Malgré la signature d'un accord prévoyant la majoration des salaires des fonctionnaires au titre des années 2017 et 2018 entre l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) et le Gouvernement, un nouvel accès de fièvre revendicative est perceptible dans plusieurs secteurs depuis quelques semaines. Ainsi, la fédération générale de la santé a décrété vendredi une grève pour le 5 février dans tous les centres hospitaliers du pays (groupements de santé de base, hôpitaux régionaux et hôpitaux universitaires) en signe de protestation contre la non-application des accords conclus précédemment avec le ministère de la Santé publique. «Cette grève qui concernera les infirmiers, les techniciens supérieurs, les agents d'exécution et le personnel administratif vise à maintenir la pression sur les autorités pour qu'elles mettent en application des accords susceptibles d'améliorer la situation des établissements publics de santé» souligne Ahmed Brahim, secrétaire général adjoint de la fédération rattachée à l'UGTT. Selon lui, ces accords portent notamment sur l'octroi d'une promotion exceptionnelle à toutes les catégories du personnel soignant et administratif, l'octroi d'une indemnité de transport, le reclassement professionnel des agents d'accueil et d'exécution, la gratuité des soins et la révision de la grille salariale pour les dimanches et les jours fériés. La Fédération a précisé dans ce cadre que les prestations de soins seront assurées uniquement dans les services d'urgence et d'hospitalisation durant la grève. Revendications excessives Pour rappel, fédération générale de la santé avait lancé il y a deux semaines un préavis de grève pour le 29 mars courant mais le Bureau exécutif de l'UGTT a refusé de donner son feu vert à ce débrayage. Les dirigeants de la fédération ont expliqué ce refus par un vice de procédure. Selon eux, le premier appel à la grève a émané d'une «rencontre des régions» alors que tout mot d'ordre de grève doit être lancé par la commission administration d'un syndicat ou d'une fédération syndicale, selon le règlement interne de la centrale syndicale. Mais selon certaines sources, le Bureau exécutif de l'UGTT a refusé de donner son feu vert à la grève qui était prévue le 29 mars en raison des «revendications excessives» de la fédération dont certaines ont un important impact financier. L'accord sur les majorations salariales dans la fonction publique conclu fin 2016 entre l'UGTT et le gouvernement stipule en effet que les syndicats doivent s'abstenir de revendiquer de nouvelles augmentations durant les années 2017 et 2018. D'autre part, le personnel des recettes des finances devraient débrayer les 5, 6 et 7 avril prochain en réponse à un mot d'ordre de la fédération générale des finances. La principale revendication de cette fédération est l'adoption d'un statut spécifique pour les 10.500 agents de la fiscalité et du recouvrement. Ce texte devra les protéger de toutes les formes de menace qu'ils pourraient rencontrer pendant leur travail. Le projet de statut existe depuis 2013, mais il n'a pas été examiné par l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Enseignement : l'ultimatum Réunie vendredi, la commission administrative du syndicat général de l'enseignement de base a, par ailleurs, adressé un ultimatum au gouvernement concernant le limogeage de Néji Jalloul. L'exécutif a jusqu'au 15 avril trouver une alternative à Néji Jalloul à la tête du ministère de l'Education. Cette décision est identique à celle prise par le syndicat général de l'enseignement secondaire. Ce dernier est revenu sur sa décision de suspendre les cours à partir du 27 mars. Mesure qui a été reportée à une date ultérieure, suite au refus du Bureau exécutif de l'UGTT de prendre les élèves en otage à l'approche de la période des examens. Le syndicat de l'enseignement secondaire s'est ainsi trouvé en quelque sorte dos au mur puisque la direction de la centrale syndicale a refusé d'adresser un préavis de grève illimitée dans les collèges et les lycées au ministère de l'Education dans les délais réglementaires. Le code du travail stipule que le préavis de grève doit être adressé par le Bureau exécutif de l'UGTT au ministère concerné dans un délai minimum de 10 jours avant la date fixée pour le débrayage. Face à cette «rébellion» des syndicats, la direction de l'UGTT est acculée à jouer un difficile exercice d'équilibrisme pour échapper à une crise interne. Ce risque est d'autant plus grand que la fédération générale de la santé a menacé récemment, par la voie de son secrétaire général Othmane Jallouli, de quitter les rangs de l'UGTT au cas où le Bureau exécutif de l'organisation ne cautionnerait pas l'appel à la grève.