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Pourquoi les agents des Corps Armés ne doivent pas bénéficier du droit de vote
Publié dans Leaders le 17 - 04 - 2014

Suite à la révolution et voulant rompre avec le passé, certains ont tendance à vouloir tout changer, malheureusement, certains changements ne sont pas toujours dans l'intérêt du pays. Dans le cadre de préparation de la loi électorale, certains députés à l'Assemblé Nationale Constituante proposent d'accorder aux militaires et agents des Forces de Sécurité Intérieure le droit de vote ; croyant les élever, ainsi, au rang de citoyens à part entière. A priori, on est tenté de croire à une initiative louable, qui mériterait tout le soutien. Seulement, dans ce cas spécifique et s'agissant des Corps armés du pays, la question n'est pas si évidente qu'elle ne le semble et mérite examen approfondi.
Je m'adresse à M.M les politiques et surtout aux honorables Constituants, l'adoption de cette disposition serait encore une mesure de trop qui ne ferait qu'accélérer la politisation de ces corps avec les conséquences qui s'ensuivent. Il est important de noter que les agents concernés par cette mesure ne sont pas au fait, des citoyens ordinaires; bien au contraire, ils se distinguent par de nombreuses spécificités dont la plus importante et universellement admise, est certainement leur caractère «apolitique».
La Constitution adoptée fin janvier dernier, stipule dans les articles 18 et 19 que les Forces Armées et les Forces de Sécurité Intérieure doivent accomplir leurs missions respectives dans la «neutralité totale». Pratiquement, cela exige d'eux de rester en dehors des sphères politiques et de leurs influences; alors que l'exercice du droit de vote invite les membres de ces institutions, de fait, à la sphère politique et ce avec une grande certitude de les voir tôt ou tard politisés puisqu'ils sont appelés à prendre option par rapport aux partis politiques, aux candidats et à leurs choix, subissant ainsi les contrecoups de tiraillements politiques. Vu la sensibilité de la phase de transition que traverse le pays, une fois ces agents se trouvent amenés dans la sphère politique, personne ne pourra plus garantir leur neutralité prescrite par la Constitution; ce qui se passe du côté des syndicats de certaines institutions sécuritaires est très instructif à cet égard. La politisation de ces corps armés est le germe évident de discorde interne, d'affaiblissement de leur cohésion et de la discipline; alors que cohésion et discipline ont toujours été les sources principales de leur force. Ces corps ne peuvent pas survivre à la diversité politique, qui signifie pour eux désunion et fatalement inefficacité et défaillance dans l'accomplissement de leurs missions institutionnelles. N'oublions pas que la conduite exemplaire de l'Armée Nationale lors de la Révolution, est essentiellement due à son caractère apolitique, à sa cohésion et à la discipline qui y a toujours régné. Garder l'Armée et tous les Corps sécuritaires, y compris les Services douaniers, à l'écart des sphères politiques, n'est nullement diminutif de la valeur de leurs membres, au contraire cela fait d'eux des citoyens de premier ordre et doivent être reconnus par la société comme tels.
Aussi faut-il rappeler que les membres des corps armés sont liés à l'Etat et à la société par une relation très particulière : de part la loi, et compte tenu des missions dont ils sont chargés, on leur demande quand nécessaire l'ultime sacrifice; ils sont dotés d'armes alors que personne d'autre ne peut en disposer légalement. D'ailleurs ces spécificités expliquent le fait que ceux là sont régis par des statuts particuliers bien différents de celui de la fonction publique. Le métier de soldat par exemple, qu'on le veuille ou pas, est très spécifique et n'obéit absolument pas aux mêmes valeurs et fondements qui régissent toute autre profession et a bien des contraintes. Les exigences et les valeurs de ce métier font de ceux qui l'exercent, oui des citoyens mais des citoyens assez particuliers, en devoirs et également en droits; et parmi ces derniers «la suspension de leur droit au vote» tant qu'ils sont sous les drapeaux, et ce n'est pas l'unique dérogation ou contrainte spécifique à ces corps.
En outre, le droit de vote si noble soit-il, n'a jamais figuré, à ma connaissance, parmi les revendications ou propositions des militaires.
Sur le plan pratique, l'exercice du droit de vote par les sécuritaires engendre de nombreux problèmes et soulève en même temps une multitude de questions, en voici les plus importantes:
* les Corps sécuritaires sont appelés à jouer, cette année même, un rôle extrêmement important pour contribuer à assurer la régularité et la transparence des élections projetées, ce qui nécessite la mobilisation totale de leurs ressources humaines, alors que les faire prendre part au vote même, est source de diversion et dispersion de leurs efforts ; pis encore c'est une source de doute quand à la régularité de ces élections;
* Sur le plan de l'organisation, évidemment ces agents ne peuvent pas voter le même jour que le reste des citoyens; imaginez donc les difficultés qui viendront s'ajouter à celles déjà rencontrées par la Commission des élections pour leur réserver une autre journée de vote; et dans ce cas qui assurera à leur place l'ordre public pendant cette journée?
Enfin M.M les Constituants, avons-nous résolu tous les problèmes du pays pour soulever à cette étape sensible de la révolution une telle question dont les concernés mêmes ne s'en soucient pas ? En réalité, ceux là ont d'autres priorités et soucis, de loin plus urgents et plus importants que ce droit de vote.
MM les Honorables Députés favorables au droit de vote des militaires, votre souci de rétablir ceux-là dans ce droit, signe de citoyenneté par excellence, et les élever au niveau du citoyen, part d'un bon sentiment, seulement voilà, dans les faits, l'intérêt du pays et des corps armés, ainsi que les aspirations de leurs membres sont tout à fait ailleurs. En ce qui concerne l'Armée et les questions de défense auxquelles je limite mes propos, je vous invite, à réorienter vos efforts vers les vraies problématiques qui touchent de près les militaires mêmes et la sécurité du pays et dont je vous suggère quelques unes:
- La responsabilité pénale des soldats en opérations: Ne doit-on pas protéger légalement les militaires pendant l'accomplissement de leurs missions? A ce jour, la responsabilité pénale incombe pleinement au soldat. D'ailleurs de nombreux militaires de tout grade, sont aujourd'hui accusés «d'homicide volontaire (!)» ; juste pour avoir exécuté des ordres conformément aux règlements en vigueur ; et depuis trois ans, ils trainent toujours devant les tribunaux, absolument comme s'il s'agissait de criminels de droit commun, quelle incitation !!! Imaginez l'impact et les conséquences de cette démarche sur le comportement des militaires engagés dans les opérations en cours ou futures. Mettez-vous à leur place, que feriez-vous si vous vous trouviez en mission de patrouille sur le mont Chaambi, déclarée zone militaire opérationnelle, vers trois heures du matin face à un inconnu à l'attitude très suspecte et qui n'obtempère pas aux sommations réglementaires? Faites-vous semblant de ne rien voir et laissez le terroriste galoper dans la nature pour bien préparer sa prochaine action terroriste ?ainsi vous vous mettez à l'abri de tout questionnement; ou oserez-vous lui tirer dessus, pour le neutraliser et en débarrasser le pays, risquant ainsi de vous trouver seul face à votre sort devant la justice pour homicide volontaire parce que l'enquête n'a pas su ou pu établir les preuves matérielles irréfutables de l'implication directe du suspect dans des activités terroristes? Oui, c'est une question qui peut vous sembler banale, mais elle ne l'est absolument pas, ni pour le soldat ni pour l'Armée; car elle détermine le comportement du premier en opérations et l'efficacité de cette Institution; elle n'est pas philosophique non plus, elle est bel et bien concrète et d'actualité brulante ; elle se pose aujourd'hui aux soldats déployés sur tout le territoire. Dans tous les cas, pour le soldat ainsi que pour l'issue de la guerre déclarée au terrorisme, cette question est de loin plus prioritaire et plus d'actualité que le droit de vote proposé.
- Politique de défense du pays: Quelle politique et quel Système de Défense pour la Tunisie, en tenant compte des nouvelles donnes géostratégiques dans la région et dans le monde? Avec quelles ressources humaines, quels équipements, quels moyens financiers? Faut-il pour cela réformer l'institution militaire? Si oui, dans quel sens ? Quelles sont les priorités?...
Quel sera le rôle du citoyen? Comment valoriser le service national ? Comment réconcilier les jeunes avec ce devoir constitutionnel et les amener à l'accomplir, de leur propre gré comme le stipule la Loi n°1/ 2004, avec fierté et non pas le considérer une punition et tous les moyens deviennent alors légitimes pour y échapper? Rappelez-vous que la Constitution que vous avez votée MM les députés, stipule bien que le Service National et le payement des impôts, sont deux devoirs constitutionnels (articles 9 et 10). A mon avis, l'acquittement de ces deux devoirs devrait être la première condition à exiger des candidats aux différentes élections et également des postulants à de hauts postes de responsabilité dans l'Administration. Voilà une proposition utile à insérer dans le projet de la Loi électorale.
- La condition socioprofessionnelle des militaires: Quelles mesures doit-on prendre pour améliorer la situation socioprofessionnelle des militaires et leur permettre d'occuper la place qui leur revient dans la société? Cela est de nature à motiver ces agents et garantir l'efficacité de toute l'Institution militaire dans son rôle ? Et là, il faut avoir une politique d'ensemble pour tous les corps armés et éviter les mesures disproportionnées au profit d'un corps au détriment des autres.
En attendant de trouver les bonnes réponses à ces questions importantes et réelles, Messieurs les Honorables Constituants et politiques, de grâce, préserver les corps armés de vos jeux politiques, laissez les se consacrer aux menaces et défis qu'affronte quotidiennement le pays : terrorisme, contrebande, maintien de l'ordre, accompagnement du processus électoral, réussir leurs propres réformes internes …tout en restant vraiment apolitiques. Ne faites pas trainer les derniers remparts du pays à la sphère des jeux politiques. Ayons le sens des vraies priorités set faisons preuve de plus de réalisme et moins de discours idéologique et de démagogie. Aussi, tirons les bons enseignements de l'expérience de l'exercice du droit syndical accordé hâtivement à certains de ces mêmes corps. Ayons conscience tous qu'il n'y a rien de plus dévastateur pour les Corps armés que le virus politique qui signifie désunion, indiscipline et fatalement manquement à leur mission respective. La perte de ces Institutions mène tout droit à la perte de tout le pays. Préservez-les donc. Le droit de vote aux militaires et sécuritaires, surtout dans cette phase de transition démocratique, n'est absolument pas dans l'intérêt du pays, au contraire lui est très néfaste et ne figure aucunement parmi les préoccupations actuelles des agents concernés. On pourra peut-être revenir à ce thème après une trentaine d'années de stabilité et de pratiques démocratiques(!).
NB: «Corps Armés» : englobe l'Armée Nationale, les Forces de Sécurité Intérieure et également les Services de la Douane et tout corps doté d'armes.
Que Dieu garde la Tunisie.
Mohamed Meddeb
Général de brigade à la retraite,
(Armée Nationale)

Tags : Tunisie Constitution Mohamed Meddeb Mohamed Meddeb


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