Le conseil de l'Ordre appelle à l'organisation de rassemblements de protestation au niveau de tous les tribunaux à partir d'aujourd'hui et annonce la tenue d'une Assemblée générale extraordinaire, le 26 novembre, pour statuer sur les différents moyens d'escalade. Les avocats ont observé, hier, une grève générale au niveau de tous les tribunaux et manifesté devant l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) en signe de protestation contre les mesures fiscales prévues par la loi des Finances pour l'exercice 2017. «Les avocats se révoltent contre la loi arbitraire», «A bas les mesures impopulaires du gouvernent », ont scandé les défenseurs de la veuve et de l'orphelin lors du rassemblement de protestation organisé devant l'ARP, où les députés ont entamé l'examen du projet de budget du ministère de la Justice. Plusieurs avocats qui siègent à l'ARP, dont Abeda El Kéfi, député du Mouvement du projet Tunisie et Samir Dilou du mouvement Ennahdha, se sont joints à leurs confrères, et exprimé leur refus des mesures relatives à la fiscalité des professions libérales et plus particulièrement de la profession d'avocat. «Nous avocats à l'ARP nous sommes contre ce projet de loi qui porte atteinte à ce métier et nous ferons tout pour qu'il ne passera pas», a lancé Abeda El Kéfi. Une délégation présidée par le Bâtonnier, Me Ameur Mehrezi, a été finalement reçue par le président de l'ARP, Mohamed Ennaceur, pour tenter de trouver une solution consensuelle au différend qui oppose le gouvernement à l'Ordre des avocats. L'escalade Le projet de loi de Finances 2017 prévoit un timbre fiscal pour tout acte que l'avocat sera amené à faire dans le cadre de l'exercice de sa profession à titre d'avance sur les impôts qu'il doit payer. La valeur dudit timbre sera entre 20 et 60 dinars, car elle dépendra de l'instance judiciaire concernée de la nature de l'acte accompli. Les mouvements de protestation interviennent suite notamment aux «développements négatifs que connait le dossier du régime fiscal régissant la profession d'avocat». Après avoir promis de retirer les articles 30, 31 et 55 du projet de la loi des Finances, le gouvernement a en effet fait machine arrière, chose qui a poussé le Conseil de l'Ordre a appelé au limogeage de la ministre des Finances dans un communiqué publié hier. Le Conseil de l'Ordre a également appelé, dans ce même communiqué, à l'organisation de rassemblements de protestation au niveau de tous les tribunaux à partir d'aujourd'hui (jeudi) et annoncé la tenue d'une Assemblée générale extraordinaire le samedi 26 novembre pour statuer sur les différents moyens d'escalade. Le mouvement de protestation enclenché hier pourrait en effet se transformer en grève ouverte, en fonction de l'évolution de la situation. Les avocats avaient déjà observé, le 21 octobre dernier, une «journée de colère» et une grève générale d'une journée pour protester contre la loi des Finances 2017. Les propositions de la profession Le conseil de l'Ordre des avocats a préparé un projet de loi alternatif relatif à la fiscalité du barreau. Ce projet de loi prévoit notamment l'instauration d'un régime fiscal spécifique qui répartit les avocats en trois catégories en fonction de leurs niveaux de revenus. La première catégorie regroupe les avocats dont les revenus n'excèdent pas 100.000 dinars par an. Ces derniers devraient être astreints à l'article 34 du code des impôts applicable aux petits commerçants et aux artisans et pourraient verser à l'Etat l'équivalent 5% de leur chiffre d'affaires. Les avocats qui gagnent jusqu'à 150.000 dinars par an acceptent l'instauration d'un timbre fiscal libératoire de 20, 40 et 60 dinars en fonction du type du tribunal par devant lequel l'affaire est traitée dans le cadre d'un régime fiscal réel simplifié. Quant à ceux qui gagnent plus de 150.000 dinars, ils seraient astreints au régime fiscal réel. Ils devraient à la fois accepter l'instauration de timbres fiscaux et payer par la suite un pourcentage qui reste encore à déterminer sur leur chiffre d'affaires. S'agissant des modalités du contrôle des revenus de ces diverses catégories d'avocat, le conseil de l'ordre recommande vivement le lancement du chantier de la numérisation de la justice pour pallier au manque d'agents chargé du contrôle fiscal. Selon des données statistiques publiées par le ministère des Finances, les défenseurs de la veuve et de l'orphelin ne s'acquitteraient pas convenablement de leur devoir fiscal. Ces données montrent que sur 7260 avocats inscrits au Barreau, seuls 4.234 font leurs déclarations fiscales annuelles. Les impôts sur les revenus déclarés des avocats rapportent à l'Etat 11,824 millions de dinars par an, soit 124 dinars par mois et par avocat en prenant en considération le nombre total des avocats et 213 dinars par mois si on retient uniquement ceux qui font leurs déclarations fiscales.