«Dans la vie on ne fait pas ce que l'on veut mais on est responsable de ce que l'on est» (JP Sartre) Qui sommes nous ? Des citoyens désabusés pour la plupart, découragés, déçus de ce qui se passe dans ce pays, prometteur il y a cinq années, mais enlisé aujourd'hui dans une multitude de crises dont la moindre n'est surement pas celle des valeurs qui se délitent. Nous ne sommes pas encore remis, de l'information d'il y a un mois, le 18 août, précisément, lorsque la plupart des sites électroniques, relayaient la nouvelle d'une jeune mineure soupçonnée d'infractions et de délits, qui aurait eu des relations interdites avec des magistrats et un ancien ministre. Même si tout cela se révèle après coup inexact, ce qui n'est pas évident, le fait d'y penser et d'en parler, montre l'intensité de la crise morale dans laquelle le pays se débat. Cette crise des valeurs, a d'ores et déjà pris une ampleur non négligeable, au point, si nous n'y faisons pas barrage, de s'installer durablement dans notre quotidien. C'est une crise mondiale des valeurs, dans laquelle nous nous sommes enfoncés avec intensité au cours de ce quinquennat. C'est celle du rapport au temps, à l'enseignement, à la culture et au savoir vivre et exister. Internet et les différents médias ont accéléré la vitesse et l'étendue de ce rapport, au détriment de la qualité forcément. Désormais les gens sont concernés plus par la partie émergée de l'iceberg que par sa profondeur. Pas besoin de comprendre intensément, dés lors qu'on est au courant de tout! D'où la fatuité du comportement et la futilité de l'argumentaire, dans une forte proportion de nos populations, y compris de nos élites. De plus, la scène médiatique n'offre que spectacles et discours désolants d'ambitions personnelles et de chamailleries entre les uns et les autres. A ne rien comprendre, ou plutôt si que tout le monde s'invite à assumer tout et n'importe quoi! Evidemment, ces comportements se déclarent, s'affichent, et se répandent en boules de neige pour s'incruster dans toutes les mentalités, dans toutes les ambitions des plus louables aux plus fâcheuses, faisant de l'univers politique, une grande Agora où tout se marchande et tout s'achète. Cette crise est mondiale, c'est exact, et la Tunisie ne détient pas le monopole de la perte des valeurs. Cependant, sa généralisation est un attribut tunisien par excellence, qui voit des enseignants des médecins et des hommes de lois, s'étriper et s'écharper, devant les caméras gloutonnes et gourmandes de ces dépassements si spectaculaires, qui font culminer plus que tout autre spectacle, la fameuse audience, dont nos compatriotes raffolent tout en décriant les méfaits. La multiplicité des chaines télévisuelles, et la course à l'audience, sont relayées par l'existence en surnombre des partis politiques, avides de pouvoir et de présence dans toutes les institutions qui comptent : on commence par des portefeuilles ministériels, et en cas d'échec on adapte ses ambitions vers tout ce qui vient après. Comment agir en toute indépendance, quand vous êtes soumis, quelle que soit votre position dans la hiérarchie sociale, gouvernementale institutionnelle, à la dictature médiatique permanente des commentaires, toujours contraires, voire malveillants - les supporters se gardant bien d'intervenir dés lors qu'ils ne se sentent pas menacés dans leurs acquis ou dans leurs ambitions? Evidemment, les médias jouent un rôle important dans cet abaissement de la démocratie, partout, mais surtout dans les périodes durant lesquelles se joue la conquête du Pouvoir, et celle des petits pouvoirs. La crise des valeurs dans notre pays emporte tout sur son passage : discours vénéneux, comportements à l'inverse obséquieux, et appétits personnels aventureux. Et en fin de compte, personne n'en sort grandi, même pour les gagnants, pour qui tout est bon à prendre, même s'ils ne se font pas trop d'illusions, sur la pérennité de leurs succès, et sur les vrais acquis qui résultent pour le pays.